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Un billet de Nadège : Le Fléau

Publié le 16 avril 2018 par Adtraviata

Un billet de Nadège : Le Fléau

Un Homo universalis fascinant qui étudie les termites et les babouins, un prix Nobel de littérature qui se mêle d’écrire sur les insectes, un scénariste d’Hollywood qui pense avoir découvert un génie méconnu et un zoologiste de renom qui se bat bec et ongles contre la formation d’un mythe… Il a suffi d’un court paragraphe dans la préface à un livre défraîchi pour susciter en moi une curiosité sans cesse croissante. Dans les années qui suivirent, j’ai rencontré des gens, des livres et des idées ; ma curiosité initiale s’est ramifiée, un peu comme pousse le trognon d’un brocoli au fur et à mesure qu’il s’affine. La fascination pour un nouveau sujet de recherche est une forme particulière de rencontre amoureuse. Tout y est : le premier contact, la tentation, l’attirance. Comme dans une soirée, je suis d’abord attiré par un regard puis, intrigué, je jette à nouveau un œil, sachant déjà qu’il est trop tard : je me sens défaillir. Je flirte ensuite un moment avec le sujet et – ce qui est pire – le sujet flirte avec moi. Le tout me turlupine, me poursuit sans relâche. Un jour, à Leyde, chez un antiquaire, je tombe sur un exemplaire de La Vie des termites de Maeterlinck, qui trône sur un secrétaire fraîchement restauré. Un libraire bruxellois me déniche un exemplaire de l’essai de Marais sur les termites, tout maculé de traces de doigts. Je le conserve comme une lettre d’amour.

Je pense que c’est en lisant ce passage que je suis tombée amoureuse de ce livre. Comment mieux définir ce frisson de la découverte et de la curiosité pour un sujet qui, jusqu’alors, nous était tout à fait étranger, voire inconnu ? Comment mieux définir également ce que j’ai vécu avec ce livre ?

De prime abord, rien ne me prédestinait à me plonger dans Le fléau, de David Van Reybrouck. Alors, comment me suis-je retrouvée happée par ces pages ? Eh bien, cela a commencé à la librairie quand une cliente est venue le commander pour son fils. Lorsqu’il est arrivé, j’ai débord trouvé la couverture magnifique : une invitation au voyage, à l’errance, au vagabondage de la pensée et à la découverte d’horizons inconnus. J’ai lu la quatrième et me suis dit « tiens, pourquoi pas ? » Ni une ni deux, je l’ai à nouveau commandé… pour moi, cette fois. Ensuite, il a dormi quelques temps sur ma pile ; le mois belge me semblait la bonne occasion pour le réveiller.

Pour être honnête, à l’heure de l’entamer, je n’ai pas relu la quatrième de couverture et n’avais plus aucune idée du sujet du livre. Tout ce dont je me souvenais est que j’allais m’envoler avec lui pour l’Afrique du Sud. Très vite séduite, j’ai eu un moment de doute lorsqu’il a décidé de me détailler ces drôles d’insectes que sont les termites et l’organisation d’une termitière. Et pourtant, comme David Van Reybrouck raconte avoir écouté pour la première fois une économiste sans bâiller d’ennui et même un certain intérêt (et pas que pour le physique de ladite jeune femme), je me suis surprise à me laisser entraîner dans ces descriptions et dans la quête de David Van Reybrouck pour déterminer si oui ou non Maeterlinck, seul prix Nobel belge de littérature à ce jour, avait ou non plagié les travaux de ce mystérieux Eugène Marais, spécialiste sud-africain des grands singes et des termites. Ces recherches amènent David Van Reybrouck à s’intéresser à l’histoire sud-africaine et c’est absolument passionnant.

Le fléau est un texte d’une érudition folle et pourtant tout à fait accessible. Le choix de David Van  Reybrouck de nous raconter son enquête telle qu’il l’a vécue – avec ses enthousiasmes et ses rencontres, mais également ses doutes et ses découragements – rendent ce texte vivant et humain. Je m’étais donné une dizaine de jours pour le lire ; j’ai lu la moitié en un week-end et l’aurais sans doute dévoré si j’avais eu plus de temps. Finalement, j’ai passé une semaine avec lui et je ne le regrette pas. Prise entre le désir de le retrouver, le plaisir de l’attente et du temps de lecture, j’ai vécu l’une de mes plus belles expériences de lectrice. De celles qui vous font souffler un wouaw de fascination et d’admiration en refermant le livre. Et vous donne envie de repartir pour de nouvelles aventures : Congo. Une histoire. est désormais sur ma pile !

Le fléau, David Van Reybrouck, Actes Sud, coll. Babel

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