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Fragments de nuit, inutiles et mal écrits (saison 2) : 13-14-15

Par Blackout @blackoutedition

Fragments de nuit, inutiles et mal écrits (saison 2) : 13-14-15

Photo de Simon Woolf

Pour le livre de Richard Palachak, "Kalache", c'est par ici : KALACHE


Pour le livre de Richard Palachak, "Vodka Mafia", c'est par la : VODKA MAFIA

Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 13

Vous pensez à tort que le gamin compte faire raquer des poivrots pour qu'ils cognent sur Ondro. Mais il faudrait au moins cinquante taquets par soirée s'il voulait atteindre les sommes gagnées grâce aux combats. Sans compter la part des vory, le manque de discrétion de l'affaire, et sa mère qui jetterait feu et flamme en voyant son fils avec une tronche de pizza. Le jeu n'en vaut pas la chandelle. Non, le trouduc a une toute autre idée en tête, inspirée des « escape games » à la mode, ces fameux jeux de rôle en décor réel où les participants doivent s'échapper d'une chambre close en résolvant des énigmes et en trouvant des clés. Sauf que l'imaginaire boueux de l'ado pousse le bouchon bien plus loin. Au lendemain du coup de poing à dix balles, il se rend chez Nika, son voisin géorgien, pour lui faire part de son projet : - Je veux créer un jeu de rôle pour gens friqués. Sur les rives du Danube, on construit une pièce au fond d'un hangar et on y installe du mobilier à deux balles, mis là pour être défoncé : table, chaises, téloche, loupiotes, étagères, bibelots... - OK, continue. - Voilà pour le décor. En ce qui concerne le scénar, mon frère jouera le rôle du tortionnaire et moi celui de l'otage infantile ligoté dans un coin. On munie le joueur d'une arme idéale pour la casse : batte de base-ball, matraque télescopique ou tonfa. Puis la partie démarre et dure une vingtaine de minutes. L'objectif est de défoncer la porte, dérouiller le vilain preneur d'otage, mettre en pièces l'intérieur de son antre diabolique à grands coups de burin, puis libérer l'enfant et se faire la malle avec.

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- Pas mal ton idée. On pourrait même charger le joueur d'installer des explosifs et de tout faire péter, juste après que ton frère se soit tiré en loucedé... genre par une porte dissimulée derrière un placard. - Ouais mais faudrait tout reconstruire à chaque fois. - Quatre cloisons en placo, deux portes premier prix, du mobilier volé ou de récup'... Ça ira pas chercher loin en investissement. Par contre, ce genre de partie devra se payer cher pour qu'elle rapporte. - Oui mais l'offre ratisse large. Imagine le nombre de couillons qui ont du pognon et qui sont en quête d'adrénaline. - Oui, les sensations fortes... C'est bien, ça... Par contre, l'idée du gamin pris en otage ne me plaît pas. Ça pourrait nous causer des problèmes, surtout si on se fait gauler. J'préfère recruter une meuf pour ce taf, genre canon. - Sexy... - Et majeure bien évidemment, avec un contrat d'embauche tout ce qu'il y a de plus légal. - C'est sûr que la meuf, ça va exciter nos clients. - Imagine un peu la scène, Pet'o. On les fait arriver en Jeep jusqu'au hangar et on les conduit dans un vestiaire où ils enfilent l'équipement d'un agent des forces spéciales : casque, gilet par balles et tout le toutim. Puis on leur montre des clichés de la meuf à sauver. Ha ! C'est l'érection assurée. - On appellera ce jeu « Golgotha » ! - Pourquoi ? - J'sais pas, je trouve que ça fait cool ! Et tu penses qu'on pourrait faire raquer combien pour une partie ? - Je dirais mille cinq cents. Deux cent cinquante pour toi et ton frère, deux cent cinquante pour la fille, et le reste pour reconstruire la pièce. - Et les vory ? - On prendra le reste du reste.

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Avec sa part, Pet'o aura largement de quoi régler les cinq litres de bière quotidiens de son frangin. Puis si Ondro se protège bien le visage, les tannées subies passeront inaperçues aux yeux de ses parents. Pour résumer, il se fera un max de thune en prenant un minimum de risque, et il montera sacrément dans l'estime de la mafia locale. Avec ce coup-là, si ça fonctionne, il deviendra le plus jeune « voleur dans la loi » de l'Histoire et se fera tatouer des billets de banque en nœud papillon sous la gorge, signe des vory placés aux affaires financières. Reste plus qu'à trouver le hangar, gérer la logistique et recruter la poupée slave. Nika et ses hommes pourraient s'en occuper sans lui, mais le gamin tient à garder un droit de regard sur la création de sa propre entreprise... qui ne pourrait fonctionner sans son frère... et qui ne pourrait donc exister sans lui.

Richard Palachak

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