Et quand tu écriras, ne regarde pas ce que tu écris, pense au soleil
qui brûle sans voir et lèche le Monde d’une eau
de saphir pour que l’être
soit et que nous dormions dans l’émerveillement
sans lequel il n’y a pas de planche de salut, il n’y a pas de pensée
ni de fascination pour les jeunes filles
en fleur depuis l’antiquité des orchidées d’où
advinrent les syllabes qui en savent plus que la musique, plus,
beaucoup
plus que l’enfantement.
*
Las sílabas
Y cuando escribas no mires lo que escribas, piensa en el sol
que arde y no ve y lame el Mundo con un agua
de zafiro para que el ser
sea y durmamos en el asombro
sin el cual no hay tabla donde fluir, no hay pensamiento
ni encantamiento de muchachas
frescas desde la antigüedad de las orquídeas de donde
vinieron las sílabas que saben más que la música, más, mucho
más que el parto.
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Gonzalo Rojas (1917-2011) – Nous sommes un autre soleil (Orphée/La Différence, 2013) – Traduit de l’espagnol (Chili) par Fabienne Bradu.