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Les Indes Galantes dyonisiaques de Cogitore

Publié le 29 septembre 2019 par Popov

C’est un tsunami fait de hip hop, d’electro, ou encore de voguing, en bref de transes et de trans, de performances capillaires, de chants joyeux sur fond de méditation philosophique sur l’altérité , l’étranger, le « bon sauvage » du 18ème , notre « semblable mais autre ». Sujet d’actualité . Quelle meilleure réponse à la question sur l’immigration que celle de Clément Cogitore et Bintou Dembele la chorégraphe d’origine camerounaise ? Ils ont fait parler la poudre et dompté les gesticulations urbaines des pépites de banlieue avec une rigueur impressionnante. Le jeune cinéaste et plasticien, la chorégraphe des ghettos de LA ou New York ont mis dans un shaker la poussière accumulée des prétentions précédentes pour secouer l’opéra Bastille des énergies d’aujourd’hui, des cultures dites urbaines et qui pourraient bien être les cultures vivantes du spectacle d’aujourd’hui. Ce n’est pas un choc de civilisation qui brûle aujourd’hui les planches de l’opéra Bastille mais comme une résurgence tellurique d’une culture nouvelle (au sens où le blues ou le jazz ont pu être des cultures nouvelles) et d’une culture antique réunies. Un spectacle total, à sa façon. Côté ballet, c’est l’émanation des arts primitifs de la rue (avec leur développement d’aujourd’hui comme le krump, le waacking, le popping) émanations de ceux qui n’ont rien sinon leur corps pour exprimer une affirmation de la vie dans les ténèbres de la misère ou du rejet dans les milieux interlopes. C’est nietzchéen en diable et c’est la musique de Rameau, une musique du 18ème siècle précieuse et raffinée, appolinienne assise sur un chœur fervent(Chambre de Namur) qui donne la mesure du feu de cette cure de jouvence. Le directeur de l’opéra Stéphane Lissner peut se féliciter. A l’approche de sa retraite annoncée il atteint le nirvana de la modernité non feinte. Les Indes Galantes avaient connu des fortunes diverses depuis sa création en …1735. Gardons les bons souvenirs comme cette mise en scène qui donna carte blanche à cinq grands décorateurs ou plus récemment l’étonnante chorégraphie de Blanca Li avec Patricia Petitbon dans le rôle titre. Cette œuvre que le public du 18ème chantait à tue tête retrouve ici l’éclat du grand divertissement. L’enthousiasme des danseurs jeunes et des solistes merveilleux (de Florian Sampay à Julie Fuchs) ont donné lieu des ovations interminables et fédératrices dignes de la coupe du monde de football. Du jamais vu côté plateau ni côté public où le vieux et guindé public bourgeois de l’opéra s’est lâché comme s’il avait vu un transsexuel transylvanien !


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