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J’ai vu au cinoche… (octobre 2018)

Par Tinalakiller

Une sorcière a-t-elle jeté un vilain sort sur les films ou mes visionnages ce mois-ci ? Réponse ci-dessous !

The Little Stranger de Lenny Abrahamson

Lenny Abrahamson est un réalisateur " étrange " par son irrégularité : il a à son actif des bijoux ( Garage, Room) et un film ignoble (le pourtant acclamé What Richard Did). Surtout, j'ai réalisé avec The Little Stranger que j'avais du mal à reconnaître chez lui sa patte artistique. Cela est particulièrement embêtant alors qu'Abrahamson sait tout de même faire son travail. Effectivement, dans cette adaptation du roman de Sarah Waters (publié en 2009), la mise en scène est plutôt maîtrisée, la charge esthétique soignée et la distribution (Domnhall Gleeson, Ruth Wilson, Charlotte Rampling) impeccable. Il est certain que le réalisateur a énormément misé sur l'atmosphère et c'est peut-être là où ça coince. D'un côté, il parvient bien à reprendre les codes de la littérature et du cinéma " de fantôme " et plus globalement du roman gothique. Mais hélas son film met trop de temps à décoller, j'ai même failli m'endormir à plusieurs reprises pour être honnête. Même le twist déçoit, pas à cause du contenu en lui-même mais parce qu'on finit par se désintéresser du récit. The Little Stranger manque de puissance et même de clarté car en dehors de la reprise des codes, le sous-texte social et historique est pourtant intéressant. Dommage qu'un film sur l'oppression sociale ne puisse pas être... plus oppressant justement.

Upgrade de Leigh Whannell

Acteur et scénariste de Saw et les Insidious de James Wan, Leigh Whannell était déjà passé derrière la caméra avec l'oubliable Insidious : Chapitre 3. Ce second long, Upgrade, est en revanche bien plus réussi (presque un petit coup de coeur). Ils'agit d'une sorte de mix entre Robocop, Black Mirror et John Wick. Derrière ce divertissement ultra efficace sans prétention mais pas simpliste pour autant, Upgrade offre une réflexion pertinente (certes pas révolutionnaire mais elle fonctionne comme il faut) sur l'aliénation de l'homme par la technologie. La mise en scène est inspirée, les violentes scènes d'action (jouissives mais sans tomber dans le gag facile) illustrent également bien la séparation entre le corps et l'esprit via la technologie. Servi par un twist bien mené, le film séduit également par son sens esthétique soigné juste comme il le faut (et par conséquent, en évitant de tomber dans une surcharge visuelle). Dans le rôle principal, Logan Marshall-Green (je ne vais pas être originale mais... C'EST LE SOSIE DE TOM HARDY), incarne avec conviction le rôle de cet homme brisé et assoiffé par la vengeance.

Girl de Lukas Dhont

Lauréat de la Caméra d'or et de la Queer Palm au festival de Cannes, Girl est pour moi la grosse déception de ce mois. Ce premier long-métrage du belge Lukas Dhont ne m'a pas réellement convaincue malgré les belles interprétations du danseur Victor Polster et d'Arieh Worthalter. La polémique sur le choix de l'acteur (d'après ce que j'ai compris, l'équipe avait en réalité fait auditionner des filles et des garçons transgenres, Polster, acteur cis, semblait finalement correspondre à ce que recherchait le réalisateur) me semble moins problématique que les choix adoptés par le scénario, certains d'entre eux étant pour moi douteux. Je n'ai jamais eu l'impression que réalisateur maîtrisait réellement son sujet, ce qui peut expliquer la construction bancale de son scénario : il est plat à 95% (dans le sens où le spectateur subit des scènes très répétitives : danses, discussions-disputes avec le papa, rendez-vous chez les toubibs, danses et rebelote). Par conséquent, l'acte final de Lara (je ne vous spoile rien), aurait pu être intéressant pour comprendre ce personnage, mais là il semble sortir de nulle part. Pour ne rien arranger, à l'image de la dernière scène très (trop) énigmatique, qui m'a laissée sur ma faim, Lara est une fille si taiseuse qu'elle en devient parfois antipathique. En comparaison, son père paraît si sympathique et bienveillant que cela n'a fait que renforcer mon impression mitigée sur le personnage principal.

First Man de Damien Chazelle

" Intimiste ", " Immersif ", " du Terrence Malick dans l'air ", bref Chazelle est toujours le petit chouchou des cinéphiles. Ne pensez pas que je trolle le 3/4 de la communauté cinéphile : je dois le reconnaître, Chazelle a du talent. Mais, en dehors de Whiplash (film qui m'épate toujours autant), je n'apprécie finalement pas tant que ça son travail, il y a toujours, bout à bout, des choses qui me chiffonnent dans ses films. Au moins, son précédent long-métrage La La Land ne m'avait pas laissée autant indifférente que First Man, biopic sur Neil Armstrong, le premier homme qui a marché sur la Lune. Non, le fait de connaître la fin (youpi, il réussit sa mission) ni quelques éléments clés de la vie d'Armstrong ne gâchent effectivement pas notre séance (et j'ai même envie de dire que connaître des éléments narratifs d'un film avant de le voir n'est pas pour moi gênant quoiqu'il arrive). En revanche, le film est vraiment trop long (2h20 !) et j'ai failli piquer du nez au milieu du film après d'interminables séquences sur les différents tests que doit passer Neil (survivant parmi tous ces morts qu'on nous énumère tout le long du métrage). La mise en scène est pourtant remarquable (surtout dans sa dernière partie), les acteurs sont également convaincants (même si je ne trouve pas qu'il y ait de quoi s'extasier non plus devant leurs interprétations). Oui, le film est parfois touchant mais j'ai envie de dire que la mort d'un enfant n'est pas quelque chose qui, à l'origine, peut nous laisser indifférent. Mais dans l'ensemble, le film manque pour moi d'émotion, faute également à un Neil Armstrong bien trop taiseux.

The House that Jack Built de Lars Von Trier

Provocateur, sulfureux... Lars Von Trier est surtout un cinéaste talentueux, même si j'ai conscience que son univers peut fortement déplaire à certains spectateurs (et c'est pas une mauvaise chose en soi !). The House that Jack Built, quidétrône enfin mon Hostiles adoré situé à la première place de mon classement annuel depuis des mois, est selon moi l'un des meilleurs films de LVT. En y réfléchissant, je me dis que c'est plutôt fou que j'aime autant ce film car j'aurais pu le trouver hyper-prétentieux : l'exercice de parler de soi et de son cinéma (Jack/Lars... il n'y a qu'un pas entre les deux) à travers un dialogue en s'auto-citant sans complexe, le tout avec un épilogue grandiloquent qui revisite comme il se doit L'Enfer de Dante était très casse-gueule. Mais l'éventuelle dimension narcissique s'efface au profit d'une réflexion puissante sur l'artiste et son oeuvre. L'oeuvre est souvent dérangeante (peut-être aussi parce qu'elle est souvent drôle et ludique) mais même les éléments qui peuvent choquer (même s'il n'y a pas pour moi de quoi quitter la salle, contrairement à ce que j'ai pu lire concernant sa projection à Cannes) s'intègrent logiquement dans le propos final du film. Chaque détail (le 3e cercle ou le découpage en cinq incidents pour ne citer que ces exemples) ne fait que renforcer ce sentiment de pure perfection qui traverse ce long-métrage époustouflant. J'ai déjà hâte de revoir ce chef-d'oeuvre d'inventivité et de pugnacité.

Johnny English contre-attaque de David Kerr

Je ne me souviens pas très bien du deuxième volet de la saga Johnny English, en revanche j'ai toujours eu une véritable sympathie pour le premier volet qui a le mérite de me faire marrer : les comédies pas drôles envahissent nos écrans, on se sent presque obligé de préciser une évidence, à savoir celles qui réussissent à provoquer le rire. Ce troisième volet, Johnny English contre-attaque, a beau être oubliable, il a réussi à me faire rire à plusieurs reprises, on passe un véritable bon moment devant cette comédie qui a un petit côté " old school " et c'est déjà pas si mal. Rowan Atkinson est toujours génial dans le rôle de cet espion boulet, reconverti en prof de géographie (et bizarrement, cette situation est crédible dans l'univers du film !). Les seconds rôles sont également très convaincants, que ce soit Ben Miller (l'acolyte d'English qui tente en vain de le raisonner), Emma Thompson en Premier Ministre ou encore Olga Kurylenko en espionne russe (certainement un clin d'oeil à son rôle de James Bond Girl). Je retiens surtout deux séquences : celle avec Johnny qui danse du disco pendant des heures sans s'épuiser et celle que j'aime nommer " la Ready Player One dans le vrai monde ".

A Star is Born de Bradley Cooper

Pour son premier long-métrage, Bradley Cooper, qui s'est également attribué le premier rôle masculin, ne s'en sort pas si mal malgré mes quelques reproches. Je précise que je n'ai pas vu les précédentes versions (celle-ci est donc la 4e version !), je ne peux pas comparer et quelque part, je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose d'être allée le voir " vierge ". Nous sommes donc face à une histoire très bateau (et qui n'est pas forcément lié à son concept de " remake ") : un célèbre musicien, alcoolique et toxico sur les bords, découvre les talents de chanteuse d'une fille modeste (qui se déroule dans la première partie du film, la meilleure). La jeune femme se transformera en pop star (ou une soupe star) célèbre tandis que l'autre va sombrer dans la pure déchéance (cela se déroule dans la seconde partie - bien plus pénible cette fois-ci). Les longueurs se font souvent sentir, en dehors du titre phare déjà culte Shallows, la bande-originale déçoit, le film s'éternise sur beaucoup de drames (tu ressors de la salle avec une envie de te foutre en l'air). Pourtant, étonnamment, la relation torturée entre Ally et Jackson, qui ne se veut pas romantique mais complexe, séduit : les personnages ont beau être attachants, ils ne sont pas pour autant glorifiés, ils ont leurs failles qui les mènent à ce final émouvant. Surtout, Lady Gaga (pressentie pour l'Oscar - et cela n'aurait rien de honteux) et Bradley Cooper sont tous les deux formidables. L'alchimie palpable entre les deux ainsi que leur sincérité relèvent bien le niveau du long-métrage.

Petite précision de haute importance : Ally devient une pop star qui chante des titres assez nazes même si elle cartonne. Or j'ai toujours eu apprécié Lady Gaga qui est pour moi une véritable artiste, et ce film aura peut-être le mérite de prouver à ses détracteurs ses différents talents.

RBG de Betsy West et Julie Cohen

Avant de vous précipiter en janvier 2019 devant On the Basis on Sex ( Une femme d'exception) de Mimi Leder (Lady Gaga a beau être la favorite aux Oscars, n'ignorons pas Felicity Jones pour remporter l'Oscar), par pitié, débrouillez-vous pour regarder RBG. Je croise les doigts pour qu'il remporte l'Oscar du meilleur documentaire, ce prix serait tellement mérité ! Betsy West et Julie Cohen signent un film passionnant sur Ruth Bader Ginsburg, avocate puis juge à la Cour Suprême depuis 1993, qui a changé la vie des femmes aux Etats-Unis. L'exercice est périlleux dans le sens où on aurait pu tomber dans une retranscription biographique plate, en plus la mise en scène ne se veut pas inventive. Pourtant, son mélange de sobriété, de simplicité et de légèreté rend ce documentaire captivant. Sans chichis, il sait absolument viser juste, à l'image des plaidoyers de RBG. Le long-métrage trouve également un bel équilibre entre les sphères privées et professionnelles, tout comme il réussit aussi à mêler les différents procédés de narration (documents d'archives, témoignages de RBG elle-même, de ses proches, d'étudiants en droit etc...) sans s'éparpiller. Surtout, au-delà d'un résultat prenant, rythmé, bien documenté, la personnalité de Ruth Bader Ginsburg est si exceptionnelle et attachante qu'on ne peut être que happé par ce film qui aborde intelligemment la lutte pour l'égalité entre les sexes.

Halloween de David Gordon Green

Je bouffe (un peu) du Halloween depuis quelque temps. J'ai découvert récemment les deux Halloween réalisés par Rob Zombie qui méritent d'être vus et estimés. Le jour J, sublimement déguisée en sorcière, j'en ai profité pour revoir sur grand écran le film culte de John Carpenter qui sait toujours me foutre les chocottes à partir pourtant d'un postulat simple (et efficace). Enfin, j'ai également regardé Halloween II réalisé par Rick Rosenthal qui est plutôt intéressant même s'il est très en-dessous du premier opus (scénarisé par Carpenter et Debra Hill). Bref, tous ces visionnages ne m'ont fait que confirmer mon avis plutôt négatif sur le Halloween 2018 par David Gordon Green (réalisateur qui touche à tous les genres depuis des années) : certes, quelques séquences sont plutôt réussies dans le sens où la tension est tout de même présente, avec parfois des idées de mise en scène, le travail est également propre, l'ensemble reste un divertissement tout à fait correct, notamment par rapport à son genre. Mais en fait, plusieurs choses me chiffonnent : je ne supporte plus ces concepts de film qui effacent des pans entiers de saga, la démarche terriblement malhonnête et même prétentieuse. Surtout pour pour proposer un film ni original ni cohérent par rapport au Halloween de Carpenter, qui sous-exploite complètement ses personnages, avec une affichage girl power familial vraiment lourdingue.


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