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Histoire: John Bonhomme et le Temps retrouvé, chapitre 8

Par Ariane_

Flashback 7…
Des bougies, une alcôve de verdure sertie de mille flammes ondulantes. Pas un souffle, pas un geste, Marcel est là, assis dans ce cocon ovale entre deux âges. Devant lui, une table, une vingtaine de chandelles sur cette table, des mets en bataille, chacun précisément préparés le jour même. Car ce soir, Marcel sort le grand jeu.

Amadouer John, se rendre indispensable, montrer tout l’amour qu’il peut avoir pour le héros, qu’il soit feint ou véritable, et manger, manger jusqu’à plus faim, boire jusqu’à plus soif pour s’endormir, et distiller en John quelques lézards d’attente et de bon temps.
- Ah, cher Marcel, s’exclame d’ailleurs celui-ci, comme il fait bon de vous retrouver en cette paisible forêt ! Johanna garde la jument, et je suis tout à vous pour discuter des avancées de l’une de mes plus grandes quêtes ! Retrouver le temps, soupire John, il n’y a qu’à moi seul que l’on pouvait demander ça !
Marcel, quelque peu vexé, en oublie de se lever pour saluer son héros, mais John n’en a cure, et s’assied, fin prêt à déguster tout ce qu’il pourra, et même plus. Marcel n’a d’ailleurs pas besoin de donner le coup d’envoi : John s’attaque déjà au plat principal. Marcel regarde avec étonnement cet homme qui utilise sa main en guise de couteau et sa fourchette comme une cuiller à soupe. Quant à la sauce, elle passe invariablement des mains de John à sa bouche, lequel, bien trop concentré par son activité dinatoire, ne donne pas un regard à l’autre en face. Marcel, point affamé mais mis en appétit depuis le tôt matin, de par ses heures de préparation culinaire, se saisit de l’entrée qu’il commence à manger avec grande distinction.
- Ces noix de coquille saint jacques sont délicieuses, dit-il ébloui.
Il répète cela trois fois, attendant de la part de John une réponse qui vient enfin.
- Marcel, les haricots blancs à la tomate, il n’y a que ça de vrai, ajoute à ça du corned beef et tu feras de moi un homme heureux !
_ Ces endives braisées sont succulentes, ni trop amères, ni trop sucrées, continue Marcel tout à sa dégustation.
- Et avec ça une petite bière pour faire passer le tout, et je te jure Marcel que tu est prêt à tuer dix hommes !
- Je préfère pourtant le poisson à la vapeur relevé d’épices orientalo-européennes, susurre Marcel en posant délicatement une bouchée de dorade à la porte de son palais.
- Le corned beef, le corned beef ! Mon grand amour !
Marcel, le visage devenu rouge, les yeux étincelants, regarde John et s’exclame :
- John, tout ce repas dignement préparé n’avait qu’un but, vous déclarer ma flamme car je vous aime, mais désormais, à la lumière de ce dîner, je ne sais véritablement si je vous aime encore car vous êtes un bien piètre invité et je ne peux décemment pas m’engager avec un hommes aux habitudes telles que les vôtres. Et pourtant je vous aime, voyez comme je suis troublé, comme je vouvoie à nouveau, et laissez-moi fuir sans chercher à me retrouver.
John, qui en était à manger son entrée puisqu’il avait fini tous les autres plats, s’était enfin arrêté de manger quelques secondes et avait regardé son interlocuteur comme un hurluberlu professionnel. C’est ainsi que Marcel partit en courant, sans que John cherche à le rattraper, trop assujetti encore aux désirs de son estomac.
- Et le dessert ? s’étonne John, vous partez sans manger le dessert ?
« Tant mieux, après tout, je vais de ce pas manger ta part» dit-il, tout en se ruant sur le fondant de fraises au basilic pimenté laissé entier dans l'assiette nacrée, avec l’espoir que Johanna ne vienne pas l’interrompre et demander sa part.


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