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Pour quelle cause vous vous battez ?

Publié le 28 décembre 2018 par Le Journal De Personne
Pour ne pas finir comme un sot ou tout recommencer comme une sotte, j'ai tout jeté par dessus bord, excepté les livres d'Aristote.

À cause de sa théorie des quatre causes sur laquelle je me repose.

Je vais tenter de vous rendre sensible la chose. Quitte à assimiler ma névrose à une vie en rose.

Je me mets dans la peau d'un sculpteur. Difficile métier à l'heure qu'il est où nul n'est en mesure de nous dire, il est quelle heure.

Ça y est : je suis votre sculpteur. De quoi ai-je besoin pour accomplir mon destin ?

Primo : d'avoir au moins une idée de ce que je m'en vais sculpter : ce que je désire mettre en forme, le sujet ou l'objet que je m'apprête à réaliser... c'est ce que Aristote appelle : la cause formelle pour nous informer.

C'est la réponse à la question : qu'est-ce que c'est ? Un bateau, un château ou un chameau ?

J'ai envie de sculpter une femme. Peut-être parce que je n'ai pas réussi à concevoir de meilleur objet.

Secundo : mais malheureusement mon idée ne peut recevoir la lumière que si et seulement si je dispose de la matière.

Avec quoi je vais pouvoir réaliser mon contrat. Concrétiser mon idée ?

La cause matérielle dira Aristote qui va me permettre de produire mon effet ou sculpter mon fameux objet. Comme quoi même pour un artiste l'argent n'est pas contingent, mais nécessaire. L'esprit a besoin de matière : c'est élémentaire.

Étant pauvre comme job, j'ai emprunté à mon voisin radin un peu d'argile pour donner vie à mon envie.

Tertio : je dispose déjà de deux causes, de deux choses mais il me manque une troisième sans laquelle ma sculpture ne verra jamais le jour : c'est le travail du sculpteur qu'Aristote nomme la cause efficiente ( ou cause motrice).

C'est un acte, une activité. Les plus prétentieux diront une création.

Pour demeurer humble, disons : une transformation ; l'action ou la passion qui donne une forme à la matière. La main ouvrière souvent assimilée un don créateur. Puisqu'il s'agit de l'auteur, du sculpteur suffisamment habile pour faire avec de l'argile une statue de femme. Ce n'est pas quelque chose, mais quelqu'un.

Songez à Rodin... au penseur de Rodin.

Quatro : mais ce n'est pas fini s'écrie Aristote, il vous manque la fin pour assouvir votre faim. Il s'agit de la dernière cause : la cause finale qui répond à la question : dans quel but et pour quelle fin ?

Je m'apprête à sculpter "la femme". Pour quoi faire ? Pour remporter un pari ? Pour prouver mon talent ? Pour l'exposer dans un musée ? Pour gagner ma vie ?

Ou parce que je n'ai rien d'autre à faire ? Point final.

PS : Il y a, paraît-il, une cinquième cause muette ou plus discrète... mais je n'en parlerai qu'en présence de mon avocat.


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