Magazine Culture

La passe-miroir (1) Les fiancés de l’hiver

Par Ellettres @Ellettres

La passe-miroir (1) Les fiancés de l’hiver« Bientôt, quand les hématomes se seraient résorbés, quand la griffure de Freyja se serait transformée en cicatrice sur la joue, Ophélie retrouverait un visage familier. Mais son regard, lui, ne redeviendrait jamais comme avant. À force de voir des illusions, il avait perdu les siennes et c’était très bien comme ça. Quand les illusions disparaissent, seule demeure la vérité. » (P. 517).

La froidure hivernale se prête à vous parler d’un roman jeunesse qui fait fureur chez les pré-ados de 11 à 77 ans, j’ai nommé le « Livre un » (il y en a trois actuellement) de la « Passe-Miroir » de Christelle Dabos, intitulé « Les fiancés de l’hiver ». Ce premier tome conte l’histoire d’Ophélie, une jeune fille ayant pour particularité de : 1/ traverser les miroirs ; 2/ « lire » les objets avec ses doigts pour connaître leur passé ; 3/ être très maladroite, timide, petite, peu soucieuse de son apparence et propriétaire d’une écharpe capricieuse.

L’univers dans lequel elle vit est composé de diverses arches flottant dans le vide, comme des pièces détachées d’un globe originel dont Ophélie rêve parfois. Originaire de l’arche d’Anima, elle est promise en mariage à un homme important du Pôle. Leurs premiers rapports sont aussi chaleureux que les températures négatives qui règnent dans l’arche de Thorn, le promis d’Ophélie, un géant vêtu de peaux de bête, au visage taillé à coups de serpe. C’est donc mal parti pour les fiancés de l’hiver, mais nous autres lecteurs sommes déjà appâtés par ce couple si mal assorti, qui n’est pas sans ressembler à une certaine Lizzie Bennett et un certain Mr Darcy (merci Lili, ma co-lectrice, de m’y avoir fait penser !).

Cet homme taciturne l’embarque donc dans un dirigeable, et voilà notre Passe-miroir catapultée dans ce nid de vipères qu’est la cour évoluant à la Citacielle, une citadelle flottant au-dessus du Pôle (et dont la représentation en couverture flatte l’imaginaire). Il est clair qu’aucun membre des riches clans nobles ne souhaitent ce mariage, pour des raisons qui restent obscures, et les chausses trappes guettant Ophélie durant ses fiançailles sont si nombreux qu’elle est obligée de se cacher et d’user des illusions présentes en masse dans la Citacielle.

Pour tout vous dire, ce livre et moi étions partis sur de mauvaises bases. J’ai peu l’habitude de lire de la fantasy, me méfiant des apprentis auteurs qui se greffent sur un filon très vendeur à l’heure actuelle. Mais au-delà du genre, les 50 premières pages m’ont semblé caricaturales et téléphonées. Quoi de plus « déjà vu » (et pour cause) et de plus nunuche que cette petite sainte-nitouche qui coche les cases « binoclarde » + « surdouée », et qui refuse un beau parti dont se sont embéguinées ses idiotes de mère et de soeur ? Ben voyons.

Oui mais. Il y a l’art et la manière. Dès le départ d’Ophélie pour la Citacielle j’ai dévoré d’un coup les 500 pages suivantes. La magie avait opéré : un mélange entre l’esthétique « Belle Époque » du monde de la Passe-miroir et de son ancrage spatial très attrayant, du style impeccable de l’auteur, de son humour semé d’euphémismes, et des savants rebondissements de l’intrigue. Ophélie a tout de l’anti-héros dont on fait les vrais héros : courageuse, fine, intègre et pleine de ressources insoupçonnées. Cela nous a un côté roman d’apprentissage ma foi bien plaisant ; Christelle Dabos pour sa part est un vrai écrivain qui a bel et bien dépassé le stade de l’apprentissage.

La Passe-Miroir a donc gagné une adepte de plus, deux même, si je puis m’avancer pour ma copinette Lili qui l’a lu en même temps que moi et en parle ici.

« La Passe-Miroir, livre I. Les fiancés de l’hiver » de Christelle Dabos, Gallimard Jeunesse, 2013, 528 p.

Publicités &b; &b;

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Ellettres 586 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines