
Cette femme pleine de sagesse répondit avec un léger sourire :- Cher époux, il semble que le domaine de la suprême pureté demeure inconnu de toi. Ceux qui y accèdent voient leur coeur purifié et ne succombent plus à l'égarement. Mais ce domaine est aussi éloigné de toi que le firmament pour un habitant sur la terre. Tout ce que tu as appris jusqu'ici ne vaut pratiquement rien. Ce n'est pas l'ouverture ou la fermeture des yeux qui permet de contempler la Plénitude. Ce n'est pas en faisant quelque chose, ou en t'en abstenant, que tu l'obtiendras. Ce n'est pas en te déplaçant, ou en demeurant immobile, que tu y accéderas. Comment considérer comme absolu un état dont l'accès serait conditionné par la fermeture des yeux, un déplacement ou une activité quelconque ? Comment l'élévation des paupières longues comme huit grains d'orge pourrait-elle suffire à occulter la plénitude ? Quel égarement de ta part, ô prince, quelle étrangeté ! Dis-moi,comment l'élévation de ces paupières larges comme le doigt pourrait cacher cette conscience dans l'immensité de laquelle les milliards d'univers sont comme égarés ?Elle lui explique ensuite que l'expérience de la pure conscience sans pensée, comme celle du sommeil profond, n'est pas capable, en elle-même, de détruire les "noeuds" qui emprisonnent le coeur. Seule une réflexion délibérée en est capable. De plus, nous vivons chacun des samâdhis toute la journée, à chaque intervalle entre deux pensées. Mais ces expériences ne provoquent, en elles-mêmes, nul éveil libérateur.Elle continue :Cesse donc de chercher à atteindre ce domaine en fermant les yeux ! Il est ta nature propre elle-même. Il est l'indépassable conscience absolue. Il est la surface du grand miroir où vient se refléter le cours du monde dans toute sa diversité. Indique-moi quand, où et sous quel aspect il n'existe pas !Tout est dit.