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La drague, on faisait comment avant ?

Par Marine @Rmlhistoire

La drague est un phénomène important et fort agréable lorsqu’il est consenti par tous les protagonistes de l’histoire. C’est à dire qu’un mec lourdingue qui te manifeste un grand intérêt dans le métro sans que tu n’aies rien demandé et que tu en as rien à cirer, c’est pas de la drague.

La séduction prend des formes différentes selon les siècles, les cultures et les conventions sociales et je vous les dévoile aujourd’hui dans cet article.Pour des raisons de sources, il s’agit ici de la drague hétérosexuelle mais dans un prochain article, je tenterai de trouver les lieux et pratiques longtemps clandestines pour les amours du même sexe. Cet article est illustré par Anna R.

L’antiquité, ou la drague pêche à la femme-poisson

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Ce n’est pas pour rien si durant l’antiquité, les hommes parlaient de partir à la pêche pour évoquer le fait de draguer différentes femmes. Tout d’abord, en latin « amare » qui signifie « aimer » et très proche de « hamare » qui veut dire « prendre avec un hameçon ». Pêcher donc. Mais on se rend compte rapidement,que la femme n’a pas son mot à dire, telle une dorade filant dans les courants, elle se retrouve prise au piège du hameçon. La femme qu’on prend pour épouse n’a pas besoin d’avoir envie de son époux. Son consentement est tout aussi entendu que celui du poisson qui mord à l’hameçon. Le mariage est une histoire d’hommes.

Et la séduction aussi, car c’est auprès des prostituées, des femmes libres étrangères ou des esclaves (finalement les seules femmes qui peuvent refuser leurs avances) que les romains jouent la carte de la drague et de la séduction. Lorsqu’un homme veut faire remarquer qu’une femme lui plaît, il peut tenter quelques œillades et lui faire du pied. Ovide raconte dans son ouvrage « L’art d’aimer » que les Romains invitent les femmes qu’ils veulent séduire dans les théâtres et les cirques. Avec l’espoir de les voir chouiner devant des tragédies afin de les réconforter. Dans ce même bouquin, Ovide conseille aux hommes de faire boire les femmes pour leur ôter la notion de consentement…

« Lors donc que tu seras assis à un festin embelli des dons de Bacchus, et qu’une femme aura pris place auprès de toi sur le même lit, prie ce dieu (…) de garantir son cerveau des vapeurs nuisibles du vin. C’est là que tu pourras, à mots couverts, adresser à ta belle de tendres discours, dont sans peine elle devinera le sens. »

On est bien rendu avec des conseils pareils… D’autant qu’Ovide va être lu jusqu’au Moyen-Age, ses textes vont être compilés et certains dotés d’enluminures comme on peut le voir sur Gallica. Pour plus d’info sur le mec castré qui mange des enfants c’est là.

En contrepartie, les femmes qui acceptent les avances des hommes, et veulent les mettre dans leur lit, s’aspergent de sueur de gladiateur. La transpi se vend à prix d’or. Les apothicaires se ruent sur les vainqueurs pour recueillir les gouttes de sueur qu’ils mélangent à de l’huile d’olive pour créer la « stimento », une potion aphrodisiaque…

L’amour codifié du Moyen-Age

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Au Moyen-Age, l’homme a deux possibilités. Draguer une femme d’un rang inférieur, ou tenter de séduire une femme de rang supérieur. Pour ce qui est de la première possibilité, c’est la plus simple et la moins contraignante, il suffit de la kidnapper… Le mec arrive chez le père de la meuf qu’il convoite, il la prend sur son cheval et s’en va. Alors, c’est peut être pas toujours aussi cavalier (tu l’as?), mais on fait pas dans le chichi. En revanche, dans la littérature médiévale, lorsqu’il s’agit de convoiter une femme de rang supérieur, c’est un autre délire qu’on appelle l’amour courtois et ça demande des heures et des heures et des heures de travail. C’est pour les vrais forceurs. Et la séduction est codifiée par des règles bien précises qui placent le mec dans des situations peu faciles. Il doit jouer le rôle de l’amoureux véritablement bouleversé par l’amour, il ne mange plus, ne dort plus, il passe son temps à penser à sa douce de manière secrète. Personne ne doit le savoir. D’autant que la femme est le plus souvent l’épouse d’une autre. N’oublions pas que l’amour n’est pas important pour le mariage qui caractérise plus une alliance économique et politique qu’une preuve d’amour. En réalité, tout n’est pas aussi compliqué que l’amour courtois, mais les hommes doivent quand même prouver leur amour et pour ça, il n’y a rien de tel que passer une fois, deux fois, trois fois, dix fois, 150 fois dans la rue de sa belle dans le but de se faire remarquer. Autre technique de drague, la sérénade aux balcons es utilisée aux derniers siècles du Moyen-Age et à la Renaissance ensuite, on laisse la place à l’art de la galanterie.

De la galanterie au libertinage, l’évolution des techniques de drague

Il est toujours délicat de distinguer la galanterie de la politesse, en général les faits sont les mêmes mais ce sont les intentions qui différent. Un homme qui ne ferme pas la porte au nez d’une femme ou d’un homme c’est de la politesse, s’il y a intention de se faire remarquer ou de séduire, c’est de la galanterie. A une époque où les règles de politesse étaient assez restreintes, il était question de galanterie lorsqu’un bonhomme décide de céder un siège à une personne, ou qu’il porte son bagage.

C’est aussi à cette époque que la drague psychologique se développe à base de lettres d’amour enflammées. L’homme doit connaître les goûts de sa prétendante, ils doit s’intéresser à elle, conquérir son cœur avant son corps.

En ce point, la femme (car il est plus généralement question de relations hétérosexuelles) est un peu plus considérée que lors des siècles précédents.

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En Irlande et au Pays de Galle, il existe au XVIIème siècle une pratique tout à fait particulière pour prouver ses intentions louables. Lorsque les parents de deux adolescents ou jeunes adultes sont d’accords, une fille peut inviter son prétendant à dormir chez ses parents, c’est alors que la mère empaquette sa fille dans un sac épais alors que le mec est couché et bordé dans le lit partagé en deux par une place mise en place par le père. La jeune fille (toujours dans son sac) se couche alors de l’autre coté de la planche. Si les intentions des jeunes subsistent après une telle nuit de drague d’angoisse, alors c’est qu’ils sont prêts à se marier… car n’ayant (presque) pas l’occasion de se toucher, ils peuvent discuter et se séduire par la tête et non par le corps. Malheureusement, de cette pratique sont nés plusieurs bâtards, c’est pourquoi l’Église a fini par l’interdire. 

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Si la drague se développe autant à cette époque, c’est que les mariages arrangés tendent à disparaître et si la femme n’a pas encore tout à fait son mot à dire, les hommes qui souhaitent épouser des femmes qui ne les désirent pas se font moins nombreux. Et ils font tout pour attirer l’attention et sortir du lot afin qu’on puisse les choisir et les lieux de drague aussi évoluent Mais attention, ne parlons pas de liberté pour les femmes. Seules quelques une, de la haute société, se permettent de refuser le mariage et de collectionner les amants de manière officielle. C’est ce qu’on appelle alors le libertinage. Si aujourd’hui on définit souvent de libertin une personne qui s’affranchit des normes sociales en matière de sexualité, au XVIIème siècle, il s’agit de personnes qui se libèrent de la religion en général, et donc du sacro-saint lien du mariage. On peut donc niquer sans être marié. L’amour se fait donc à base d’intrigues, on se cache dans les boudoirs, on se palpe la cuisse au théâtre, on se trousse à l’ombre d’un arbre.

Quand la valse nous renverse, la séduction aux XVIII et XIXème siècles

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Le XVIIIème siècle est celui des bals publics. A paris, le plus célèbre est le bal de l’Opéra, on s’y retrouve jusqu’à trois fois par semaine. Le jeudi, samedi et dimanche on peut danser de 11h à 7h du matin, ça brasse du monde, ça picole un peu et ça danse collé-serré. Enfin, un peu. C’est le siècle de la valse, on se saisit les mains, une main sur les hanches ou l’épaule et on laisse parler les corps. Lorsqu’on se plaît, on se donne rendez-vous la semaine d’après, puis le lendemain, on fini par envoyer un mot par la poste, un parfum, une invitation à aller au théâtre ou à s’aimer. C’est romantique. Lorsqu’il fait trop chaud, on sort l’éventail et on joue des lames pour draguer… trois lames devant les lèvres est une déclaration d’amour, se frapper la main gauche de son éventail est une invitation à l’amour, en compter les lames est une invitation à la conversation…  Mais tout le monde ne parvient pas à conclure en une ou deux soirées de danse ou un éventail, ce serait trop beau. C’est alors que les premiers sites de rencontres apparaissent… A quelque chose près. On envoie une annonce dans les journaux, le chasseur français notamment. Ça marche plutot bien lorsqu’on connaît le jargon.

Une femme dite « sans tâche » est une femme qui n’a pas eu d’enfant illégitime.

Quand les codes changent…

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A partir du Xxème siècle, les femmes vont parvenir à se libérer et à obtenir une part d’indépendance. Comme vous le savez, c’est très progressif et encore aujourd’hui, une fille est facile lorsqu’un homme est un Don Juan.. Après la Seconde Guerre Mondiale, les femmes refusent d’épouser les hommes qu’elles n’aiment pas, l’âge du mariage tend à augmenter et la virginité n’est plus un critère important pour épouser une femme. A partir des années 1980, les hommes ont l’impression de perdre le contrôle face à ses femmes qui osent draguer, qui revendiquent leur sexualité et ne veulent plus qu’on décident pour elle. C’est pourquoi les coach en séduction vont faire leur apparition, notamment aux États-Unis avec Ross Jeffries. Le mec donne des conseils aux hommes pour être dans de bonnes conditions de drague : Le séducteur doit méditer.

Selon wikipedia :

  1. Il doit ruminer délibérément en vue de nommer le ou les symptômes qui le taraudent.
  2. Et ce faisant, il choisit de se concentrer sur l’un des scénarios jouant en boucle dans sa tête, pour le ressentir et non l’analyser rationnellement. Ainsi parvient-on à démêler le sentiment des jugements mentaux, chose qui, autrement, serait à la source d’énormément de souffrance.
  3. Une fois que le sentiment est ainsi démêlé, le séducteur doit le «transmuer» en énergie positive.
  4. Le séducteur doit s’imaginer entouré de cette énergie positive.

C’est également à cette époque que le speed-dating puis les sites et applications se développent et s’intègrent parfaitement dans la société. Nous sommes en droit de nous demander quels seront les rapports de séduction d’ici les 100 prochaines années… Des idées ?

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