Je lis plutôt un livre à la fois, mais je lis affreusement vite. Je dis «affreusement», car je reçois beaucoup d'ouvrages que je dois lire pour pouvoir les chroniquer ou interroger leur auteur. Ma lecture est au laser, il faut que ça usine!Affreux, l'usine! Voilà donc les Temps modernes, mon pauvre monsieur!
Franchement, de quoi se plaint-il? Est-ce un moyen sournois de préparer le terrain à une demande de surclassement dans l'échelle de pénibilité du travail? Critique littéraire: +3 (je dis ça sans savoir, j'ignore comment on compte, si c'est en degrés Celsius ou Fahrenheit). C'est dit apparemment sans rire et vraisemblablement sans honte.
Si lire te pèse, mon bonhomme (en chair et os, pas en latex), change de boulot! Bricole ou même va à la pêche. Les mots te laisseront tranquille et pas un auteur ne viendra taquiner le menu fretin avec toi.
Je me demande toujours ce qui leur prend, à ces forçats de la lecture, quand ils s'épanchent ainsi sur la masse infinie de leur travail, et l'heure qui tourne, et zut! il me reste encore deux cents pages et j'entre en studio dans une demi-heure - ce qui, dans le cas qui nous concerne en ce beau jour d'aujourd'hui, devrait suffire pour feuilleter encore cinq romans de la rentrée, si j'en juge d'après mes souvenirs d'une émission, j'ai oublié laquelle, dont les dernières minutes étaient consacrées à présenter, de manière critique, oui, oui, dire que c'est bien, que c'est attachant, que c'est émouvant, que c'est superbement écrit, c'est aussi une critique, une pile de livres haute comme moi et dont l'odeur d'encre fraîche avait dû l'enivrer.
Rendez-nous le flacon, on s'occupera de l'ivresse plus tard, quand on aura goûté au plaisir de lire, une notion qui semble étrangère à ce grand professionnel.
