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Mythique

Publié le 23 février 2018 par Le Journal De Personne

Chaque mot que je prononce correspond à quelque chose qui a eu lieu dans le temps ou hors du temps. Chaque mot comprend, qu'on le sache ou non, un récit fabuleux. Il y a vraiment de quoi nous donner le vertige ; c'est vertigineux...

Les anciens avaient deux visions pour chaque mot :

Une vision logique : le logos ; et une vision mythique: le muthos.

La première est totalitaire, elle veut embrasser toutes choses.

Et la seconde exemplaire : elle voit toutes choses déjà enlacées et en train de s'embrasser les unes les autres. C'est embarrassant !

Mais notre esprit ne peut se satisfaire ou être pleinement satisfait que lorsqu'il accorde ou raccorde les deux valeurs de chaque mot : sa valeur logique et sa valeur mythique ; que si, et seulement si, il réconcilie en lui, sa volonté totalitaire et sa volonté exemplaire.

Depuis la nuit des temps, la science progresse en associant les deux à son process : le muthos et le logos... la Fable de la Raison et la Raison de la Fable.

Par exemple, la Raison qui raconte que le monde est né de la larme d'un Dieu et la Raison qui se demande pourquoi il a pleuré tout en essuyant cette larme sans lieu.

L'air serait un mot en l'air...

L'eau, un mot qui prend l'eau

Le feu, un mot qui met le feu

La terre, un mot qu'on enterre

Le logos ne serait rien sans ce muthos,

Un vide bien rempli où l'on ne distingue plus entre vivre et raconter.

Tout compte fait, on ne peut rien comprendre à rien, si on ne tient pas compte de cette puissance de symboliser, de mettre nos fables sur la table et de les examiner à la loupe.

Et on en est tous là, à chercher dans chaque chose visée, ce qui relève de la Raison (logique) et ce qui relève de la Raison (mythique) ;

Et dans chaque vision, nous avons toujours du mal à distinguer entre le mot histoire et l'histoire de ce mot.

Je prends au mot un certain Descartes, qui s'est payé le luxe de douter de tout jusqu'à douter de lui-même en train de douter, en se disant : suis-je en train de rêver ?

Et si tout ce qu'on appelle réalité, n'est qu'un rêve éveillé ? Et s'il n'y avait pour chaque mot aucune chose reliée... aucune réalité avérée ?

Que toute parole n'était que le fantasme d'un parolier ?

Parole dévoilée ( logos ) ou Parole voilée (muthos) ?

On appelle philosophie, toute activité de dévoilement, ce passage obligé et désobligeant de la parole voilée à la parole dévoilée.

Il n'y a pas plus redoutable que d'arracher le voile de tout ce qui est, pour révéler le vrai...

Le vrai visage du monde... c'est même très désagréable de faire sortir du rêve, de réveiller quelqu'un de son doux sommeil... et de lui dire : "Réveille-toi ! Nous sommes arrivés !" Alors qu'il croit que nous ne sommes même pas partis.

Mais nous sommes tellement inconstants, tellement inconsistants, que nous n'avons qu'une envie : reprendre le rêve de celui qui croit qu'il ne rêve pas, qu'il vit sa vie, ses songes sans mensonges.


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