Página/12 aujourd'hui
L'Argentine semble s'acheminer vers un scénario à la grecque. Sinistre perspective que dénonce Página/12 avec sa causticité et sa combativité habituelle, à coup de unes décoiffantes et de petits dessins de ses chroniqueurs humoristes, Daniel Paz, Rudy et Miguel Rep.
Miguel Rep, hier
"Non !
Pitié ! Je ne veux pas d'une nouvelle semaine comme les
précédentes".
(Traduction et commentaires ©Denise Anne Clavilier)
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Les autres journaux, bien que moins en verve et avec beaucoup moins d'humour, montrent aussi une inquiétude très nette et une perte de confiance incontestable dans le gouvernement, qui semble bien avoir mangé son pain blanc. C'en est fini de la lune de miel avec l'opinion publique, des cotes de popularité insolentes et assez peu cohérentes avec la cascade de mesures de rigueur et des victoires électorales qui paraissaient gagnées d'avance. Les élections de 2019, où Mauricio Macri doit remettre en jeu son mandat, ont pris du plomb dans l'aile en l'espace de quelques jours.
Une de Página/12 avant-hier
avec le calembour habituel : Fond noir fait allusion au FMI
(fonds et fond sont le même mot en espagnol)
Macri : "Ah, Dujovne*… Pendant que tu étais à l'étranger,
il y a eu des bonnes et des mauvaises nouvelles.... Le dollar a augmenté." Dujovne à l'autre bout du fil : "Ouille ! Et la bonne ?" Macri :" Le chocoarroz est toujours au même prix"**
* Dujovne est le ministre qui s'est rendu à Washington la semaine dernière prendre le premier contact avec le FMI ** Le chocoarroz est une sorte d'alfajor, un biscuit fourré traditionnel. C'en est une version à galettes de riz, sous prétexte qu'elle est ainsi adaptée aux intolérants et allergiques au gluten. C'est d'autant plus snob et stupide qu'une des recettes traditionnelles du alfajor se réalise avec de la farine de maïs, qui, par définition, ne contient pas de gluten. Le chocoarroz est l'un des snacks, très chers, que l'on achète dans les boutiques de parapharmacie, notamment celles de l'enseigne hégémonique Farmacity. (Traduction et commentaires © Denise Anne Clavilier)
Le dollar a atteint hier les 26 pesos, l'euro flirtait avec les 31 pesos et la Banque Centrale continuait à puiser dans ses réserves en dollars US pour soutenir tant bien que mal le cours de la devise nationale. On en est arrivé à une telle perte de contrôle que le FMI accepterait de laisser flotter le cours du peso en dollar US tout en prêtant à l'Argentine, soumettant celle-ci (et surtout sa population) aux caprices du marché des capitaux. Le gouvernement commence tout juste à changer de discours et à reconnaître qu'il rencontre des difficultés, qu'il niait contre toute évidence jusqu'à ce week-end.
La journaliste : "En arrivant aux affaires, vous avez dit que si vous ne vous débrouillez pas bien, le dollar monterait à près de 15 pesos". Le ministre : "Oui". La journaliste : "Et maintenant, il est à 24". Le ministre : "Ben oui ! A 24, on est loin de 15". (Traduction © Denise Anne Clavilier)
Très étonnamment, la rédaction de La Prensa a tourné
autour de la même idée que Página/12 sur le dollar
En bas, une image de la révolte de Gaza
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Un petit tour de la presse est instructif : Dimanche : lire l'article principal de Página/12 qui voit le gouvernement traverser sa pire crise (quand ce même gouvernement faisait savoir que la pire des situations qu'il avait eu à affronter avait été son arrivée aux affaires, avec le désastre qu'aurait été la gestion précédente... On croirait entendre du Trump dans le texte ! C'est à peu près aussi nuancé...) lire l'éditorial de Página/12 qui analyse la fin du récit mis en place par le gouvernement depuis sa prise de fonction pour dénigrer l'étape politique antérieure lire l'article de La Nación qui analyse les effets des turbulentes financières sur l'équipe économique du gouvernement, dont le peu de maîtrise des événements apparaît en pleine lumière lire l'article de Clarín sur les conséquences de la crise sur la stratégie politique de Mauricio Macri lire l'éditorial très caustique de Clarín sur le fonds monétaire international (l'humour en question est assez différent de celui qui se pratique à Página/12 mais il n'en est ni moins bon ni moins drôle – où le président Macri, confit en auto-satisfaction, parle au FMI davantage comme un président de club de foot, qu'il fut dans une vie antérieure, que comme un chef d'Etat qu'il est depuis deux ans et demi) (1) lire l'article de Clarín sur les enquêtes d'opinion où l'image de Mauricio Macri coule à pic (l'article est illustré de nombreux graphiques très clairs) Hier lire l'article de Página/12 qui rappelle le calvaire récemment vécu par la Grèce, sous le pied du FMI (et de l'Union Européenne) lire l'article de Página/12 sur les positions du président du syndicat des pilotes de ligne (on croirait lire un article sur la France de Macron ou sur la Belgique de Charles Michel) Aujourd'hui lire l'article de une de Página/12 sur la hausse folle du dollar lire l'éditorial de Página/12 sur le discours apologétique du gouvernement lire l'article de Página/12 sur un énième épisode judiciaire d'un scandale qui implique les intérêts économiques du groupe industriel et de la famille Macri et les décisions du président qui aurait favorisé les affaires familiales (c'est un sujet dont, depuis des mois,seul Página/12 traite) lire l'article de La Nación sur le dollar flottant lire l'article de Clarín sur l'actualité du change peso-dollar.
(1) En plus l'éditorialiste parvient à faire pas mal d'auto-dérision pour le groupe Clarín lui-même, avec des allusions à sa chaîne d'info en continu. Et il ajoute un petit coup de patte à Carlos Pagni, un journaliste-vedette de La Nación, concurrent mais néanmoins ami ! Chapeau, l'artiste.