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L’harmonie de la musique, la violence du monde

Par Pmalgachie @pmalgachie
L’harmonie de la musique, la violence du monde Habité par le chant, porté par les voix de ses personnages, Le temps où nous chantions, deuxième roman traduit (par Nicolas Richard) en français de Richard Powers est un choc qui fait vibrer les âmes, qui remue les cœurs. Une œuvre ample dans laquelle se déroulent plusieurs fils, tous soutenus par des mélodies choisies dans un vaste répertoire, de la musique ancienne aux airs à la mode. C’est une famille dont tous les membres se réunissent sans cesse pour former un chœur dans lequel le plaisir est intense. Pour les trois enfants, il dépasse de très loin tout ce qu’ils peuvent connaître à l’extérieur du foyer. Pour les parents, il est le lien initial, autour duquel ils se sont rencontrés, et qu’ils perpétuent en même temps qu’ils en font une part de leur héritage. La meilleure part. Car, pour le reste, dans une Amérique où les tensions raciales sont toujours au bord d’exploser, ils ont réuni des éléments potentiellement dangereux : David Strom est un juif allemand qui a émigré en 1939 ; Delia Daley est noire. Leurs enfants, métis, n’appartiendront vraiment à aucune société – sinon celle de la musique. L’harmonie règne chez les Strom, quand ils ne regardent pas trop ce qui se passe autour d’eux. Ils sont dans une bulle gonflée d’harmonies et des explications de David sur l’univers. Physicien, celui-ci fréquente les grands savants de son époque. Et c’est d’ailleurs un violoniste nommé Albert Einstein qui sera en partie responsable de l’éclatement de la bulle : fasciné par le talent évident de Jonah, le fils aîné, il convainc ses parents de lui donner la chance de devenir un grand chanteur. Pour cela, il faut affronter le monde, en commençant par des écoles qui ne voient pas toujours d’un bon œil arriver un enfant noir. Malgré ses dons, Jonah se heurte donc à un refus avant d’intégrer un établissement digne de lui. Quoique le jeune homme prétende longtemps en apprendre moins là-bas qu’à la maison. Il n’y trouvera vraiment son équilibre qu’au moment où son frère Joseph le rejoindra. Moins doué pour le chant, il sera néanmoins un parfait accompagnateur – et pourra, un jour, vivre de sa facilité à tresser des mélodies au piano, tandis que la carrière de Jonah a pris son envol. Quant au troisième enfant, Ruth, elle est celle qui introduit les fausses notes de la violence. Elle rejoindra les Black Panthers, excédée par la manière dont les Noirs sont traités malgré des lois qui ont bien évolué depuis la jeunesse de ses parents. A travers elle et son mari, les affrontements deviennent une réalité à laquelle il faut faire face, au risque d’y perdre la vie…
Un grand roman, dont on se souviendra longtemps.

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