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[Critique] OUTSIDER

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] OUTSIDER

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Titre original : Chuck

Note:

★
★
★
★
½

Origine : États-Unis
Réalisateur : Philippe Falardeau
Distribution : Liev Schreiber, Ron Perlman, Elisabeth Moss, Naomi Watts, Jim Gaffigan, Pooch Hall, Morgan Spector, Michael Rapaport…
Genre : Drame/Biopic
Date de sortie : 10 mai 2017

Le Pitch :
Chuck Wepner est un boxeur. De ceux qui encaissent sans broncher. Champion des poids lourds du New Jersey, il est surtout connu dans sa ville, Bayonne, mais guère au-delà. Pourtant, un jour, une occasion en or se présente. Mohammed Ali, le champion du monde, lui propose un match pour le titre suprême. Et alors que tout le monde le donne perdant, Wepner tient 15 rounds et parvient même à mettre Ali au tapis à une reprise. Quelque-part du côté de New York, un certain Sylvester Stallone regarde le match et s’inspire de Chuck Wepner pour écrire Rocky, avec le succès que l’on connaît. À la sortie du film, Wepner, que l’on appelle désormais le vrai Rocky Balboa, se retrouve auréolé d’une célébrité qui va le précipiter dans un engrenage duquel il aura bien du mal à se sortir, entre fêtes débridées et tentatives plus ou moins désespérées de briller par lui-même, sur le ring ou en dehors. Histoire vraie…

La Critique de Outsider :

« Vous me connaissez tous, sans vraiment me connaître ». C’est l’une des premières phrases que prononce Chuck Wepner dans Outsider. Une manière de se présenter, lui le véritable Rocky Balboa, dont le combat d’anthologie contre Ali, a changé sa vie pour le meilleur, mais aussi pour le pire.

Outsider-Liev-Schreiber

The Fighter

Une histoire méconnue mais formidablement cinématographique, qui méritait assurément de se retrouver sur un écran de cinéma. Une trajectoire de vie indissociable de Rocky, portée par un Liev Schreiber véritablement investi, vu qu’on le retrouve non seulement devant la caméra, mais aussi au scénario (il a contribué à l’écriture) et à la production. Schreiber qui livre peut-être la performance de sa vie, profitant de ce rôle en or pour saisir quelque chose de puissant et imposer une gouaille et un charisme abîmé qui ne cesse d’impressionner, à mesure que se déroule cette existence passionnante car inscrite presque malgré elle dans l’inconscient collectif d’une culture pop fédératrice. Métamorphosé mais pas trop non plus, Schreiber n’en fait pas des tonnes et trouve le ton juste pour rendre justice à la complexité de Wepner. Dans les moments de gloire, dans la débauche et l’euphorie et dans le doute et le chagrin. Si Outsider est aussi bon, c’est aussi grâce à lui. Grâce à l’approche pleine de tendresse et de déférence, d’un mythe bien particulier à bien des niveaux, dont le film censé raconter la vie s’impose comme un classique instantané. Rien de moins. Sans oublier, forcément, Elisabeth Moss, très touchante, Naomi Watts, Ron Perlman, parfait, ou encore Michael Rapaport, particulièrement émouvant et juste et Jim Gaffigan, avec une mention à Pooch Hall, qui campe un Mohammed Ali certes moins flamboyant que son modèle (mais pouvait-il en être autrement ?), mais néanmoins très solide.

Keep the distance

Derrière l’objectif, le réalisateur canadien Philippe Falardeau signe son deuxième essai américain après avoir notamment impressionné son monde avec des œuvres comme Monsieur Lazhar, nommé aux Oscars en 2012 dans la catégorie meilleur film étranger. Ici, le cinéaste applique avec passion et talent les codes du biopic tout en veillant à donner à son long-métrage une teinte et une saveur funky qui font qu’il est facile de le rapprocher de l’œuvre de Martin Scorsese, Les Affranchis en tête. Bien aidé par une production design impeccable, Falardeau évolue au sein d’une reconstitution habile de l’Amérique des sixties et s’attache à une sorte de microcosme (cette petite ville du New Jersey), dont Chuck Wepner est en quelque sorte le roi. Il parvient à livrer un film immersif, en n’excluant jamais le spectateur. Et si c’est bien Wepner le centre d’attraction majeur, la faculté du réalisateur de ne pas délaisser son environnement et les autres protagonistes, vient nourrir une émotion de plus en plus prégnante. On pourra toujours venir argumenter que les effets et autres filtres ajoutés à l’image ne sont que des artifices et qu’au final Outsider n’est qu’une copie des grands classiques cités plus haut, mais ce serait passer à côté de l’essence du film. Ce serait oublier que si Outsider n’est en effet pas des plus originaux, il sait mesurer ses effets et donner de l’ampleur à son récit, sans y sacrifier une intégrité renouvelée en permanence.

Wepner vs. Rocky

Quelle histoire passionnante ! Surtout quand on connaît tous les Rocky par cœur. Certes, Outsider prend quelques petites libertés avec la réalité, mais généralement, ce qu’il nous raconte, sur biens des points à la façon d’un documentaire, nous permet de passer de l’autre côté du miroir, dans les coulisses du film qui a fait de Stallone une star. Alors évidemment, Stallone, qui a aidé la production en livrant moult anecdotes, est aussi représenté à l’écran et non, ce n’est pas toujours hyper convaincant. Morgan Spector, qui a la lourde tâche de jouer l’acteur, fait de son mieux mais il lui manque quelque chose. Ce n’est qu’un détail. Encore une fois, l’important relève de Chuck Wepner. De ce champion qui a inspiré Rocky, mais qui n’est pas Rocky. Wepner est certes très attachant et parfois drôle, mais il a aussi une part d’ombre que le métrage ne se prive pas d’illustrer, là encore en mettant en avant un sens de la mesure très appréciable. L’ascension, la chute et la rédemption, tout y passe, comme dans tout bon biopic qui se respecte. Mais avec une belle sincérité, un respect évident du sujet et du public et un gros supplément d’âme. L’ombre de Rocky plane mais ne rend pas l’histoire de Wepner redondante, bien au contraire. D’ailleurs, Outsider s’inspire bien plus de Requiem pour un Champion, de Ralph Nelson que de Rocky et c’est aussi Rocky qui suivit Wepner, puisant l’inspiration dans son incroyable parcours, une nouvelle fois dans Rocky 3, avec le combat boxeur contre catcheur (sans oublier la présence de James Brown avant le combat, repris par Sly dans Rocky 4). Quoi qu’il en soit, les trois films (Rocky, Outsider et Requiem pour un Champion) partagent dans tous les cas un point commun : ce ne sont pas des films sur la boxe mais sur des boxeurs auxquels la vie n’a pas fait de cadeau. On revient au mythe de celui qui a enfin sa chance. Finalement, le titre français est plutôt bien choisi. L’Outsider. Cette figure parfaite du cinéma, qui a donné lieu à des chefs-d’œuvre vibrant d’éloquence et qui se retrouve ici au centre d’un film funky, entraînant, tour à tour drôle et émouvant, jamais vain et ô combien passionnant. Chuck Wepner a toujours couru après une gloire qu’il n’a jamais vraiment obtenu. Aujourd’hui, il est enfin au centre d’un film. Et si il passera probablement un peu inaperçu, il n’en demeure pas moins excellent.

En Bref….
Outsider est un grand film parce qu’il a du cœur et qu’il raconte une histoire fascinante, de la bonne façon, avec des acteurs impeccables, et une foi qui lui interdit les excès et le hors-sujet. Complémentaire avec les Rocky, il gratte le vernis du rêve américain et s’attache à rendre justice à un champion décrié, un vrai, dont l’existence, si elle n’est pas aussi inspirante que celle de son alter-ego de Philadelphie, s’impose néanmoins sur un écran de cinéma avec une flamboyance exemplaire.

@ Gilles Rolland

Outsider-Chuck-Wepner
Crédits photos : Metropolitan FilmExport


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