Les livres d’Edward Limonov ne laissent jamais indifférent ; son dernier ouvrage, Et ses démons (Bartillat, 236 pages, 20 €), encore moins que les autres. Le lecteur qui s’arrête un instant sur la couverture pourrait d’ailleurs inclure le nom de l’auteur dans le titre lui-même, car ce roman autobiographique, autrement plus intense que les pâles autofictions qui, chaque année, encombrent les rayons des librairies, ne parle finalement que de Limonov et de ses démons. Quels sont-ils ? Ceux qu’il nous présente sont extérieurs ; des spécialistes d’une clinique devenue sous sa plume « camp nazi de médecins européenne » aux statues africaines dont on lui avait fait cadeau, ces démons l’entourent et, pense-t-il, œuvrent à sa perte ; mais on devine qu’il ne s’agit ici que de la partie visible de l’iceberg. Les autres, même s’ils ne les évoque guère, se glissent entre chaque ligne ; ce sont des démons intérieurs, qui l’habitent depuis le début de sa vie aventureuse, pavée d’utopies, de causes perdues, d’engagements ontologiquement minoritaires. Ne porterait-il pas sa barbiche, Limonov ne parviendrait pas à dissimuler le Don Quichotte qui ne sommeille en lui que d’un œil distrait au cœur d’un paysage hérissé de moulins.