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Avignon 2019 – Ventre : une œuvre intimiste et audacieuse sur l’urgence d’aimer

Publié le 12 juillet 2019 par Linfotoutcourt

Ventre est un huis-clos dans lequel un jeune couple au bord de la rupture se laisse peu à peu dominer par une envie de vivre féroce.

Avant même que la pièce ne débute, nous étions déjà troublés par la scénographie de Ventre. Par cette baignoire, posée au centre d'un appartement en travaux sur le sol duquel se déploient de grandes bâches de protection. Puis les corps ont pris place dans cette composition pour habiter un texte hors-norme et puissant dans lequel un couple en perdition tente de remonter à la surface de leur amour.

De la matière brute

Ventre est une création qui bouscule, secoue. Qui nous a apprivoisés lentement. Car nous avons eu un peu de mal, c'est vrai, à pénétrer l'univers de ce couple au bord de la rupture. De cet homme qui se glisse tout habillé dans un bain glacé, et de cette femme révoltée. Puis nous avons touché du doigt toute la poésie de l'œuvre de Steve Gagnon, sublimée par la mise en scène soignée de Vincent Goethals. Le discours est franc, sans fioritures. Le texte est brutal, il ne contourne rien, ni le désespoir, ni la rage, ni le manque, ni le désir. ll capte l'essence de l'émotion et la fait jaillir férocement. L'interprétation de Julie Sommervogel et Clément Goethals est épatante, presque animale. Ils habitent le texte avec une intensité et une justesse qui nous a laissés sans voix.

Impudique mais jamais vulgaire

Elle l'a trompé, il est sous le choc, mais elle refuse de se résigner, de renoncer à sa peau. Alors, pataugeant au beau milieu de leurs regrets, de leur tristesse, de leurs peurs, des braises de leur amour, ces deux idéalistes finissent par s'en remettre à leurs corps, à leurs mains qui, elles, connaissent le chemin. L'espace d'une scène, nous observons leurs corps nus se mouvoir, se réunir, s'entrelacer. La chorégraphie de leur corps est à la fois intense et tendre ; les mouvements délicats permettent de ne jamais dévoiler la part la plus intime de leur être. Nous avons été surpris par la beauté et la sensualité de cette scène en particulier, même si la pièce toute entière est rendue esthétique par les jeux de lumière et l'univers sonore qui viennent prolonger la musicalité du texte aux accents québécois.

L'urgence de vivre et d'aimer

Cette pièce ne se contente pas de nous exposer les états d'âme d'un couple à la dérive. En effet, la crise qu'il traverse témoigne d'une envie de vivre sans concession. D'un désir furieux de ne pas se laisser entraîner par la tiédeur et la paresse du quotidien qui endort les corps. De ne pas sombrer dans le confort de la facilité. D'embrasser une vie riche, intense, dévorante, qu'importent les règles, les attentes, les normes. De ne pas plier sous le poids écrasant de la société de consommation et de son insatiabilité. Des tirades aux accents poétiques se glissent parfois au milieu de leurs échanges et amènent à de longues réflexions sur l'infidélité, l'érosion des sentiments amoureux, la quête de soi. C'est fort, intense, violent, et ça ne peut laisser indifférent.

Ventre, de Steve Gagnon, avec Julie Sommervogel et Clément Goethals, mise en scène par Vincent Goethals, se joue au Théâtre Présence Pasteur, à Avignon, du 05 au 27 juillet à 20h10. Relâche les 8, 15 et 22.

Retrouvez tous nos articles consacrés au Festival Off d'Avignon ici.

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