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Quand Fromanger annonce la couleur

Publié le 07 mai 2018 par Pantalaskas @chapeau_noir

C’es l’approche d’un artiste indocile, voire irréductible que le livre de Laurent Greilsamer, qui vient de paraître dans la collection « Témoins de l’art » chez Gallimard, tente de cerner.
Quand Fromanger annonce la couleurL’idée même de voir Gérard Fromanger participer à un livre sur sa personne n’était pas acquise et il a fallu à l’auteur des entretiens faire preuve de conviction pour faire aboutir l’ouvrage.
Ces conversations arrivent à point nommé alors que se multiplient en ce mois de mai 2018 les évocations de la participation des peintres à l’atelier populaire des Beaux-arts de Paris en mai 68. Ce moment fort pour l’ensemble des participants l’a été également pour Gérard Fromanger. Mais c’est d’abord sur le parcours de jeunesse que ces entretiens reviennent. Il y a sept générations de peintres chez les Fromanger. Au point que Gérard se sent obligé par cette histoire. Après l’enfance et les études en Normandie, le parcours de celui qui s’engage dans la peinture commence par une séquence de dix huit jours à l’école nationale des Beaux-arts de Paris. Dans cet univers où dominent Buffet et Brayer; Fromanger attend Pollock, De Koning et Kline : « Yves Brayer, c’était les petits chevaux de Camargue pendant qu’il y avait la grande peinture à New York, influencée par le surréalistes, venu d’Europe. Donc salut ! » Assurément la participation de Fromanger à l’atelier populaire des Beaux-arts en mai 68 restera comme un ancrage dans la relation que l’artiste établit avec le monde pour la suite de son œuvre.
« Mai 1968 et l’Atelier populaire ont permis à la société française de comprendre qu’elle avait des artistes contemporains autres que Buffet et Brayer » explique-t-il. Désormais la façon de repenser la peinture passe, pour lui, par cette stratégie de la couleur qui traversera toute son œuvre jusqu’à aujourd’hui. Cette stratégie s’exprime dans une relation au monde clairement désignée : « Je suis dans le monde, pas devant le monde ».
Ce chemin sera jalonné de rencontres privilégiées : César, Giacommetti, Alain Jouffroy, Gilles Deleuze, Michel Foucault, Felix Gattari, Régis Debray, Michel Onfray notamment. De tels échanges auront leur importance dans ce cheminement que décrit Olivier Zahm : « Gérard Fromanger pense et peint. On pourrait dire qu’il fait les deux ensemble, mais non : il travaille à la conjonction peinture et pensée ».
Si les relations de Fromanger avec les artistes et les intellectuels se sont révélées enrichissantes, avec les institutions il en va tout autrement. Toujours attentif à sa liberté, le peintre entretient avec ces institutions des rapports assez tumultueux comme en témoigne notamment le projet avorté d’un plafond au Louvre pourtant promis par les plus hautes autorités de l’état. Plus récemment un projet de vitraux financé par un mécène pour une église romane avorte, après une rencontre dans son atelier avec l’évêque auquel il ne cède rien.
Depuis le début des années quatre-vingt, Gérard Fromanger partage sa vie entre son atelier de la Bastille à Paris et celui de Toscane dans lequel ont vu le jour les grandes séries qui jalonnent son œuvre. Les entretiens témoignent de cette situation à la fois de présence et d’absence dans le monde de l’art. On ne trouve pas hélas dans l’ouvrage de question sur les relations que l’on sait turbulentes entre les partenaires de la Figuration narrative. Ce point aveugle dans le livre nous laisse un peu sur notre faim.Quand Fromanger annonce la couleur

« Annoncez la couleur ! « 

Dans deux semaines s’ouvre à l’Arsenal de Soissons l’exposition « Annoncez la couleur ! » avec Gérard Fromanger. La photographie occupe une place déterminante dans son processus de création. « Annoncez la couleur ! » met l’œuvre de Fromanger en perspective avec celle du trop peu connu Louis Ducos du Hauron, dont l’invention de la photographie couleur en trichromie en 1869 fut décisive dans l’aventure de notre image contemporaine. Dans le même temps cette expression caractérise le positionnement d’un artiste indocile, attaché à son indépendance et à sa liberté ce qui ne crée pas que des amitiés au gré des circonstances, des polémiques.
Cette propension à annoncer la couleur signe à la fois une personnalité et une œuvre, toutes deux engagées dans cette quête de liberté.

« Fromanger, de toutes les couleurs ».
Laurent Greilsamer
Collection « Témoins de l’art »
Gallimard publication mai 2018


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