« Ce que l’on voit n’a aucun intérêt, disait Robert, ce que l’on donne à voir est important. »
Dans ce monde où règne le grand B.A.L. (Banques, Assurances, Laboratoires), la nature est entièrement sous contrôle. Toute la nature ? Ne reste-t-il aucun endroit sur la terre qui résiste ? En d'autres mots, un « tiers paysage » ? Un dernier très petit mammifère, témoin de la vie animale d’avant la Guerre des Nuages, a disparu. Les armes chimiques ayant été interdites sur la terre, il reste à l’industrie agro-alimentaire et à l’industrie pharmaceutique de nombreux champs d’expériences. Gilles Clément nous immerge dans ce monde qui ressemble terriblement au nôtre, où Monsanto vient de fusionner avec Bayer, un monde où Robert dit d’Yeu, ou encore Dyeu, est patron d’une boîte de com’. L’équipe qu’il dirige part enquêter : Maricé sa compagne, Rimade sa secrétaire, Llibida l’artiste peintre, Didji fils adoptif et musicien, Gaby ex-appariteur, fonctionnaire déchu, reporter urbain, Géolie gréviste. Il n’y a pas de prison dans cette société mais des CLOS (Centres de Loisirs Obligatoires Surveillés) qui me font penser à l’île W que Perec décrit dans son livre W ou le souvenir d’enfance. Et la terre va trembler, mettant à bas tout le système. Quand Dyeu, qui vient de subir une greffe du rein, comprend et va révéler la tricherie du grand B.A.L., il suffira de peu, d’un fou rire provoqué par les mots « sauver la planète », pour préserver le secret du « paysage du mensonge ».
C’est un roman d’anticipation où le lecteur prend autant de plaisir que l’auteur, connu comme jardinier planétaire, qui dénonce en riant la grande supercherie.