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Le MOCAK de Cracovie : l’art rend libre

Publié le 18 septembre 2018 par Pantalaskas @chapeau_noir

« Kunst macht frei »

Le MOCAK de Cracovie : l’art rend libre

Grzegorz Klaman « Kunst macht frei » 2003

« Kunst macht frei ». Cette sentence, allusion glaçante au « Arbeit macht frei » placé au fronton du camp d’Auswitch, est visible au sommet d’une des grandes salles du MOCAK le musée d’art contemporain de Cracovie. Cette œuvre de l’artiste Grzegorz Klaman prend ici une résonnance toute particulière. Le MOCAK se trouve à proximité de ce que fut le ghetto de Cracovie avant que ses habitants ne soient déportés vers les camps de la mort. Le musée a été construit sur le terrain de l’ancienne usine d’Oskar Schindler selon le projet de l’architecte italien Claudio Nardi. L’auteur a inscrit cette réalisation dans l’environnement urbain en adaptant une partie des anciennes halles de l’usine. Enfin le camp d’Auswitch se situe à quelques dizaines de kilomètres de la ville.
C’est dire combien ce terrible « In situ » vérifie l’attention portée par les artistes à leur époque et à leur histoire.

Le MOCAK de Cracovie : l’art rend libre
Le MOCAK, premier musée en Pologne et le plus grand de ce type construit entièrement après la guerre, a été inauguré en 2011. Ce sont de vastes salles qui permettent de découvrir l’art actuel à la fois à travers les collections permanentes dont la présentation change chaque année et les expositions temporaires.

« Motherland in Art »

Ancré dans son histoire, le musée propose actuellement l’exposition « Motherland in Art ». C’est l’occasion pour les artistes de revisiter cette notion de patrie, son contenu, ses limites. La patrie, cette forteresse au sein de laquelle tous ont parlé la même langue, ont chéri la tradition, voit son contenu remis en cause pour apparaître davantage comme une source d’isolement et d’exclusion que de rassemblement.
Désormais, c’est à l’aune de la mondialisation que se mesurent les frontières mouvantes de la patrie, la fragilité de son concept notamment dans ce pays où la culture religieuse occupe une place importante. Et les artistes ne se privent pas pour remettre en question à la fois la notion de patrie et la réalité contraignante de la mondialisation.

Le MOCAK de Cracovie : l’art rend libre

Jaroslaw Kozlowski « A united word » 2000

Jaroslaw Kozlowski propose une installation ironique « Un monde uni » dont la ronde des drapeaux nationaux couronne une bric à brac indescriptible contraint dans une sorte de prison circulaire indéfinissable.

« 7+1 »

La collection permanente du musée n’échappe pas à cette inscription de l’art polonais dans son vécu. Les mines de sel de Wieliczka situées près de Cracovie et inscrites depuis 1978 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO ne sont plus, certes, en activité mais désormais livrées à la seule industrie touristique. L’artiste Mirosław Bałka a abordé cette mémoire avec une œuvre contemporaine. La sculpture « 7+1 » consiste en sept cylindres de sel placés dans des conteneurs en béton. Les cylindres ont été taillés dans le sel de la mine de sel Klodawa, célèbre pour ses impuretés brunâtres, qui donnent son apparence individuelle à chaque cylindre. La juxtaposition de ces caractéristiques se combine pour créer une richesse de symboles, le sel associé à la richesse, à l’utilité quotidienne, le béton impliquant la solidité, la sécurité mais aussi l’enfermement.

Le MOCAK de Cracovie : l’art rend libre

Mirosław Bałka « 7+1 » 1998/2011

Le MOCAK poursuit ainsi cette quête de mémoire alors que, quelques mètres plus loin, le musée consacré à Oskar Schindler reçoit chaque jours des vagues incessantes de visiteurs. Pour le tout jeune musée, la conquête du public passe par cette prise en compte d’une mémoire blessée par une histoire encore très présente.

Photos de l’auteur

Motherland in Art

27.04.2018 – 30.09.2018
MOCAK
4 Lipowa St
30-702 Cracovie
Pologne


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