Partager la publication "[Critique] GALVESTON"
Titre original : Galveston
Note:
Origine : États-Unis
Réalisatrice : Mélanie Laurent
Distribution : Ben Foster, Elle Fanning, Lili Reinhart, Beau Bridges, Maria Valverde, Adepero Oduye, Robert Aramayo, Tinsley Price…
Genre : Thriller/Drame/Adaptation
Date de sortie : 10 octobre 2018
Le Pitch :
Condamné par la maladie, Roy, un gangster à la petite semaine, échappe de justesse à un guet-apens tendu par son patron. C’est alors qu’il rencontre Rocky, une jeune femme, avec laquelle il s’échappe, sans trop savoir où aller. Deux âmes perdues qui finissent par s’échouer à Galveston, dans l’état du Texas…
La Critique de Galveston :
Mélanie Laurent a sauté sur l’occasion de réaliser un authentique film américain. Néanmoins, elle n’a pas sauté à pieds joints dans l’inconnu et s’est donc retrouvée à adapter le roman de Nic Pizzolatto. Pizzolatto qui n’est autre que le créateur de la série True Detective. Une valeur sûre donc, dont le livre, soit dit en passant, est au moins aussi remarquable que son travail à la télévision. Cela dit, que vaut le film ? Sachant particulièrement qu’une cinéaste comme Mélanie Laurent n’était a priori pas vraiment taillée pour embrasser un univers aussi sombre et brutal. Et pourtant…
Road movie désespéré
Alors oui, sur le papier, la présence de Mélanie Laurent à la tête d’un tel projet pouvait décontenancer. À l’arrivée pourtant, difficile de ne pas reconnaître la qualité du travail accompli. Mélanie Laurent qui a tout d’abord opté pour une illustration assez fidèle du livre. Un choix des plus sages tant Galveston traduisait déjà le talent de Pizzolatto pour ce qui est de créer sur le papier des ambiances déjà très cinématographiques. On peut peut-être affirmer que Mélanie Laurent n’a pas eu à beaucoup forcer mais c’est en fait tout l’inverse car il est ici notable que la réalisatrice a aussi dû dompter cette atmosphère parfois si lourde pour permettre au récit de ne pas étouffer et de s’épanouir jusqu’à son dénouement. Certes le film suit fidèlement le livre mais ici, contrairement à certains autres cas, c’est une excellente chose. Road movie nostalgique, fiévreux et violent, Galveston porte au final la marque de Mélanie Laurent, mais aussi celle de Pizzolatto.
Paris – Texas
Le talent de Mélanie Laurent qui se traduit notamment dans la superbe direction d’acteurs. Que ce soit Ben Foster ou Elle Fanning, tous les deux bénéficient de la liberté requise pour bien faire exister leurs personnages, exploités par une réalisatrice discrète mais bien présente, qui a parfaitement saisi l’importance concernant ses deux comédiens géniaux, de respirer dans cet écrin parfois étouffant. Sans forcer, Mélanie Laurent magnifie la puissance du jeu de Foster (il serait temps de filer un Oscar à ce type) tandis qu’elle souligne la vulnérabilité d’Elle Fanning, ne loupant pas le coche quand il s’agit d’également surligner sa résilience. Et de résilience, c’est d’ailleurs finalement de cela dont traite Galveston. De la vie de deux âmes perdues en quête d’une rédemption mais presque totalement acculées face à des problématiques diverses et douloureuses. Mélanie Laurent laisse donc respirer ses acteurs mais aussi son scénario, qu’elle a par ailleurs également écrit. Chapeau là aussi car le respect pour le bouquin est total mais pourtant, à la fin, ça vaut vraiment le coup d’insister là-dessus, Mélanie Laurent est arrivé à s’approprier le projet.
Course contre la mort
Galveston est pétri de grandes qualités. Il manque peut-être juste de cet effet de surprise. Probablement désireuse de ne pas dénaturer cette lente mélopée funèbre, la réalisatrice tombe parfois un peu dans l’excès et se laisse à son tour envahir par une certaine torpeur. Pas au point de provoquer l’ennui chez le spectateur mais suffisamment pour que parfois, le récit s’enlise un peu, alors que les éclairs de violence ne semblent pas toujours aussi cohérents que souhaité. Mais c’est rare car la plupart du temps, Galveston vise juste et parvient à construire une émotion qui trouve son point d’orgue lors de l’ultime scène, dans les yeux des personnages et dans ce désir de faire confiance à l’histoire. Quitte à copier quelques gimmicks chez les copains, Mélanie Laurent réussit son passage à l’Ouest, avec une certaine discrétion et beaucoup d’humilité. Et ce n’était franchement pas évident au départ…
En Bref…
Fidèle au roman dont il est l’adaptation, Galveston est un road movie tragique très sombre et brutal, dans ses intentions, via la violence de certaines images et dans cette volonté de ne pas céder aux canons les plus voyants du genre. Lyrique quand il arrive vraiment à toucher au vif, un peu laborieux parfois aussi mais rarement, le premier essai américain de Mélanie Laurent est une réussite indéniable. Une réussite touchante, dont certaines images nous hantent longtemps après la projection.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : The Jokers