Alix Riemer nous invite à rencontrer Susan Sontag. Et, à travers elle, c’est aussi Alix que nous rencontrons. Car l’actrice est à la fois le personnage et elle-même. Toute la première partie du spectacle nous fait témoins de cette découverte et de la relation qui s’ensuit. L’interview de Susan Sontag publié dans le magazine Rolling Stone (et dans un livre intitulé Tout et rien d’autre) mène à la lecture des journaux intimes de Susan. Et Alix se met à faire des listes, à écrire des mots sur des post-it, à s’inscrire dans un décor dépouillé : un canapé convertible, une loge en fond de scène côté cour, côté jardin un dispositif technique de projection où est installé Quentin Vigier, des néons blancs ou rouges, des projections sur le mur côté cour (photographies) et en fond de scène (vidéos). Ce décor évoque à la fois l’intimité des journaux et l’élaboration d’une pensée, qu’il s’agisse de celle de Susan Sontag ou de celle d’Alix Riemer. Pensée qui prend effectivement naissance dans les années 70 et qui rencontre un écho chez la jeune femme d’aujourd’hui. L’actrice est au milieu du chemin, aux prises avec des textes écrits par Susan entre ses 16 et 45 ans. Elle, âgée tout juste de 31 ans, s’en saisit, s’y coltine, les empoigne et disparaît, laissant un instant la place au fils de Susan Sontag grâce à qui nous avons accès à ces journaux et qui a agi, comme l’aurait fait un photographe, en révélateur.
Ce moment dans le spectacle est extrêmement émouvant. Il rend possible la suite : l’actrice est désormais le personnage, s’exprimant en anglais (surtitré) d’une voix aux intonations différentes, rendant possible la parole à propos de la maladie, à propos de la nécessaire égalité des femmes et des hommes au niveau du pouvoir, à propos de la pensée vivante et de la vie pensée.
J'ai vu ce spectacle au Théâtre-Studio d'Alfortville, où il est présenté du 13 au 30 mars 2019, du mercredi au samedi.