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A Rome, il n' y en a que pour Henryk Sienkiewicz

Par Dcmky
Entre le 17 et le 28 avril, j'ai passé presque deux semaines à Rome.

Comme je venais à peine de commencer ce blog, j'avais pris mes précautions écrivant deux ou trois billets d'avance dont j'avais planifié la publication au long du séjour.Et puis, j'étais bien persuadé - une histoire de probabilité - que Conrad avait interféré d'une quelconque manière avec Rome: il avait dû y passer, s'y intéresser ou au moins en parler quelque part dans son oeuvre; ainsi j'avais bien pensé, avant de partir, que ce séjour me fournirait sans nul doute matière à quelques notations à son propos.Le premier jour, il était prévu, à partir du Trastevere où nous logions, un vaste mouvement d'encerclement qui, de l'est vers le nord de la ville, devait nous permettre d'inscrire à notre tableau de chasse une belle brochette d'églises romaines, parmi les plus belles:Santa Maria in Cosmedin avec la Bocca della VeritaSaint Jean de LatranSan Clemente et sa crypte de MithraSan Pietro in Vincoli avec le Moïse de Michel-AngeSan Praesede et se smosaïques sublimesSanta Maria MaggioreCe jour-là, nous avions aussi rendez-vous à 17 heures Piazza di Spagna pour le début d'une visite guidée du centre de Rome. Comme les enfants avaient voulu voir la fontaine de Trevi, nous sommes arrivés de l'ouest par la via Borgogna;, je n'avais pas une seule seconde de la journée pensé à Conrad lorsque, levant la tête à l'angle de la Via Bocca di Leone ( au 14), je tombe par hasard sur cette plaque:

A Rome, il n' y en a que pour  Henryk Sienkiewicz

14, Via Bocca di Leone 

Henryk Sienkiewicz, l'autre grand auteur polonais du début du XXième siécle. Qui me ramenait vers Conrad dont il fut le grand rival national.Henryk Sienkiewicz (1846-1916) lauréat en 1905 du prix Nobel de littérature. Dont Conrad ne devait jamais être honoré.'Quo Vadis', son roman le plus célèbre, dont on a peine à imaginer le succès qu'il a rencontré à sa parution en;Voilà ce qu'en écrit dans un très bel article que je vous recommande ( il est en libre accès sur le net à l'adresse:https://www.persee.fr/doc/bude_0004-5527_2002_num_1_2_2070):' La vogue extraordinaire du roman en France touche au phénomène de société. « On ne s'abordait plus entre gens du monde sans se demander: 'Avez- vous lu Quo vadis?' Cette formule avait remplacé le banal 'Comment allez-vous?' que disent encore quelques personnes arriérées, peu au courant de nos usages », écrit un journaliste en 1901 (d'après M. Kosko, La fortune de Quo vadis en France, p. 18). Le titre même du livre prêtant à calembour, il était utilisé sans cesse, notamment pour des publicités de l'Exposition Universelle de 1900 : « Quo vadis? Si le roman de Henri Sienkiewicz a été traduit en dix langues, le titre seul est proféré journellement à l'Exposition dans tous les idiomes du monde : Où vas-tu? Et la réponse est toujours la même : je vais où tout le monde va, goûter le thé fameux que l'on sert au pavillon de Ceylan » (d'après M. Kosko, p. 65). Enfin Quo vadis était adapté au théâtre.'Jamais évidemment Conrad n'aura connu un tel succès...'Quo Vadis' dont l'adaptation cinématographique par Mervyn LeRoy inaugura l'âge d'or du péplum hollywoodien...

A Rome, il n' y en a que pour  Henryk Sienkiewicz

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Il paraît que l'idée de Quo Vadis est venue à Henryk Sienkiewicz alors qu'il se trouvait dans l'église Santa Maria in Palmis sur la Via Appia; d'ailleurs, il a sa statue dans l'église.


A Rome, il n' y en a que pour  Henryk Sienkiewicz

Eglise Santa Maria in Palmis, Rome via Appia


'L'église fut construite au XVIIe siècle sur le site d'une chapelle du IXe siècle érigée sur le lieu de la vision de saint Pierre, rapportée dans les actes de Pierre, lors de laquelle fuyant Rome et les persécutions de Néron il rencontre Jésus à qui il demande Domine Quo vadis ? (Seigneur où vas-tu ?) et qui lui répond Venio Romam iterum crucifigi (Je vais à Rome me faire crucifier de nouveau), comprenant ainsi qu'il doit retourner dans la ville et affronter son martyr.' ( source Wikipédia)


Si je pouvais rencontrer Henryk Sienkiewicz dans ces parages romains, c'est que probablement Joseph Conrad ne devait probablement pas être bien loin....J'allais forcément trouver un moyen de faire le raccord entre JC et Rome.Il y aura séjourné lui aussi, ou bien alors il y aura situé un de ses récits - quelque chose qu'il aura écrit se passera à Rome, ou aura à voir avec Rome...J'étais sûr de mon coup, pourtant j'ai eu beau chercher longtemps, je n'ai absolument rien trouvé de probant, rien qui puisse établir le moindre lien.A y réfléchir, finalement, n'est-ce pas assez rassurant que l'on ne puisse artificiellement établir un rapport entre tout et n'importe quoi?...Le cinquième jour il fut encore question de Quo Vadis. Nous sommes montés sur la colline du Janicule pour admirer l'église édifiée à l'endroit exact où, dit-on, fut crucifié Saint Pierre.


A Rome, il n' y en a que pour  Henryk Sienkiewicz

Eglise San Pietro in Montorio, colline du Janicule, Rome

Ecrit en italien sur le mur d'une galerie qui, à cet endroit, mène au Tempietto de Bramante, j'ai trouvé le beau début de  l"Incipit de La Vie d'Henry Brulard":

A Rome, il n' y en a que pour  Henryk Sienkiewicz
'Je me trouvais ce matin, 16 octobre 1832, à San Pietro in Montorio, sur le mont Janicule, à Rome, il faisait un soleil magnifique. Un léger vent de sirocco à peine sensible faisait flotter quelques petits nuages blancs au-dessus du mont Albano, une chaleur délicieuse régnait dans l'air, j'étais heureux de vivre. Je distinguais parfaitement Frascati et Castel Gandolfo qui sont à quatre lieues d'ici, la villa Aldobrandini où est cette sublime fresque de Judith du Dominiquin . Je vois parfaitement le mur blanc qui marque les réparations faites en dernier lieu par le prince François Borghèse, celui-là même que je vis à Wagram colonel d'un régiment de cuirassiers, le jour où M. de Noue, mon ami, eut la jambe emportée. Bien plus loin, j'aperçois la roche de Palestrina et la maison blanche de Castel San Pietro qui fut autrefois sa forteresse. Au-dessous du mur contre lequel je m'appuie sont les grands orangers du verger des capucins, puis le Tibre et le prieuré de Malte, un peu après sur la droite le tombeau de Cécilia Metella, Saint-Paul et la pyramide de Cestius. En face de moi j'aperçois; Sainte-Marie-Majeure et les longues lignes du Palais de Monte Cavallo. Toute la Rome ancienne et moderne, depuis l'ancienne voie Appienne avec les ruines de ses tombeaux et de ses aqueducs jusqu'au magnifique jardin de Pincio bâti par les Français se déploie à la vue.Ce lieu est unique au monde, me disais-je en rêvant et la Rome ancienne malgré moi l'emportait sur la moderne, tous les souvenirs de Tite-Live me revenaient en foule.Sur le mont Albano à gauche du couvent j'apercevais les prés d'Annibal.Quelle vue magnifique!....'Stendhal, c'est Rome, c'est l'Italie...

Comme il s'agit, en toute circonstance, de rester fidèle à ses principes, je termine ce billet bizarre qui, malgré tous mes efforts, n'a finalement pas grand chose à voir avec lui, par quelques mots de Joseph Conrad:Il lui était venu que la vie, pour être vaste et pleine, devait, à chaque moment du présent, contenir le souci du passé et de l’avenir. Notre tache quotidienne doit être accomplie pour la gloire des morts et pour le bien de ceux qui viendront après nous.'Un extrait de Nostromo bien sûr.


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