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Jaakko Eino Kalevi - Delicieuse Musique

Publié le 31 mars 2017 par Delicieusemusique @delicemusique

Jaakko, Eino et Kalevi . Trois prénoms pour un artiste multifacettes. Producteur et multi-instrumentiste autodidacte, Jaakko Savolainen – de son « vrai » nom – fait partie de ces inclassables, et surprend inlassablement à chaque nouvelle composition. Néanmoins, puisqu’aujourd’hui nous aimons mettre les gens dans des cases, si nous devions définir le géant finlandais nous dirions sans aucun doute que c’est un rêveur, dont les compositions s’inscrivent dans un courant pop experimental, nuancé et influencé par un background musical dense.
Né en 1984 à Tiituspohja, dans le centre de la Finlande, JEK passe son adolescence plongé dans l’univers du métal mélodique – on citera Dream Theater entre autres – avant d’enregistrer quelques beats Hip-Hop, marque de la grande variété de ses influences. Puis, le futur artiste déménage à Helsinki, où il devient conducteur de tramway – ce qui, selon la légende, serait à l’origine de cet imaginaire hors du temps de ses titres, qui circule parmi les Hommes et les Histoires. Mais même sans entrer dans de telles affirmations, il est certain que cet emploi lui a permis de prendre le temps de composer, réfléchir, enregistrer ses créations, et qu’il a été décisif dans le début de carrière de Jaakko. Finalement, il finit par quitter sa terre natale et s’installe à Berlin, plus propice aux sorties nocturnes et au développement de ses albums, où il réside depuis plusieurs années. Il entame alors plusieurs tournées, accompagnant des artistes comme Unknown Mortal Orchestra, voyageant jusqu’à New York, ce qui lui permettra d’attirer l’oreille des mélomanes de tous les horizons.
Mais parlons de sa musique, puisque c’est le sujet ici. Intense, précis, toujours très attaché aux détails, le Finlandais débute véritablement en 2007, avec la publication sur le label Helmi Levyt de son premier album intitulé Dragon Quest incluant l’excellent titre Popcorn Party et sa basse percutante. S’en suivent de nombreux projets, solo ou accompagné, avec des EPs, des singles. La révélation arrive avec Modern Life , sorti en en 2010 chez Helmi Levyt. Après deux titres dans un style qui lui est propre, la balade romantique Flexible Heart et ses notes Hip-Hop s’intègrent à l’univers éthéré du Finnois. La pièce maîtresse de l’EP s’intitule Macho . Ses textes en français, son ambiance dynamique et vivante, teintée de soul en font un titre absolument formidable. Savoureux, volontairement naïf, presque désuet, le groove de I Wanna Win est un retour réussi dans les 70’s. Son solo de saxophone, composé et joué par Jaakko après seulement deux semaines de pratique de l’instrument (ce genre de performance, ça se souligne) est une merveille. Une marque de l’univers éclectique de Jaakko, dont la musique s’inscrit à la fois dans le passé, le futur, et un présent décalé. Un vent de fraîcheur.
On citera également sa (deuxième) collaboration avec son ami Long Sam sur un EP intitulé sobrement Totuuden Rakastajat / Amateurs De Vérité , sorti deux ans plus tard sur le label finlandais. Avec le très dichotomique « Cruisin’ » qui cerne bien l’univers de l’artiste : originalité, synthés vaporeux, et fond rugueux dans un mix très expérimental. Puis le titre "Plastic Bag", d’abord naïf, qui évolue vers une course frénétique dont la tension urgente se ressent tout au long du LP. "She’s the line" clôt ainsi le disque, sur une touche plus intense, voluptueuse.
Dreamzone , format plus court sorti en 2013, est sur la lancée de ses précédentes créations. Les mélodies ont un agréable goût vintage, en témoigne le solo de guitare de Memories, ou l’ambiance édulcorée légèrement mélancolique de "Uu uu uu", qui rappelle parfois Metronomy. Le titre de l’EP est d’ailleurs un clin d’oeil au site web Finlandais du même nom, sur lequel les internautes racontent et partagent leurs rêves. Jaakko dit s’être déjà inspiré de ses lectures pour construire des morceaux. Ainsi, des voix vaporeuses et le saxophone de Jaakko emmènent No End dans un voyage onirique, qui se transforme en une aventure psychédélique pour introduire le progressif "When You Walk Through Them All". Presque un hommage à la musique progressive sauce 70’s, ce titre est une conclusion particulièrement réussie à ce Dreamzone. L’expérience est prolongée par quatre remixes indéniablement plus dansants, proposés par Heatsick’s Continental Drift, Tom Noble, Peaking Lights et Vezurro.
En 2014, l’expérimental Yin-Yang Theater paraît sur Beats In Space Records (le label dirigé par Tim Sweeney, et qui héberge Paradis, que l’on a déjà pu vous présenter). L’intro psychédélique "Speak Out", la disco surprenante du loufoque "Pass The Cat" ou le presque-funk "Sensaatio" font évoluer l’univers de Jaakko vers des ambiances électriques. On en revient toutefois aux expérimentations spatiales de l’artiste avec "Tecno Souvlaki" et "Let The Energy Be Your Teacher". Le 12’’ est conclu par la deep house de "XO-tic Grlz", qui évolue peu à peu vers un style plus proche de ce que l’artiste à l’habitude de nous proposer. Comme si ce disque n’était qu’une parenthèse au milieu de l’œuvre de l’artiste.
Jaakko Eino Kalevi frappe un grand coup un an plus tard avec son album éponyme chez Weird World – une sous division de Domino, le label anglais de Arctic Monkeys, entre autres perles. Sur ce LP, le saxo est joué par la saxophoniste Jorja Chalmers, notamment membre aujourd’hui du fameux Roxy Music, et Jaakko utilise une vraie batterie. Un moyen pour lui de faire sonner sa musique comme celle d’un groupe et non plus comme celle d’un artiste solo parfois labellisé « électro ». Le premier titre s’intitule JEK. Une voix haut perchée un brin plaintive laisse place à l’artiste, dont les « Minun nimeni on Jaakko Eino Kalevi » sonnent comme une présentation polie préalable au spectacle offert par l’album. Une façon également d’expliquer à tous ses auditeurs la prononciation de ses prénoms, comme il le dit lui-même avec humour. Double Talk , second titre de l’album, est une balade rêveuse dans l’univers du Finlandais, mélancolique et chaleureuse à la fois. La performance de Suad Khalifa sur le sensuel "Deeper Shadow" amène un contraste saisissant, et ouvre la voie au rock plus tranchant de Say ou à la dynamique binaire de Night At The Field. "Mind Like Muscle" et ses influences disco, ou le jazzy "Don’t Ask Me Why" élargissent encore la palette musicale du disque, d’une richesse rare. "Hush Down", pop plus sombre, est un prélude au drame final "Ikuinen Purkautumaton Jännite", chanté avec son épouse Sonja Immonen. Ce dernier acte magistral est décomposé en deux scènes d’intensité croissante dont un ending maîtrisé qui s’achève dans un suspens jubilatoire.
Et la même année, sortait la très dansante reprise de Popcaan « Everything Nice » avec la chanteuse Farao. On trépigne avant le prochain album.
Alors voilà, nous n’avons évidemment pas été exhaustif sur l’ensemble de l’œuvre de l’artiste au vu de sa densité et de sa richesse, mais il faut bien s'arrêter un jour, et laisser un peu de mystère. Jaakko Eino Kalevi est un artiste qu'on ne peut que vous conseiller de découvrir par vous-même, avec de nombreuses perles disséminées çà et là que nous n'avons pas évoquées. Un artiste majeur, et surtout un coup de cœur.


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