Qu’a écrit sur mon front la plume du destin,
quelle malédiction tracée d’un fin venin ?
J’ai interrogé les savants du monde et leur visage brun
mais aucun n’a su lire, aucun.
Mon front est un grave secret qu’à grand-peine je porte,
mes yeux en feu trahissent une âme qui n’est encore morte,
et mes mains démentes ramant dans la vie, remuant son écume
m’approchent d’un rivage, d’une brume.
Que voit-on là-bas qui point comme la nuit naît ?
C’est la mort qui scrute en toi et te reconnaît.
Elle essuie ton front et les lettres en efface,
et claque la porte, et vide la place.
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Emil Botta (1911-1977) – L’aurore me trouvera les bras croisés (Hochroth, Paris, 2013) – Traduit du roumain par Nicolas Cavaillès