Alice a tué Célia, sa jumelle.
Son reflet, un alter ego inversé dont elle enviait la vie de rêve. Alors que, célibataire, elle doit gagner sa vie en enseignant la philosophie, sa jumelle, épouse et mère comblée, mène l'existence oisive des riches, dans le luxe et un magnifique cadre de vie au bord de la mer. Mais la mort de Célia va permettre à Alice de prendre sa place.
Du moins le croit-elle. Car au " pays des merveilles ", ce n'est pas le bonheur mais le désenchantement qui l'attend.
La vie d'Alice de l'autre côté du miroir va tourner au cauchemar... jusqu'à lui faire réaliser, mais un peu tard, que le beau miroir était celui des alouettes...
Ce roman a réussi à me faire passer par toute une palette de sentiment allant de l'incrédulité de ce que va découvrir l'héroïne, à la stupeur puis à la rage de ce qu'elle va endurer et de ce qu'a enduré sa jumelle.
Le récit commence de manière brutale et tragique puisqu'il s'ouvre sur la mort de Célia tuée par sa sœur jumelle enferrée dans sa rage sa jalousie. Alice a toujours envié sa sœur et c'est sans scrupule qu'elle prendra sa place. Elle n' a pas une once de remords pour ce qu'elle vient de commettre, enfin si elle en a au début, elle l'étouffe vite. À partir de ce moment Alice, et nous lecteurs, allons découvrir la vérité sur une vie qui finalement n'a rien d'enviable.
Je dois avouer que je suis tombée des nues, et tout comme Alice, j'ai été sidérée parce qu'a enduré sa sœur jumelle. Et quand on voit comment sa vie se termine.
Le roman est très bien construit, Alice pense échapper à une vie qu'elle ne souffrait plus en peinture (ce qu'elle croit) pour se glisser dans la peau de sa jumelle, et ce, sans aucun remords. Finalement, elle va se retrouver prise au piège d'un mariage raté et peu enviable à bien des égards. Célia souffrait et Alice, trop engluée dans sa jalousie maladive n'a pas vu qu'elle n'allait pas bien. Jamais des jumelles n'ont autant été autant ennemies et c'est la réalité d'une vie sordide avec des rebondissements tout aussi accablants les uns que les autres qui les rapprocheront. Un dénouement pour les jumelles qui permettra enfin à Alice de réaliser la portée de ses gestes, de l'horreur de la situation. Je n'ai pas d'autre mot que celui-ci : affreux. Ce que Célia a dû endurer durant des années, devoir tout garder en elle, car elle se sentait rabaissée, inférieure aux autres et pire que tout : inférieure à sa sœur jumelle. Quant à Alice, elle pensait que sa sœur avait la belle vie, elle en rêvait. Après tout, leur mère ne lui a-t-elle pas rabâché durant toute son existence qu'elle n'était qu'une ratée comparée à sa sœur parfaite ?
Finalement, elles n'étaient toutes les deux que la moitié d'un tout, la face cachée d'une même pièce.
Au-delà de la réflexion et de la partie psychologique très intéressante, ce qui m'a fasciné, ce sont les comportements, animaux et brutaux des personnages vis à vis de Célia. Que ce soit son mari (un véritable salaud, désolée, j'ai des mots plus forts encore, mais je m'abstiendrai, pour un sous-homme pareil) qui la rabaisse continuellement ou bien même sa belle-mère ou belle-sœur, sans parler de leurs amis... Cela en deviendrait presque caricatural. Je dois dire que j'ai eu mal à mon féminisme.
Je suis ressortie de cette lecture aussi furieuse que chamboulée, car le dénouement de l'histoire... est amer ! J'aurais aimé que le mari paie pour toutes les horreurs qu'il fait subir à son épouse. Étrangement, Alice qui a quand même tué sa sœur, eh bien, j'ai eu de l'attachement pour elle. J'aurais aimé une autre fin, bien que je sache que cela est impossible. Ce qu'elle a fait est impardonnable et Célia ne sera jamais vengée en quelque sorte. J'ai détesté la plupart des personnages secondaires, car ils sont détestables : le mari, sa famille, ses amis, sa maîtresse, la mère d'Alice et Célia. Finalement, les personnages les plus naïfs sont ceux qui souffrent le plus ici.
Sans mon ombre de Edmonde Permingeat est un très bon roman psychologique. Le suspense y est bien dosé, les révélations et rebondissements vont crescendo et cette impression de malaise qui nous colle à la peau perdure bien après la fin de notre lecture. J'ai adoré être malmenée, j'ai adoré haïr avec une telle force l'entourage de Célia et j'ai aimé et détesté Alice. Bref, pari réussi pour l'autrice.
22€