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Citizens’ view #2 : le web comme “média des sans-voix” - François Guillot

Publié le 09 juillet 2008 par Lilzeon

Après Marie Chevalier, c’est au tour de François Guillot (Internet et Opinion) de nous faire l’honneur de répondre à une petite interview.

François, mais t’es qui toi ?

J’ai 33 ans, je suis associé dans une société concurrente de la tienne

;-)
où j’ai fait toute ma carrière. J’ai travaillé pendant environ 8 ans sur des aspects très variés de la communication et des relations publiques, mais le web ne me passionnait pas particulièrement avant l’émergence des blogs. Quand j’ai pris conscience de ce phénomène début 2005, j’ai été vraiment fasciné : le fait que chaque individu puisse devenir un média, même un micro-média, me paraissait révolutionnaire. J’ai assez naturellement commencé à bloguer, c’était en août 2005, sur différents sujets et avec différents blogs, seul ou en collectif. Je l’ai fait à titre personnel mais cela m’a amené à réfléchir à mon évolution professionnelle. Et après avoir pris la responsabilité de l’expertise stratégies Internet du groupe i&e en 2006, j’ai ouvert Internet et Opinion(s) avec Emmanuel Bruant, pour en faire un laboratoire d’idées sur l’impact d’Internet dans la société, dans les systèmes d’opinion et sur les métiers de la communication.

  • Salut Citoyen : en 2007, lors d’un de tes tous premiers billets, tu citais Mark Twain “qu’on croirait écrite pour le web, même sans vouloir le réduire aux hoax : “A lie can travel halfway around the world while the truth is putting on its shoes.” Près d’un an plus tard, penses-tu que le web soit un média “réactionnaire” plutôt qu’un média de “construction” ?

Il y a deux choses qui expliquent que le web soit un important réceptacle à contestation :

  1. d’abord, il est un certain reflet de la société. Or, quand les gens s’expriment, sur le web ou pas, c’est plus souvent pour exprimer des doléances que pour se réjouir ou pour construire. Je n’ai plus les chiffres en tête mais il y a des études qui montrent des trucs du genre “quand une personne n’est pas satisfaite d’un produit, elle va en parler à 10 autres personnes. Quand elle est satisfaite, elle va en parler à 5 personnes”. C’est un exemple, les chiffres ne sont pas bons, mais je crois en tout cas que le rapport était de 2 à 1. On voit aussi ce phénomène dans le traitement médiatique des événements – dans notre profession, un des adages dit “les journalistes aiment les problèmes, pas les solutions”. Quand on regarde la une des journaux, on voit qu’il n’y a que le Parisien qui propose des unes “positives” à ses lecteurs (je mets le cas Betancourt à part).
  2. ensuite, le web a historiquement été le média des sans-voix, de tous les groupes qui avaient un accès difficile aux médias “traditionnels”, comme les groupes de contestation de tous horizons.

Donc la part d’informations contestataires, de protestations, de traitement d’actu sous un angle négatif, etc., est importante sur le web. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas de place pour “construire”, car c’est aussi un média dont on fait ce qu’on veut. Cela a des conséquences dans nos métiers : le web est à la fois facteur de risques et d’opportunités d’opinion pour les entreprises, les marques et les organisations. Les clients l’envisagent souvent sous l’angle du risque, souvent trop à mon goût, mais il n’y a pas de fumée sans feu.

  • Tu parlais du rôle de la fiction dans l’opinion à propos d’Obama. Max Weber parlait justement de désenchantement du monde. Penses-tu donc qu’à défaut d’un “Dieu vertical”, les “histoires” horizontales peuvent conduire à une recréation de sens ?

Faut que tue ma la reformules, je ne comprends pas ;-(

  • [edit : oui je sais il faut plus que j’envoie de question sous trop de caféine)
  • Versac qui lâche son blog : on s’en fout non ? :p Plus sérieusement, penses-tu que nous sommes arrivés à une première maturité de la blogosphère ?

C’est un événement important à l’échelle de la blogosphère, je pense. Il arrive dans un contexte agité : on a vu qu’Eric Dupin devenait blogueur professionnel, que Fred Cavazza se retire du classement Wikio, fatigué par les sollicitations qui vont avec son statut perçu de blogueur influent, Maître Eolas est repris par Le Monde, plusieurs polémiques opposent des journalistes à des blogueurs… On arrive peut-être à un certain stade de maturité de la blogosphère, mais pas forcément parce que Versac arrête. Plutôt parce que les médias s’ouvrent aux blogs - même si ça se fait très tardivement et de façon lente, il y a des signes positifs ; aussi parce que les blogueurs sont moins naïfs vis-à-vis des marques qui les sollicitent. Après, la blogosphère traverse certainement différentes phases, on avait déjà évoqué la mort des blogs après la présidentielle alors qu’on arrivait plutôt à une banalisation, à un rythme de croisière… La blogosphère est en renouvellement perpétuel, des blogs arrêtent, d’autres commencent, il y a des cycles, tout ça reste très dynamique.

  • Si tu avais une utopie qui pourrait être réalisée via le web, quelle serait-elle ?

Mon attitude vis-à-vis du web est plus celle de l’analyse que du changement du cours des choses. Il y a un énorme boulot pour simplement comprendre ce qui s’y passe, et le web contribue à faire évoluer la société dans certaines directions, dont je ne sais pas si elles sont toutes positives. Cela renvoie par exemple au débat sur le culte de l’amateur, à l’affaiblissement des médias traditionnels… Est-ce que le web permet à la société de mieux fonctionner s’il anéantit les médias ? D’un côté, le fait pour tous les individus de pouvoir s’exprimer en ligne est un immense progrès, de l’autre on voit des risques comme celui de l’appauvrissement de l’information. Par ailleurs, bien sûr, le web permet de s’ouvrir au monde, aux autres, ce qui est formidable. Pour répondre à ta question l’utopie serait donc qu’il contribue encore plus aux rapprochement des peuples et des cultures – je suis comme beaucoup de monde, j’en rêve, mais je ne me sens pas tout à fait dans mon rôle de consultant et de blogueur quand je dis ça !

Voilà, surtout vois ça comme quelque chose de vraiment ouvert.

  • Bonne soirée et au plaisir !

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