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Louise en hiver (2016), Jean-François Laguionie

Par Losttheater
Louise en hiver (2016), Jean-François Laguionie

Quand la projection de Louise en hiver démarre, il y a quelque chose qui marque immédiatement. Les grains du papier sur lequel Jean-François Laguionie a dessiné apparaissent sur l’écran de cinéma. Telle une toile, les couleurs jaillissent, l’animation prend vie et la poésie déborde. Tout a été dessiné à l’ancienne, avec gouache et crayons de couleur. L’artisanat du film éclate à chaque instant et sert tout le propos de l’histoire.

Louise est retraitée, elle passe ses vacances chaque année dans la station balnéaire imaginaire de Biligen-sur-mer. Arrive la fin de l’été, et lorsqu’elle s’en va rejoindre la ville, Louise loupe son train et se retrouve bloquée, seule dans sa petite maison bleue alors qu’une tempête approche. Lorsque le temps redevient clément, Louise prend la décision d’aller habiter la plage en construisant elle-même une petite cabane en bois avec tout le confort nécessaire. Alors, elle profite de toutes les ressources de la ville pour mener sa vie tranquillement.

Louise en hiver (2016), Jean-François Laguionie

Bien sûr, on pense instantanément à Robinson Crusoé en regardant Louise en hiver. Cependant, la référence principale de Jean-François Laguionie s’oriente plus vers En attendant Godot de Samuel Beckett. Louise attend, elle attend qu’on vienne la chercher, mais personne ne vient. Dans un huis clos sableux, le réalisateur nous invite à un voyage sur le temps qui passe, la solitude et la vieillesse. Bien qu’il ait été initialement prévu de tourner le film en prises de vue réelles, l’animation permet à Laguionie de libérer son film de toutes les frontières du genre. Louise en hiver n’est pas seulement un conte, mais contient aussi des teintes de fantastique et d’onirisme qu’il aurait été difficile d’appréhender dans un film classique.

Louise en hiver parsème son récit de flashbacks sur l’enfance de l’héroïne. Les traits de la vieille dame laissent place au visage doux et innocent de sa jeunesse qui vient nourrir le monologue présent. Ces éléments ne laissent aucune place à la mélancolie, mais plutôt à une vie vécue, à un sentiment de plénitude. Il n’est pas question pour Laguionie de nous présenter la vieillesse comme une sentence. C’est tout le contraire dont nous sommes témoins ici. Louise est sereine avec elle-même, et les flashbacks ne sont qu’une preuve qu’elle a vécue heureuse, même encore maintenant lorsqu’elle se retrouve seule et isolée du monde.

Louise en hiver (2016), Jean-François Laguionie

Louise en hiver est court, 75 minutes à peine mais suffit à atteindre toutes ses volontés. Le rythme prend à contre-pied les attentes du spectateur soutenu par des plans parfois contemplatifs. Jean-François Laguionie met en scène son animation comme une peinture mouvante dans laquelle son personnage peut laisser échapper toutes ses pensées. Les souvenirs assaillissent Louise et abreuvent le récit d’une mémoire du passé qui résonne avec les événements présent. Seule avec elle-même, elle n’a pas d’autres choix que d’affronter les peines, les peurs et les joies qui ont jonchées son enfance et son adolescence. Ces souvenirs sont magnifiquement révélés par la voix de Dominique Frot, qui double Louise. La voix, fragile et forte à la fois, dévoile avec habilité et sensibilité les états d’âme du personnage.

Louise en hiver est une belle ode à la vie. Œuvre personnelle dans laquelle Jean-François Laguionie s’est inspiré de ses propres souvenirs de vacances, entouré de sa mère et de sa tante, pour donner vie à Louise et son aventure loin des tumultes de la société. Un film paisible, à l’animation subtile et magnifique, dans lequel on resterait bien plus longtemps, bercé par le va et vient des vagues.

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