Magazine Culture
En 1971 David Crosby n'est pas encore ce sympathique vieux morse à la moustache saupoudrée de cocaïne que vous connaissez tous. Il est un peu largué, assez paranoïaque et même presque amnésique puisqu'il ne se souvient plus de son propre nom, ce qui est tout de même assez fort de peyotl, il faut bien l'avouer. Bref, c'est un type un peu encombré qui enregistre le disque dont je suis censé parler, un type qui passe des drogues un brin récréatives aux drogues indifféremment addictives, un type qui voit ses vagues convictions communautaristes verser dans le pathétique, un type qui semble mâchouiller toutes les fleurs fanées des sixties et qui forcement sombre dans une gueule de bois carabinée. N’empêche, malgré tout cela et peut-être grâce à tout cela cet If I Could Only Remember My Name est très bon, voire plus. Il faut dire que les musiciens qui accompagnent l'ami Crosby ne sont pas les derniers des godelureaux venus (jugez par vous même : Neil Young, Joni Mitchell, Graham Nash, Jerry Garcia, Jorma Kaukonen) et que l'essentiel des compositions baigne dans une ambiance qui si elle est assurément californienne ne se gène pas pour être également inquiétante quand elle n'est pas rêveuse. On passe de l'épopée western ( Cowboy Movie), au romantisme aérodynamique (Traction in The Rain et son admirable Autoharpe bachelardienne), des crescendos de voix « à la CSNY » (Music is love, What are their Names) au tout simplement cosmique forcement cosmique (Laughing et son extraordinaire solo de Pedal Steel fomenté par le très barbu Jerry Garcia). Comme j'ai beaucoup de choses à faire et comme j’imagine que vous aussi, je conclurais très vite en disant qu'il est difficile de trouver quelques faiblesses dans tout ça.