Je trouve toujours ingrat d’émettre mes réserves à propos d’un livre qu’on m’a chaudement recommandé. Ce sera néanmoins le cas pour Il n’y a plus d’Amérique de Louis Caron. Un roman intéressant dont plusieurs aspects m’ont pourtant agacée.

L’histoire est prétexte à illustrer quelques-uns des maux qui rongent l’Amérique, cette violence qui s’exprime tout autant par les armes, que par le viol ou les faux mystiques. Le rêve américain est mort. Il n’y a plus d’Amérique.
Mais voilà! Je n’ai pas réussi à entrer dans ce roman, à y croire. Dès le départ, la figure de l’Indien, du Sage, m’a irritée. Trop parfait pour exister. Je ne me suis pas non plus attachée au personnage de Suzanne, comme si je n’arrivais pas à ressentir ses émotions, ses contradictions, sa vulnérabilité. Avant même la mort du fils, elle vit déjà dans les nuages. Hubert ne m’a pas non plus ému. On ne m’a pas convaincu de son amour inconditionnel pour sa femme. À aucun moment, avant le drame qui va les séparer, nous ne sommes témoins d’un moment de tendresse ou de complicité. Au contraire, dès les premières lignes, on découvre l’agacement du mari face aux croyances ésotériques de sa femme. Enfin, le coup d’éclat de la milice d’extrême droite ne m’a pas davantage fait frémir. En fait, mes émotions sont restées en marge d’un récit assez intéressant pour m’inciter à poursuivre sans jamais m’emporter. Peut-être, en fin de compte, le message était-il plus important pour l’auteur que les personnages eux-mêmes?
Le style de Louis Caron est pour le moins maîtrisé. Le poète qu’il est se remarque à chaque page. Trop peut-être? L’abondance d’images inusitées m’a quelquefois lassée.
Le Tahoe raya le silence et se retrouva, à la sortie du village, sur une route butant tous les cent mètres sur des bois sans fond. Des broussailles montraient les dents derrière chaque courbe. Le Tahoe gravit un escalier de collines.
Ceci étant dit, d’autres que moi ont pu se délecter de ce roman. Question de goûts, de ce qui nous branche.
Louis Caron, Il n’y a plus d’Amérique, Boréal, 2002, 426 pages