Magazine Culture

Anna Quindlen : La ferme des Miller

Par Stephanie Tranchant @plaisir_de_lire

La ferme des Miller d'Anna Quindlen   4,75/5 (18-06-2017)

La ferme des Miller (316 pages) est paru le 18 Mai 2017 dans la collection Le cercle des Editions Belfond (traduction : Silke Zimmermann).

3.jpg

 

L’histoire (éditeur) :

Petite fille précoce et curieuse, Mimi mène une enfance protégée dans la ferme familiale. Il y a là Bud, son père cultivateur et répare-tout ; Miriam, sa mère infirmière ; ses deux frères, le taiseux Eddie et le caïd séducteur Tommy ; ainsi que Ruth, sa tante, qui, pour une raison étrange, ne s'éloigne jamais de la maison. Un monde rassurant, fait d'éclats de rire et de joie, que Mimi pense immuable. Mais nous sommes en 1966 et ces jours heureux sont comptés...
La guerre du Vietnam qui laisse Tommy à jamais meurtri, la maladie qui frappe Bud, les drames passés de la tante Ruth... et cet impensable projet du gouvernement de transformer leur vallée en barrage. Ce monde que Mimi aime tant disparaîtrait englouti sous les eaux ? Qui désormais pour sauver la ferme et ses habitants ?
Alors qu'elle envisageait de quitter le village pour suivre des études de médecine et retrouver son amour d'enfance, Mimi va devoir faire un terrible choix.

Mon avis :

Avec ce joli roman familial, Anna Quindlen nous emmène  au milieu du XXème siècle pour suivre une héroïne-narratrice très attachante à laquelle on se noue dès les premières pages et qui nous livre son destin, celui de sa famille dans la ferme familiale (son père, sa mère et ses deux frère dont Tommy, le plus jeune, reviendra à tout jamais marqué par la guerre du Viet Nam et leur tante), de ses amis (LaRonda et Donald) et de sa vallée, la Miller’ Vallée où ses habitants sont depuis peu (et pour un long moment) poussés à quitter ces 2600 hectares de terrains et leur ferme afin que l’état puisse transformer les lieux en réservoir géant  (en utilisant le barrage) pour dévier le cours de la rivière.


A aujourd’hui presque 65 ans, elle revient sur sa vie et, depuis ses 11 ans, nous la voyons donc grandir, faire des choix, devenir une femme, subir des épreuves et tout en suivant son parcours et celui de ses proches, nous suivons le destin de ce village menacé d’inondation. Et ce n’est pas sans une certaine passion que je me suis prise d’affection pour cette jeune fille intelligente, d’une grande lucidité  et sensible qui m’a terriblement touchée par sa solitude et sa force de caractère. 

Mimi est un personnage courageux, réaliste et plein de respect.  L’auteure a très bien su mettre en avant la complexité de sa situation entre le besoin de s’émanciper (de se trouver et trouver se voie) et la nécessité de rester attachée à sa famille, d’être à l’écoute de leurs besoins, à la limite du sacrifice parfois. Car dans la Ferme des Miller il n’est pas que question  de Mimi. C'est, à mon sens, la famille (ses secrets, ses contradictions et ses désaccords) qui est au centre de ce roman.

Ruth notamment est un autre personnage important. Plus en retrait, elle n’en demeure pas moins essentielle. Elle laisse le lecteur avec un double sentiment entre agacement, irritation et tristesse, questionnements…  Elle vit depuis les 4 ans de Mimi dans la petite maison en face de la femme, en froid avec sa sœur (qui pourtant l’héberge), et n’a plus mis les pieds dehors depuis une éternité. Cette femme énigmatique, un peu mégère, apporte aussi bien une forme de légèreté au récit (grâce à ces scènes très visuelles des deux sœurs qui braillent d’une maison à l’autre et à leurs comportements excessifs) tout en enrichissant la trame narrative avec le mystère qu’elle garde jusqu’aux dernières pages…

Il y a dans ce texte une retenue et un coté pudique (aussi bien dans le profil que dans la narration, d’ailleurs) qui m’ont beaucoup touchée. Toute l’histoire et les destin de chacun sont transmis avec beaucoup de modération et de modestie. J’ai été conquise par l’écriture dont la simplicité fait la force. Aucun étalage, démonstration, ni description superflues, l’essentiel est conté avec l’émotion nécessaire à vous toucher et vous captiver sans jamais tomber dans le pathos et l’invraisemblable.

D’autre part, Anna Quindlen arrive en à peine 300 pages à raconter 50 ans d’une vie sans donner le sentiment de sauter des étapes et évidement sans aucun temps mort. On peut ainsi sauter deux ans de cette large période sans aucune sensation de vide ou d’incompréhension, car il y a ici une véritable maîtrise de la narration et une grande fluidité dans l’enchaînement des évènements. On dévore ce roman admirablement bien dosé.

Bref, je crois que je pourrais en parler pendant un bon moment parce qu’il y a tellement de belles choses à dire dessus. Vous l’aurez compris, La ferme des Miller est un roman à découvrir, un très beau texte, un récit passionnant avec une héroïne qu’on ne veut plus quitter.

4_o.jpg


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Stephanie Tranchant 5196 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines