Comment raconter ? « On ne peut pas le dire aux autres, on ne peut pas expliquer à ceux qui n’ont rien vu de cela - oui -, les grands tenders dans la nuit, les énormes bateaux d’acier, avec leur nom de vie de mort et de saga… leurs moteurs vrombissants, les treuils qui grincent, des hommes orange qui s’acharnent dans le vent, visages ruisselant sous le feu des lampes à sodium… » L’aventure de Lili, partie de Manosque-les-Plateaux pour changer de vie, partie pour pêcher dans des conditions extrêmes, femme dans un milieu d’hommes, confrontée aux mêmes difficultés : peindre un bateau, préparer les appâts, attraper les poissons, les vider en coupant au niveau des ouïes, en ouvrant le ventre. Tuer, oui. Manger parfois un coeur palpitant ou une poche d’oeufs. Risquer la mort. Et en vouloir encore. « Repeindre la ville en rouge », aussi. Whisky, vodka, bière. Parfois ne pas avoir où dormir, regarder les bateaux, le Rebel et les autres. Et embarquer pour 24 heures de pêche à la morue, au flétan, un poisson parfois aussi grand qu’elle. Dormir à même le pont. Et quand tout cela s’arrête, quand elle en veut encore un peu, pêcher le crabe par exemple, pour pouvoir partir jusqu’à la dernière frontière parce qu’elle n’a pas encore assez d’argent pour cela, voilà le grand marin, près duquel elle a pêché depuis les premiers jours, qui lui propose d’aller à Anchorage…