Partager la publication "[Critique] JUSTICE LEAGUE"
Titre original : Justice League
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Zack Snyder
Distribution : Ben Affleck, Gal Gadot, Jason Momoa, Ezra Miller, Ray Fisher, Henry Cavill, Amy Adams, Jeremy Irons, Diane Lane, Connie Nielsen, J.K. Simmons, Amber Heard, Joe Morton, Ciarán Hinds…
Genre : Science-Fiction/Fantastique/Action/Suite/Saga/Adaptation
Date de sortie : 15 novembre 2017
Le Pitch :
Alors que le monde peine à se remettre de la mort de Superman, sombrant peu à peu dans le chaos, Batman et Wonder Woman doivent faire face à une nouvelle menace d’envergure. Confrontés à ce nouvel antagoniste, les deux super-héros décident de recruter une équipe afin de former une ligue qui sera de taille et qui pourra espèrer sauver l’espèce humaine et la planète toute entière…
La Critique de Justice League :
Le voilà le vaisseau amiral de Warner/DC Comics ! Le blockbuster qui se rêve en parfait concurrent des Avengers de Marvel et qui pourtant, dut composer avec de multiples problèmes de production qui ont mis en péril son intégrité et sa capacité à effectivement enfin consolider les bases du DC Universe. Les choses avaient déjà plutôt mal débuté pour Justice League dont le principal défi était de parvenir à se construire après l’accueil plutôt tiède réservé au très foutraque et parfois ridicule Batman v. Superman. Cela dit, entre temps, la flamboyante Wonder Woman est passée par là, redorant le blason de la franchise à grands coups fouets mais aussi d’un idéalisme rafraîchissant et pour le coup parfaitement pertinent par rapport au matériau de base. Un énorme succès qui n’a néanmoins pas suffi à redonner totalement confiance en Justice League. Surtout que Suicide Squad aussi est passé par là. Un désastre total ayant lui aussi mis en évidence les failles potentiellement fatales qui fragilisaient l’édifice pourtant ambitieux qu’est le DC Universe.
Le départ de Zack Snyder, après une tragédie personnelle, alors que le tournage n’était pas terminé et l’arrivée précipitée de Joss Whedon sur Justice League ayant encore plus semé le doute quant à la tournure qu’allait au final prendre cette œuvre décidément compliquée à mettre en place…
Mais Justice League a finalement réussi à se frayer un chemin jusque dans les salles obscures. Le film est là, il est terminé et force est malheureusement de reconnaître que les multiples obstacles qu’il dut franchir pour en arriver là sont visibles, non pas dans chaque plan, mais pas loin non plus…
Une petite photo d’Amber qu’on ne voit que 3 minutes dans le film.
L’Agence tous risques…
La première apparition de Batman est symptomatique d’à peu près tout ce qui cloche dans la démarche de Zack Snyder. Ce qui avait déjà du mal à passer dans Batman v. Superman. On voit le Dark Knight faire face à un type dont on ne sait pas trop d’où il sort (incarné par le sous-estimé Holt McCallany de Mindhunter), puis se fritter l’instant d’après avec une créature mi-vampire zarbi, mi_mouche. Le tout dans des décors fabriqués de toutes pièces en post-production, comme dans 300 ou dans Sin City. À l’écran, le résultat n’a rien de vraiment très beau. C’est sombre et artificiel (ce que la 3D n’arrange pas). Wonder Woman elle, sauve des personnes d’une prise d’otages. Pourquoi ? Pourquoi pas… Reste que comme d’habitude, c’est elle qui s’en sort le mieux. Puis vient le tour des nouveaux que sont Flash, Cyborg et Aquaman. Des recrues qui ont droit à leur petite introduction, donc le point commun est d’être emballée par-dessus la jambe par un scénario qui a manifestement hâte de ne pas trop s’attarder sur les préliminaires. Le script d’ailleurs passe son temps à étrangement se focaliser sur des trucs pas vraiment importants et à bâcler des éléments de narration primordiaux. Les ellipses se sont pas trop mal gérées et la rythmique étrangement soutenue pour un film de 2 heures mais sinon, tout le reste va de travers. Que ce soit les relations entre les personnages (le summum étant atteint quand se profile le climax, comme dans Batman v. Superman), les enjeux qui manquent cruellement d’ampleur et de cohérence ou encore l’importance donnée aux personnages secondaires. Mais peut-on vraiment s’étonner de voir que le commissaire Gordon (J.K. Simmons), Mera, la compagne d’Aquaman (Amber Heard), Lois Lane (Amy Adams), Henry Allen (Billy Crudup), le père de Flash, toutes les amazones (à commencer par Connie Nielsen), Alfred (toujours incarné par Jeremy Irons) et Martha Kent (Diane Lane) ne fassent office que de faire-valoir dont le rôle consiste à passer une tête de temps en temps pour visiblement donner du corps et du liant à un univers qui en manque fatalement ?
Du côté des héros, sans surprise, c’est Wonder Woman qui s’en tire donc le mieux, encore une fois, grâce à la performance sans faille de Gal Gadot. Ben Affleck fait ce qu’il peut en leader mais le script ne lui permet pas de s’envoler comme prévu. Un peu comme Aquaman, pourtant parfaitement campé par un Jason Momoa massif et charismatique en diable, pour Cyborg, lui aussi porté par un Ray Fisher concerné et pour Flash, le comique de service qui ne sert pas à grand-chose si ce n’est à offrir à Ezra Miller un rôle à contre-emploi, loin des films torturés auxquels il est habitué. Des acteurs qui font ce qu’ils peuvent dans un océan numérique mal fagoté, face à un bad guy sans envergure, entièrement constitué d’images de synthèse d’un autre âge, très loin des exploits en performance capture de La Planète des Singes, pour citer l’exemple le plus flagrant de réussite en la matière.
Et oui… À nouveau le méchant fait défaut. Ici, il déboule d’on ne sait où, ses objectifs sont ultra bateau, ses réactions super téléphonées et sa sortie, comme son entrée, bâclée par un réalisateur qui semble davantage s’intéresser à filmer les entrechats de ses super-héros plutôt que de leur donner une opposition consistante pour justifier leur réunion.
L’équipée pas si sauvage
Zack Snyder dut donc laisser la barre à Joss Whedon (même si il n’est pas crédité au générique). Pourtant, c’est bien le style Snyder qui l’emporte. Quoi qu’ait fait Whedon, il a respecté le cahier des charges si ce n’est qu’il est tentant de lui accorder le crédit de l’humour plus omniprésent que dans Batman v. Superman ou que dans n’importe quel autre long-métrage du DC Universe. Alors que la menace qu’affrontent Batman et ses potes met tout de même en péril la terre entière, les blagues fusent, souvent de la bouche de ce boute-en-train de Flash, et chaque fois où presque, elles tombent à plat. D’un côté Snyder iconise à mort ses héros, en réussissant particulièrement bien dans le cas d’Aquaman, mais d’un autre, c’est un peu la fête à la saucisse et jamais la tension n’est véritablement palpable. Un changement de ton un peu trop brusque pour être convainquant donc…
Il y a aussi cette impression bizarre qui perdure… Comment ignorer qu’au fond, et ce sans dévoiler les tenants et les aboutissants de l’intrigue, aussi mince soit-elle, la réunion de la Justice League n’est jamais vraiment justifiée quand il semble évident qu’un seul de ses membres aurait pu faire le job en 5 minutes chrono comme la fin nous le souligne sans s’en cacher ? Aussi beaux soient-ils, dans leurs costumes flambants neufs, presque tous les membres de cette équipe bariolée n’ont un rôle que relativement anecdotique. Et ça aussi c’est un problème… Dans Avengers au moins, le travail d’équipe était réel. Pas ici… Ce qui n’est évidemment pas le cas dans le comics où l’équilibre est beaucoup mieux géré. Mais nous ne sommes pas devant une BD. Nous sommes en face d’un gros film plein d’argent, qui a subi de nombreux bouleversements et qui nous parvient après un parcours du combattant qui a laissé ses marques.
Pas désagréable en soi, Justice League souffre de trop de défauts pour réparer les erreurs de Batman v. Superman. Il possède heureusement des qualités, mais elles ne sont pas suffisantes pour lui permettre de s’imposer comme un challenger crédible face aux champions de la concurrence que sont par exemple le premier Avengers et surtout les deux Gardiens de la Galaxie. Visuellement criard, ressemblant trop souvent à une très longue cinématique Playstation 4, brouillon dans l’écriture, certes incarné par des acteurs qui y croient à font et qui tirent ensemble le show vers le haut et globalement divertissant et jamais vraiment ennuyeux, Justice League est tout bonnement un film malade. Un peu boiteux, jamais aussi cool qu’il semble le penser, ni aussi spectaculaire qu’espéré, malgré l’orgie numérique que Snyder et Whedon ont concoctée. Reste que parfois il sait se montrer attachant et encourage à une certaine indulgence…
En Bref…
Justice League prouve une nouvelle fois, après le très brouillon Batman v. Superman, que le plan de conquête de DC Comics et de Warner est des plus chaotiques. Écrit à la va-vite, certes impressionnant, mais finalement pas tant que cela, noyé dans des images numériques omniprésentes et pas toujours du meilleur goût, traversé de vannes rarement drôles, ce film se traîne péniblement tout du long. Heureusement, les acteurs se montrent tous à la hauteur, quelques scènes possèdent une certaine prestance, et malgré tout, la totalité du spectacle dégage de la bienveillance et une générosité indéniable. C’est d’ailleurs ce qui sauve Justice League du naufrage… Dans ces conditions, et malgré la scène post-générique plutôt alléchante, difficile d’affirmer qu’on attend avec impatience la suite…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Warner Bros. France