Une année musicale qui commence avec un nouveau disque de Deerhunter ne peut être mauvaise. C'est par ce genre de phrases un peu ridicules qu'on se persuade que le futur sera meilleur, forcément. Parce que le présent est décevant, toujours, souvent plus même que le passé. "Why hasn't everything already disappeared?", "What Happens to People?" se demande d'ailleurs Bradford Cox et sa bande. Comment rester positif et optimiste à notre époque où nous savons notre planète en danger et nos politiques irresponsables ou impuissants pour y faire face, nos démocraties obsolètes et étriquées, le système financier injuste et inégalitaire ? Deerhunter, c'est aussi le titre original du film culte de Michael Cimino, "Voyage au bout de l'enfer", tout un symbole. Le problème de l'humanité, de la vie même, est-il donc insoluble ? Pourtant, la musique des américains d'Atlanta n'a jamais été aussi pop et ouverte, dans la continuité du précédent "Fading Frontier", délaissant définitivement les guitares lacérées et stridentes d'un "Monomania" par exemple au profit de mélodies immédiates tels les impeccables "No One's Sleeping", "Element" ou "Futurism". Que le misanthrope Bradford Cox soit un des plus brillants songwriters américains de ces quinze dernières années est une évidence, le gars semble incapable de faire un mauvais disque - avec une préférence pour la trilogie "Microcastle/Halcyon Digest/Monomania". Pourquoi tout n'a pas déjà disparu ? Parce qu'il reste au moins les disques de Deerhunter a-t-on envie de lui répondre.