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Chosification

Publié le 27 septembre 2017 par Paulo Lobo
Chosification
Il se sentait terriblement coupable depuis qu’il avait compris qu'elle était l’objet de ses désirs.
- Il y a des choses qu'on ne peut pas dire, sinon vous êtes morts.
- Lesquelles par exemple ?
- Et bien justement, je ne peux pas le dire.Et il se tut, à tout jamais.Mais la curiosité est un bien vilain défaut. Pendant des années, elle chercha à percer le secret de son ami. Sans succès. A la fin, on l’interna dans un asile. « Qu’est-ce qu’il ne pouvait pas dire, qu’est-ce qu’il ne pouvait pas dire… » furent les derniers mots qu’on l’entendit susurrer avant de rendre l'âme.Moi, je vois plus loin que le bout de mon nez. Je ne me laisse pas embobiner ni par le passé ni par le futur.Pourquoi pourquoi pensez-vous qu'il y a autre chose que ce qui est immédiatement perceptible pourquoi pensez-vous qu'un futur est possible et imaginableVoyez les gens, chacun est différent et en même temps ils ont tous des choses en commun. Ils sont tristes ou joyeux, songeurs ou insouciants, c'est la lumière qui les fait danser.C’est la lumière qui les fait danser, mais c’est l’ambition qui les fait tomber..  Supprimez l’ambition, supprimez la curiosité, et vous obtenez des individus heureux. Des individus ou des robots ?Je regarde les êtres dans la rue et je me demande qui sont-ils où vont-ils d’où viennent-ils ? Je ne veux pas savoir la réponse, je préfère les imaginer, me raconter des histoires. Pourtant que la vie est belle, quand la brume est légère, tout semble possible, tout s'en va et tout s'en vient, naturellement, sans effort, sans violence.Ces choses qui ne devraient jamais changer et qui changent toujours. Je veux croire que tout est voyage, tout est mouvement, moi-même je suis un passager dans les transports en commun, j'ai acheté un billet et je veux bien vous le présenter, je suis je suis moi-même votre serviteur dévoué et je ne saurai que faire si vous m'affranchissez de mes chaînes. Il y a beaucoup trop de photographes dans l'espace public. Je pose la question puis-je vous prendre en photo. La réponse est non. Me voilà assimilé à une espèce de capteur d'image superficiel et sans intérêt. Je vous demande à quoi ça sert de prendre tellement de photos dans l'espace public, que vont devenir ces images je ne sais pas j'avoue que ça m'échappe j’avoue que ça me dépassenous sommes devenus des espions à la solde d'une multinationale des drôles de drones ambulants, saisissant au vol des bribes de trottoir, le coeur légerIl ne nous reste vraiment plus que cette solution : prendre les images à la sauvette, sans demander l'autorisation, si nous sommes vraiment convaincus que ça servira à quelque chose, on les prend, l'image publique est à nous, nos yeux sont à nous. Qui dictera notre regardVous regardez tout ce qui vous entoure, vous êtes attentif aux êtres et aux choses, vous essayez de comprendre ce qui se cache derrière les façades derrière les apparences, vous êtes un témoin du temps qui court. Même si je pense qu'il faudra recommencer, peu importe le sentiment peu importe la vie peut importent les gens, ce qui compte c'est la vérité du moment.Je pense qu'il faut se laisser couler dans le cadre, si vous l'abordez avec appréhension, si vous êtes pressé et angoissé, ça ne va pas marcher. Les passants doivent sentir que vous faites partie de la rue, que votre attitude est innocente et ingénue, il faut les regarder dans les yeux et être honnête. Je dirais que c'est plus un exercice de respiration et de relaxation qu'une expérience technique.  D’abord il convient de prendre conscience de votre propre état d'esprit. Ensuite il faut être sensible aux vibrations qui émanent de la rue, comme si vous étiez un oiseau volant dans l'air, goûtez la lumière, entendez les bruits, ne réfléchissez pas trop, cliquez à l'instinct. Un jour ou une nuit ces images seront un morceau retrouvé de votre passé. Vous serez content de les contempler quand tout sera enfoui sous le poids des années - ce sera votre petite victoire votre petite madeleine, un lambeau précieux qui ne sera qu'à vous et à personne d'autre. vous vous direz je ne suis qu'une ombre passagère peu importe le reste importe peu importe peu importe peu importe un jour petit à petit les choses s'assembleront de nouveauLaissez filer l'étoile tout en en gardant le souvenirLa vie dans toute sa générosité vous accueillera les bras ouverts est-ce que vous êtes bien dans votre peau dans votre corps dans votre corps corps ?C'est la gare - retour à la case départ. Les aiguilles de la montre tournent dans un cercle infini qui se mord la queue. Mais au-delà de ce mouvement infatigable et perpétuel, je note quelque chose de très subtil qui se modifie par petits bouts, on voit apparaître les fissures et les craquements,  D'abord le changement est imperceptible à l’oeil nu, puis soudain on ne voit plus que lui
Et la maison décrépie s’en va en pleurant à l’abattoir

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