Quand le chef n’est pas là, les souris et les plats ne dansent pas…
Voilà donc le sémillant Juan Arbelaez devenu en quelques articles de magazines principalement féminins la coqueluche de ces dames. Normal, il est vivant, presque exubérant, souriant, nature, belle gueule un peu typée hidalgo des mers du sud, colombien ce qui fait rêver car personne n’a jamais été en Colombie, et bon cuisinier de surcroit.
Le risque est toujours le même : surexposition, il dit oui à tout ce qui passe, parraine un fromage industriel, participe à des évènements souvent sans grand intérêt, prend une participation ou un partenariat dans des restaurants, et vient de changer la configuration de son flagship restaurant de l’hôtel Marignan. C’est du boulot…
Le Limon remplace Nubé. Simple changement d’espace puisque la salle à manger est abandonnée au profit de l’ancien bar de l’hôtel. On y gagne en espace plus gérable, en intimité (le lieu est assez sombre), et le placement de certaines tables hautes ou basses dans des petits corners est fort agréable. Accueil et service motivé et pro.
La carte n’a pas fondamentalement changé et demeure bien fournie avec un menu du jour qui donne le choix entre deux entrées et un plat. On retrouve avec plaisir ce style du chef qui marie hardiment et subtilement ses origines et sa maitrise de l’esprit français. Il s’est récemment acoquiné avec Bachès, sorte de guru des agrumes, pour jouer dans sa cuisine sur tous ces parfums et toutes ces saveurs acides et acidulées.
On les retrouve dans des vinaigrettes au citron de Menton, du lime avec un ceviche, du citron vert avec le poulpe, et du piment d’Espelette en veux-tu en voilà.
En entrée du jour, des Saint-Jacques « brulées ». Ce mot excessif ne cache rien d’autre que des noix passées au brûloir à cru, servies dans un bol de jus pour le moins fade et sans relief.
L’œuf parfait est plus que parfait car totalement sous-cuit, le jaune baignant dans le blanc glaireux, le tout posé sur une purée de shitake hyper salée, et un peu de pecorino. Un plat moins que parfait.
Le cobia est un poisson du Pacifique qui a le mérite de n’être pas très connu sous nos cieux et donc destiné à étonner et à satisfaire le désir de découverte exotique du parisien moyen. Le chef le sert en ceviche, parfumé au lime et au Leche del tigre, ce jus du ceviche devenu un plat à part entière au Pérou. Si le poisson ne laisse pas un souvenir impérissable, le ceviche est particulièrement réussi et fort goûteux. Une entrée pleine de fraicheur revigorante et qui vous donne une force… de tigre.
L’Argentine arrive sur la table sous forme d’une magnifique Entrecôte, d’excellente qualité, à la cuisson demandée parfaite, à la saveur exceptionnelle, et d’une tendreté à toute épreuve. Elle est agrémentée façon argentine par un chimichurry, ce condiment à base de piment utilisé largement en Amérique du sud.
Le Lieu jaune est cuit vapeur, arrive en légèreté, savoureux, mais un peu perdu, comme nous, dans un accompagnement disparate qui va d’un onctueux de courge à des oignons grillés, en passant par des choux de Bruxelles « brûlés » comme le veut la mode du moment, et de l’orange.
Desserts soignés, dont un Cheesecake aux agrumes et crumble, très bien réalisé, propre sur lui, doux, délicat et délicieux.
Le Vacherin Mandarina (très puissante et acide) est parfumé au basilic et à la vanille. Bien sous tous rapports.
Le chef, ce jour-là, était absent. C’est lui faire grand compliment de lui dire que quand le chef n’est pas là les souris et les plats ne dansent pas. Il manque la pâte, le style, et surtout le pep’s que Juan Arbelaez sait donner à ses plats. Le bancal et l’approximation ne sont pas son fort. On attend son retour et mieux vaut s’assurer qu’il est bien là au milieu de toutes ses activités annexes.
12, 14, rue de Marignan75008 Paris
Tél : 01 40 76 34 56
www.hotelmarignanelyseesparis.com
M° Franklin Roosevelt
Voiturier
Ouvert tous les jours
Menu (hors week end) : 39 € (2 plats)
Carte : 60 € environ