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Guillaume Guéraud : Captain Mexico

Par Stephanie Tranchant @plaisir_de_lire

Captain Mexico de Guillaume Guéraud     4/5 (06-06-2018)

Captain Mexico (96 pages) es sosti le 2 mai 2018 dans la collection  Dacodac des Editions du Rouergue.

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L'histoire (éditeur) :

Paco adore jouer à la révolution à la sortie de l'école. Sur les traces de son héros préféré Emiliano Zapata, il rêve de mettre fin à la misère dans son petit village mexicain. Mais son amie Esperanza est seulement épatée par les super-héros américains et Paco n'est pas de taille pour lutter. Jusqu'au jour où un mystérieux sombrero lui tombe sur la tête. Un vieux sombrero dont les pouvoirs extraordinaires vont transformer Paco en... Captain Mexico !

Mon avis :

Captain Mexico possède une entrée en matière particulièrement cinématographique qui laisse le jeune lecteur visualiser avec une incroyable facilité les évènements. Guillaume Guéraud nous embarque là en Amérique latine. Il nous transporte au Mexique, en plein épisode de révolution ente Emiliano Zapata et ses hommes contre le dictateur Huerta. Et pourtant, en vérité on est bien loin de l’époque et des événements évidement.
Paco est un garçonnet fan de Zapata et de son action quand celui-ci mena sa guérilla pour  tenter de zigouiller Huerta. Alors à la sortie de l’école il s’amuse à rejouer la scène, à la seule différence qu’aujourd’hui se sont les révolutionnaires qui l’emportent, même si Carlos (qui campe le rôle de Huerta) est un récalcitrant qui ne veut jamais mouroir et qui en fait des tonnes

« Ce n’était peut-être ni le même lieu ni la même époque. Leur bidonville de Matamoros, n’avait plus rien à voir avec la campagne mexicaine où Zapata avait mené ses batailles. Mais cent ans après, malgré l’invention des congélateurs et des téléphones portables, ses gamins ne mangeaient que des pastèques et de haricots rouges comme Zapata. Et cent ans après, même si l’asphalte avait remplacé la terre ocre, le soleil brillait de la même façon. Comme l’envie de se révolter. » Page 12-13

Paco est un gamin plein de rêves et de désirs. Des désirs à son échelle de gamin de 11 ans et des rêves plus vastes d’habitants d’un bidonville du Mexique qui aimerait simplement moins d’injustice pour les siens.

« Mais trop de souhaits se bousculèrent dans sa tête. Il voulait devenir beau et célèbre, il voulait que sa mère arrête de lui colle des beignes, il voulait que son père ne parte pas aux Etats-Unis, il voulait que tous les Mexicains disparus de l’autre côté de la frontière reviennent entier, il voulait sauver la planète, il voulait être mécanicien et médecin et cosmonaute et champion du monde de football, il voulait connaitre ses tables de multiplication par cœur sans être obligé de les apprendre, il voulait qu’Esperanza tombe amoureuse de lui, il voulait que… » Page 38

Et oui, Paco, ses parents, sa petite sœur Olivia et bébé Alfonso, ainsi que tous ses copains, vivent dans le bidonville de Mataromos. La « maison » de Paco est pleine de cafards, constituée d’une seule et unique pièce aux murs en bois et au toit de tôle ondulée, située le long du Rio Grande tout juste face à la frontière des Etats Unis. Et, depuis qu’ils ont quitté il y a 10 ans la misère paysanne du sud du Mexique, ils côtoient maintenant celle du bidonville, sa maman mère au foyer distribuant les torgnolles (licenciée de l’usine juste avant la naissance de son petit frère) et son père employé à l’usine américaine Tiny Toys, gagnant tout juste de quoi survivre.

Mais les choses sont peut-être sur le point de changer…en tout cas, un vent de révolte gonde…

Captain Mexico soulève le contraste entre le rêve américain et la réalité de la misère mexicaine, celle des ouvriers sous-payés par des multinationales ou tout simplement des grandes sociétés américaines (s’engraissant naturellement sur leur dos).

Captain Mexico expose, sans pathos, une réalité sociale qu’on voit peu en littérature jeunesse mais qui ne joue aucunement sur l’exagération ni sur le pathétisme affecté. Au contraire, il y a là beaucoup de vie dans ces pages, de gamins, d’espoir et de choses extraordinaires. Il y a aussi évidement des contradictions (l’amour d’une terre qu’on ne veut quitter et le besoin d’espérer une vie meilleure ailleurs). Mais comment partir ? Et surtout comment arriver aux Etats Unis, franchir le fleuve et cette frontière que Donald Trompette tient tant à rendre inviolable.

« - Ce taudis est notre terre ! répliqua sa mère. Et tous les pauvres du quartier devraient se donner la main pour lutter ensemble ! (…)

- Il suffirait de prendre l’usine Tiny Toys aux Américains ! s’écria-t-il. Comme Zapata a pris les terres aux riches propriétaires autrefois ! » Page 21

Alors pourquoi ne pas réorienter la révolution récréative vers une véritable révolution utile ? Evidemment quand on a 11 ans, c'est facile à dire… mais lorsque Paco tombe sur un vieux et poussiéreux sombrero (accessoire typique des paysans et des rebelles tels que Zapata), peu importe qu’il soit dix fois trop grand pour lui, car sa rencontre avec Domingo (terreur du quartier de 15 ans, déscolarisé depuis un moment, adepte de la cigarette, de la tequila, du couteau à cran d’arrêt et du raquette) et cette incroyable expérience vont lui donner des ailes.

Et si tout devenait possible ?

Captain Mexico est un western des temps modernes. Du grand n’importe quoi dirons les puristes mais bien en vérité un feu d’artifice d’action et d’attaques en tout genre, d’effets spéciaux, de super héros et de super vilains dont se régaleront les lecteurs dès 9 ans. C’est un roman (enrichi de petites illustrations signées  Renaud Farace) qui donne aussi l’opportunité de découvrir un univers, un pays où toute forme de contestation est interdite et réprimée et un peuple opprimé mais tellement plein d’espoirs.

« Tout paraissait tranquille sous ce chapeau. Tout semblait facile. Tout avait l’air possible. A croire que sa paille était tressée d’espoir. Que ses contours dégageaient de la force et du courage. Ou que des pouvoirs magiques se cachaient dans son liseré rouge. » Page 29


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