La folie, ce n’est pas n’importe quoi, c’est un excès de logique. Dans le roman de Mathieu Brosseau, la Folle voit au-dessus d’elle une masse spongieuse, sorte de placenta. Sa soeur jumelle, désignée comme l’Aînée, et qui vit dans l’Autre Ville, voit aussi cette forme, qu’elle peint ainsi : « Ce zénith avaleur de toute chose est un chaos splendide. Le brun, le vert, le noir, le bleu, le jaune et d’autres couleurs – essentielles – baignent dans les profondeurs blanchâtres du Chorion. » Le chorion, nom grec du placenta, est l'enveloppe la plus externe de l’œuf ; chez les mammifères, il est en contact avec les tissus maternels. (Wikipedia) J’entends également dans ce mot un écho du choeur et tel est le roman de Mathieu Brosseau, du moins ce que j’en ai entendu à la Maison de la Poésie. Les personnages n’ont pas de nom ni de prénom. L’importance du chorion est telle que j’ai eu la sensation, oui une sensation physique, d’être dans cette enveloppe à l’écoute de la voix, poésie et narration mélangées, et de la guitare. Une guitare dont les sons parfois emplissaient la salle comme des vagues passant l’une sur l’autre, des nappes recouvrant l’espace. La lecture n’a pas dévoilé tous le secrets du roman (que je n’ai pas encore lu) mais s’est conclue avec ces mots : « Vivre ne sert qu’à ça à voir les rêves dans la vie à attendre, attendre qu’ils apparaissent et noyautent le Chaos, que des histoires fabuleuses interviennent toujours et encore dans le cours des choses. Pour que nous puissions nous rencontrer. Vous et moi ». Ce qui est dit dans cette phrase de vivre pourrait l’être d’écrire. Le chaos c’est écrit.
J'ai assisté à cette lecture à la Maison de la Poésie, à Paris.
Chaos est publié par les Éditions Quidam.