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Kangni Alem : Les enfants du Bresil

Par Gangoueus @lareus
Il y a huit ans, Kangni Alem publiait son roman Esclaves. Un texte travaillé, fruit de plusieurs années de recherche  entre le Brésil, le Togo et le Bénin sur la trajectoire d’un aguda, un Afro-brésilien. Quand je parle d’afro-brésilien, je ne parle de cette population noire du Brésil mais des africains dont certains ancêtres ont été déportés au Brésil puis bannis pour avoir participé à des grands insurrections à Salvador de Bahia et à Récife. Je garde donc le souvenir de ce prêtre des cérémonies déporté qui, au Brésil, sera nommé Miguel...

Kangni Alem : Les enfants du Bresil

Source photo  Kangni Alem / Gangoueus


Les enfants du Brésil est une suite à ce premier volet. Kangni Alem reprend le sujet de nos jours. Santana est un aguda. Il travail pour l’UNESCO sur la question des épaves de négriers de par le monde et fournit aux chercheurs du monde entier des données pour une reconstitution plus précise de cette tragédie que fut la Traite négrière. Santana est invité au Brésil pour faire une présentation de ces travaux. Plusieurs interventions sont prévues à Rio de Janeiro, à Récife ou encore à Salvador de Bahia. Ces conférences sont souvent le fait d’acteurs afrocentristes et elles donnent droit à des joutes intéressantes. Il s’avère qu’elles ont un écho profond chez le narrateur qui progressivement livre, dans un texte qui n’est pas linéaire, son background, sa tendre en enfance à Ti-Brava.    
Ce retour dans le passé révèle un personnage singulier, une figure atypique, anti-conformiste, gardienne de la mémoire d’une communauté. Velasquez. Santana, se remémore l’enfance, l’apparition de ce personnage haut en couleur qui intervient alors que notre jeune adolescent allait défier dans le désert un jeune musulman, Djibril, qui se moquait de son embonpoint précoce. Velasquez va leur révéler qu’ils ont plus de choses en commun que de données qui les divisent…Les errements de Santana ne s’arrêtent pas seulement sur son enfance. Mais le conférencier est pris entre deux femmes, deux brésiliennes qui ont bien l’intention de lui mettre le grappin dessus…
Mon avis. Esclaves est un roman qui se terminait sur une aberration. Le constat terrifiant que des personnes qui ont réussi à s’extraire d’un système aussi barbare que l’esclavagisme au Brésil ont fini par le reproduire quand ils ont été renvoyés sur le continent africain. Le lecteur était en droit de s’attendre à un développement sur les mécanismes d’asservissement de l’autre dans un tel contexte. Kangni Alem nous prend à contre-pied de sujet. Il traite plus les questions existentielles de son personnage central. Certes, les déplacements vers Récife et Salvador de Bahia offrent une réflexion sur les rouages de la fabrication ou de la maintenance des croyances africaines dans ces régions. On observe avec attention le paternalisme de l’africano bien pensant qui regarde avec beaucoup de hauteur ces démarches. Il y a d’autres situations scabreuses ou savoureuses dans cette narration. 
Dans le fond, j’ai eu du mal à saisir la démarche de ce roman, ses renvois vers le passé, le raccourci de la relation entre Santana et Dalva et cette forme de détestation de soi des afrobrésiliens exprimée par la grand-mère qui ne comprend pas que son petit  fils Santana soit revenu à Ti-Brava avec sa brésilienne. Je suis donc plutôt réservé sur l’issue de la trame de ce roman. L’écriture de Kangni Alem est quant à elle enjouée, engageante, maîtrisée 
Kangni Alem, Les enfants du BrésilEditions FratMat et Graines de pensées, première parution en 2017

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