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Atelier d’écriture

Par Antigone

Atelier d’écriture

S’allonger dans l’herbe, les yeux dans les nuages. Le bruit du vent dans les feuilles des bouleaux berce doucement mon après-midi. Je cherche du regard le brin d’herbe folle qui aura ma préférence. Lorsque enfin je l’ai trouvé, je le grignote doucement. Son sucre doux a un goût d’été. Les bras en croix, je sens la terre respirer sous moi. Des yeux, je suis la course des nuages, et je me sens si petite. Une poussière. Un jour, je saurai peut-être tous les pourquoi et les comment. Je me sentirai utile. J’aurai des personnes à aimer. J’aurai oublié les plaisirs minuscules et tous les brins d’herbes mâchouillés de mon enfance. Un jour, peut-être, car aujourd’hui, je râle et je suis seulement celle qui n’a pas été choisie, l’exclue du groupe, de leurs jeux de garçons. J’ai entendu Mathieu marmonner tout à l’heure que j’étais trop pleine de cheveux, de robes blanches, trop fille. Ils sont partis sans moi, tous les quatre. Alors qu’il y a à peine quelques jours, nous faisions encore tout ensemble. Tant pis, qu’ils aillent tous se faire piquer par les moustiques de la rivière, ou pincer par les vipères, ils se trompent ! Je n’ai pas mon pareil pour traverser le gué, pour me frayer un passage sans danger dans les hautes herbes, pour atteindre la ferme des chiens sans avoir peur et pouvoir poursuivre au-delà de la grande route. Ils sont bêtes, et ils me font de la peine. Dans les histoires que je lis, dans les romans que je dévore, je suis au milieu d’eux, je chausse des souliers de mauvais cuir, je prends ma besace, et à moi l’aventure ! Je n’ai pas envie de n’être que cette fille qu’ils croient que je suis. Quel ennui. Et puis j’ai déjà essayé, d’être comme certaines. J’ai moi aussi enfilé des bracelets en plastique et murmuré des bêtises sous un drap tendu, comparé la longueur de mes cils à ceux de Bénédicte. Elle gagne toujours. Le rouge à lèvres que j’ai passé ensuite sur mes lèvres avait un goût bizarre de framboise pourrie. J’ai cru être malade, sans doute un vieux tube oublié. Alors là, j’attends le retour des garçons, allongée dans l’herbe, et la terre sous mon corps accepte mon poids de petite humaine, sans me demander si je suis mâle ou femelle. Merci bien, merci à elle. Tout est devenu tellement compliqué. Au goûter, je sais que je l’aurai ma revanche. C’est dans la cuisine de ma mère que le pain est le meilleur et les tartines gourmandes. Je ferai le pitre, un peu trop. Stéphane rira très fort. C’est comme cela que je fais, c’est par le rire et le chocolat, avec ma casquette trop grande et mes bottes en plastique, que je réussis à me faire aimer d’eux, accepter parfois… encore un peu.

Un texte rédigé dans le cadre verdoyant de l’atelier d’écriture de Leiloona, une photo quelques mots. J’ai utilisé un vieux poème de mon ancien blog comme introduction, et c’était drôle de continuer l’histoire…

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