Copie conforme
Ce matin
ta peau est
la copie conforme
de mes projets
Ce poème est le premier du recueil de poèmes de Guillaume Siaudeau, poète au jour le jour sur son blog et auteur de trois romans (j’en ai lu deux : Tarte aux pommes et fin du monde et La dictature des ronces). Le recueil s’appelle Inauguration de l’ennui. Un titre paradoxal mais pas si étonnant que cela, après tout : si certaines choses n’ont pas droit de cité, pour Guillaume Siaudeau, elles ont toutes droit de poésie. Les petites et grandes choses du quotidien, les thèmes nobles comme l’amour (dans ce joli premier poème) et ceux pas toujours très jolis comme l’ennui, l’envie, l(imperfection, le désespoir parfois… Et comme tout a droit de poésie, on se prend à regarder autrement cs défauts du quotidien, à les regarder avec tendresse.
Ne pas désespérer
L’envie semble
s’être barrée
tellement loin et
si longtemps
Peut-être
qu’elle reviendra trilingue
Certains poèmes racontent de petites histoires épurées :
Après des années
La vieille bicoque est
toujours debout
Les mauvaises herbes
ont repoussé
Les nouveaux locataires
aiment le bois et
les charognes
Quelques souvenirs
sont accrochés
aux branches
L’un d’eux tombe
à point
Parfois au détour d’une page, une perle vous saute à la figure :
Floc
C’est la goutte
de rosée
qui fait déborder
le jour
Attention aux petites choses, goût du détail et sens de l’image, écriture épurée, minimaliste, tendresse au quotidien : autant de raisons pour picorer régulièrement ces petits poèmes délicieux.
Guillaume SIAUDEAU, Inauguration de l’ennui, Alma éditeur, 2018
Sur le site de l’éditeur, Guillaume Siaudeau parle de la poésie et ça donne envie !
« La poésie est partout. Elle ne se cache pas. Je pense qu’elle se cueille plutôt comme un fruit. Elle ne connaît ni rareté, ni pénurie. Elle est accessible à tous, il n’y a qu’à se servir. Vous seriez étonnés de voir jusqu’où on peut la trouver. Jusque dans quels recoins paumés. Elle ne se cache pas, mais ne s’expose pas non plus. Il suffit d’ouvrir l’oeil, mais le bon. Chacun de nous est poète. Qu’il le veuille ou non. Certains poètes écrivent, d’autres chantent, d’autres encore bricolent des bagnoles ou font du canevas. Contrairement aux idées reçues, la poésie ne s’apprend pas à l’école. Elle n’est pas forcément en rimes, et écrite par des vieux Monsieurs avec des barbes blanches (même si ça peut arriver). Elle ne s’écrit pas forcément à la plume d’oie. J’ai lu des poèmes majeurs écrits au couteau sur des troncs d’arbre. Elle reste tellement mal connue qu’il est plus facile de dire ce qu’elle n’est pas. Tout ça n’engage que moi, bien sûr. Elle n’est pas où on l’attend. Elle n’en fait pas des caisses. Elle ne se maquille pas. Elle n’a pas la peau lisse. Elle ne préfère pas forcément y aller à pied plutôt qu’en voiture. Elle ne se rend pas. Elle ne mord pas toujours. Parfois. Elle ne pique pas toujours. Parfois. Faites attention quand même. »L’avis d’Aifelle