Connaissez-vous l'origine de son nom ? C'est en raison de mille pieds de lilas qui ont été plantés en 1847 par François Bullier, un ancien serveur du bal voisin de la Grande Chaumière, qui avait racheté un établissement où il fit aménager des salles en style mauresque. Le soir les jardins étaient éclairés par des globes fonctionnant au gaz, ce qui était très moderne pour l'époque. Mais le propriétaire voulant lui donner son propre nom, abandonna le terme de la Closerie des Lilas pour celui de Bal Bullier.
Désormais disponible, cette dénomination fut reprise (avec l'accord de la famille Bullier) par le propriétaire du modeste café de quartier installé sur le trottoir d'en face. L'endroit fut vite à la mode et attira une nouvelle clientèle d'artistes et d'écrivains comme Alain Fournier, Francis Carco, Roland Dorgelès, Picasso et le couple Delaunay.
Ce furent ensuite Gertrude Stein et Ernest Hemingway, qui à l'époque habite rue Notre-Dame-des-Champs. Il mentionnera à plusieurs reprises la Closerie dans son Paris est une fête. C'est là qu'il écrivit Le soleil se lève aussi. Il y fut souvent rejoint par son compatriote Scott Fitzgerald, qui devint son ami et qui lui fera lire ici le manuscrit de Gatsby le Magnifique. Le cinéaste Robert Enrico y tourna la scène de son film Le vieux fusil (sorti en 1975) dans laquelle Romy Schneider et Philippe Noiret se retrouvent pour la première fois à la table d'un restaurant.
Amedeo Modigliani, André Breton, Louis Aragon, Kees van Dongen, Jean-Paul Sartre, Paul Verlaine André Gide, Paul Éluard, Oscar Wilde, Samuel Beckett, Man Ray, ou, plus récemment, Jean-Edern Hallier, ont également fréquenté La Closerie des Lilas.
Renaud fit l'éloge du bar dans sa chanson À la Close, tirée de son album Rouge Sang. Il fréquenta beaucoup l'établissement pendant sa dépression et il y rencontra sa future épouse, Romane Serda. Il aimait s'installaer à la première table, à gauche en entrant, mais aucune plaque commémorative ne la signale. Certains clients demandent à réserver une des tables occupées autrefois par des personnes illustres coté restaurant, coté brasserie, ou coté bar, où Hemingway écrivait debout.Plus près de nous, depuis 2006, un jury s'y réunit chaque année pour décerner le Prix du livre incorrect. Depuis 2007 le Prix de la Closerie des Lilas couronne une romancière de langue française dont l’ouvrage paraît à la rentrée de janvier. Le jury permanent est composé des six co-fondatrices : Emmanuelle de Boysson, Carole Chrétiennot, Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Stéphanie Janicot, Jessica Nelson et Tatiana de Rosnay. La tradition artistique et littéraire du fameux restaurant n'est pas près de s'éteindre. Pourtant l'endroit a conservé une atmosphère quasi campagnarde.
Je me souvenais des sièges en damier de velours vert, des lustres de pâte de verre, de l'immense véranda donnant sur le boulevard. Posée sur le piano, la sculpture d'Étienne Pirot, dit Étienne, un sculpteur français né à Grenoble en 1952, est tout à fait propice à ce moment puisqu'elle s'intitule La dégustation.
de grandes régions viticoles françaises et étrangères ont leurs Clos : Bourgogne, Beaujolais, Bordelais, Cahors, champagne-Ardenne, Minervois, Etats-Unis, Argentine ... dans lesquelles ils sont implantés.Les Clos en question sont ce jour-là au nombre de 7, au travers de 8 vins, et je préviens d'emblée qu'il faut les consommer avec modération, étaient :
A l'époque où Paul Fort lança ses "mardis" littéraires, à partir de 1905, qui attirèrent parfois deux cents personnes qu'on ne savait où placer, les boissons à la mode étaient absinthe, mandarin-citron ou picon-curaçao. Nous avons pour notre part commencé par le champagne Extra brut 2014 Clos des 3 Clochers Leclerc Briant, accompagné de petites gougères.Présenté par Léonie Wagner, le millésime 2014 est uniquement élevé en fut, et sans aucun dosage. La maison fut une des premières à faire des parcellaires. Le Clos se situe dans le jardin d'une très vieille villa et l'ancienne propriétaire aimait particulièrement se rendre à un point précis d'où elle pouvait scruter trois clochers. Cette anecdote est à l'origine du nom qui a été retenu.Nous aurions pu le déguster au trou d'un maki de saumon, d'huitres, d'un dos de barn voire même d'un carpaccio de boeuf. J'étais curieuse de découvrir le menu. Y aurait-il une des spécialités de la mythique brasserie comme les fruits de mer, particulièrement les oursins, des quenelles de brochet, le haddock poché à l'anglaise, le tartare ou le filet de boeuf "Hemingway" ?Presque puisque ce fut une Royale de Saint-Jacques qui fut déposée à la place de l'assiette de porcelaine de Limoges Raynaud alors qu'on nous proposait le Languedoc Cabrières "Clos du Temple" Gérard Bertrand 2018 et le Graves 2016 "Clos Floridène" pour accompagner cette entrée. Cette alternative est audacieuse s'agissant d'un rosé (et nous découvrîmes si besoin était qu'il peut en exister d'exceptionnels) et d'un blanc, et de prix totalement opposés.Le vignoble du Clos du Temple est situé au coeur du terroir historique de Cabrières, berceau des vins rosés depuis 1357. La récolte manuelle en caissette se fait au lever du jour. Le Clos du temple est vinifié comme un rouge mais il a un goût de blanc à la minéralisé étonnante. 2018 est le premier millésime de ce Clos qui utilise des cépages de Grenache, Cinsault, Syrah, Mourvèdre et Viognier poussant sur 7 parcelles de 8 hectares travaillées uniquement en traction animale. Tout y est mené en biodynamie.La bouteille a fait l'objet d'une fabrication spéciale par une jeune designeuse. Elle s'est inspirée de la structure architecturale des premiers temples pour concevoir une base carrée en forme de pyramide où l'on peut voir quatre piliers. Plus haut les lignes dorées rappellent le dôme historiquement recouvert d'or pour orienter les pèlerins. Un chai à demi sous-terrain est en construction par François Fontes, un grand architecte montpelliérain qui a travaillé dans les ateliers de Jean Nouvel. Il évoquera lui aussi l'architecture d'un temple en hommage à l'ordre des Templiers qui laissèrent leur nom au vignoble.Place ensuite au Clos Floridène, qui fut constitué depuis 1982 par Denis et Florence Dubourdieu (dont les deux prénoms forgèrent le nom) en partant quasiment de rien. C'est la seule appellation de la zone des Graves à porter le nom de son sol.Ce vin est issu de vieilles vignes de plus de cinquante ans. Il porte le caractère des vins blancs issus des grands terroirs calcaires : couleur d'or vert, arôme intense aux notes fruitées, saveurs puissantes. Il peut se conserver au moins dix ans.On remarque sur l'étiquette la goélette America qui traversa l'Atlantique en 1885 que Denis Dubourdieu, amoureux de la mer, et malheureusement décédé en 2016, a voulu sur ses bouteilles, de blancs comme de rouges dont les productions sont aujourd'hui pratiquement équilibrées. Ce rouge provient d'une association inhabituelle à Bordeaux de Cabernet-sauvignon sur calcaire. D'où sans doute ses notes de menthe, de réglisse et de fumée et des saveurs toniques puissantes.Le Suprême de volaille fermière, garniture forestière et légumes est servi avec le Graves 2011 "Clos Floridène" et le Pomerol 2014 "Clos vieux Taillefer", travaillé en fichage comme en Bourgogne pour donner du tannin comme nous l'expliqua Alexandra Robin.Il témoigne néanmoins de beaucoup de rondeur et de suavité.Tomme de Savoie et Comté de la Fromagerie Dubois furent dégustés avec le Minervois La Livinière "Clos d'Ora" Gérard Bertrand 2013, élevé sur un terroir d'exception de 9 hectares, clos de murs en pierres sèches, à 220 mètres d'altitude, avec les quatre cépages méditerranéens emblématiques que sont la Syrah, le Grenache, le Mourvèdre et le Carignan.Et aussi avec le "Clos de los Siete" 2016 qui est un vin argentin. les vendanges de ce vin atypique sont faites à la main.Pour terminer, un Champagne Brut "Clos Mandois" 2008 qui fut servi avant le dessert afin qu'il puisse s'oxygéner. Ses bulles sont très fines et son effervescence est légère en raison de son vieillissement sur lie pendant 10 ans. Le second nez révèle des notes toastées de brioche, presque un arôme de vieux cognac.Il était encore délicieux une fois réchauffé par la température ambiante. La maison a été créée en 1735 et travaille dans la tradition de Don Pérignon (dont l'assemblage fut la plus grande découverte).Enfin le Millefeuille à la vanille de Madagascar fut apprécié pour sa légèreté.
Closerie des Lilas - 171 Boulevard du Montparnasse, 75006 Paris