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Mon Ami Dahmer (2017), Marc Meyers

Par Losttheater
Mon Ami Dahmer réalisé par Marc Meyers

Réputé pour être l’un des tueurs en série les plus célèbres des Etats-Unis, Jeffrey Dahmer menait une vie lycéenne singulière avant de commettre son premier crime. Des faits relatés par son ex-ami, Derf Backderf, dans un roman graphique intitulé Mon Ami Dahmer. L’auteur s’appuie donc sur sa relation avec le jeune Jeffrey lors de leurs années lycée, et le moins que l’on puisse dire c’est que Jeffrey faisait déjà froid dans le dos à l’époque. Une BD sombre, glaçante, mais qui au final apporte un regard pertinent sur ce jeune homme esseulé qui cache un mal-être et un désarroi total face à l’humanité. Longtemps plébiscitée, la BD trouve enfin les honneurs d’une adaptation au cinéma grâce au réalisateur Marc Meyers.

Dans les années 70, dans une petite ville située dans l’Ohio, Derf Backderf fait la connaissance de Jeffrey Dahmer. Ce dernier vit avec son petit-frère et ses parents au bord du divorce. Troublé par l’absence d’un cadre parental, le jeune homme adopte un comportement de plus en plus étrange. Il ramasse des cadavres d’animaux morts pour les dissoudre ensuite dans sa cabane, puis passe son temps à scruter un jogger qui passe devant chez lui. La solitude est pesante, même jusqu’au lycée où il est considéré comme un paria hormis par une poignée d’élèves qui profitent plus de ses attitudes décalées que de son amitié.

Aux origines du mal. Période charnière de la vie qui modèle notre personnalité et notre rapport au monde, Marc Meyers s’intéresse à ce qui forge ou non l’adolescence de Jeffrey Dahmer. A travers une esthétique froide, limite aseptisée, la mise en scène enferme le jeune homme dans un milieu étriqué pour renforcer sa solitude. Entre une mère folle et droguée aux médocs, un père qui se noie dans le travail pour éviter sa femme, et un petit frère effacé, Jeffrey n’a pas d’autre solution que d’affronter le monde seul. Une succession de scènes vient nous présenter l’environnement du garçon jusqu’à dévoiler l’horreur au fond du jardin. Les cadavres d’animaux s’étalent dans des bocaux exposés sur de vieilles planches de bois. Le film entier sera alors fait de ruptures de ton où loin du tumulte de la population, le jeune Dahmer se renferme peu à peu sur lui-même. Le film montre à plusieurs reprises, dans des plans très larges, le garçon isolé dans un monde sectaire qui n’a aucune place à lui offrir. Ou alors, c’est le monde qui ne veut pas de lui. Souligné dans la BD de Backderf, Meyers pointe du doigt l’absence d’entourage adulte, que ce soit ses professeurs ou ses parents. Le cadre n’existe pas pour Jeffrey Dahmer. Il est un électron libre qui se permet de n’en faire qu’à sa tête. Ses seuls « amis » se prendront de sympathie pour lui car il amuse la galerie en imitant des handicapés mentaux. Bien que l’ambiance ait du mal à retranscrire parfaitement le malaise mental qui ronge Dahmer, Meyers questionne sa place dans la société. Est-elle responsable de son état ? Né-t-on avec des tendances psychopathes ? Les réponses ne seront jamais amenées. Meyers ne fait jamais le choix du jugement, et ne cherche pas à excuser ce qui deviendront certains des faits les plus cruels dans l’histoire des tueurs en série. Le film s’arrête d’ailleurs juste avant le meurtre de sa première victime, un auto-stoppeur nommé Steven Hicks. Pas de démonstration de violence, juste le portrait d’un adolescent emporté par les abysses avant de plonger littéralement en enfer. Mon Ami Dahmer n’a pas la même force de retranscription que la BD de Derf Backderf. Néanmoins, l’interprétation aigre et polaire de Ross Lynch dans le rôle-titre ainsi que la mise en scène  qui renforce cette sensation inquiétante font du film un ovni hybride à mi-chemin entre le teen movie et le thriller.

Le film est disponible sur la plateforme e-cinema depuis le 2 mars 2018.

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