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Fragments de nuit, inutiles et mal écrits (saison 3), le 43 : épisodes 16-17-18

Par Blackout @blackoutedition
Fragments de nuit, inutiles et mal écrits (saison 3), le 43 : épisodes 16-17-18

Pour les livres de Richard Palachak, c'est par ici : KALACHE, VODKA MAFIA, TOKAREV

Fragments de nuit, inutiles et mal écrits (saison 3), le 43 : épisodes 16-17-18

Photo de Simon Woolf

Le 43, épisode 16 : Nono

Un Bagmann est un jeune hipster qui fait le tour de la ville en biclou pour fourguer du tabac rigolo pré-conditionné dans son sac à dos. C'est une sorte de vago qui passe ses journées à tracer de poire en poire afin de liquider son stock de kif au plus vite. Mais c'est la version bifteck du bloqueur (je censure le terme exact volontairement). En France les kailles glandouillent en attendant leurs abonnés. Mais ce bon vieux Nono a tout du bagmann, excepté la jeunesse, le vélo et la touche hipster. Lui c'est plutôt la cinquantaine, chemise hawaïenne et bécane. Y m'a pas fallu plus de trois jours au 43 pour le griller. M'enfin, c'est surtout que le keum est pas du genre à se planquouser. Pourrait se coller un papillon sur le cigare histoire de faire du battage pour son affaire que ça n'y changerait rien. Puis, quand j'ui demande s'il s'est déjà fait gauler, Nono me répond franc comme un comtois : « ça fait dix-sept ans que j'y vais cash et j'ai jamais eu de pépin. » Ça daube l'indic à plein nez... puis je me ravise et me dis que moins on se cache et plus on est discret. Ou tout du moins normal. Y a que Linda qui semble n'y voir que du feu, ou peut-être qu'elle laisse pisser, vu que ça tond la pelouse h24 sur toutes les terrasses de Besac... alors c'est pas la mort du petit poney. Autrement, Nono a le feu au cul façon lièvre de mars, il transpire comme un gnou qui se retient de déposer une pêche, une livraison l'attend toujours quelque part. Entre deux foutres, y siffle un verre à l'arrache au 43, son mobile à la pogne, en nage. Y sert quelques gigots tout sourire, avec sa bonhomie de papa gâteau, ravitaillent deux trois loustics au passage et c'est reparti pour la bourre contre la montre. Ah mais c'est cul de réduire ce mec à ça. Certes au final, c'est tout ce que la galerie retient de lui : le bout de zetla qu'y reste après son départ. Sauf que Nono, quand il est sur pause, y change carrément de religion et se met au tacot du 43. C'est parti pour la blindoche et la beurrée dans la joie et la bonne humeur, cool Raoul et jamais un mot plus haut que l'autre. Dans ces moment-là, le gentil papa range sa balance de précision et quand il peut prolonger la soirée, par une after tocbombe à sa colloque, il sort les instrus, se met à la battante... et voit défiler les anges.

Le 43, épisode 17 : Gérard

Gérard est le parfait portrait de Daniel Balavoine dans « Mon fils ma bataille. » Sauf que lui, c'est plutôt « une gamine dans ma caravane », au fond de la forêt de Chahut, version Francis Heaulme. Et j'bidonne pas, c'est une bonne vieille idée de derrière les balloches qu'il a pondu sans rigole à Karl, un soir de pistache au 43. Sinon, faut le voir, avec ses bouclettes de footballeur est-allemand, son jean de papa et sa veste assortie, qui fouettent les années les plus sombres de la mode. Gérard est un chtarbé complètement ravagé du grelot, toujours rond comme une queue de pelle. Y fait partie des caves à recadrer sans cesse au 43. Ce pochtron chimé de la touffe attaque le rôti en loucedoc et pattes de velours, y baratine à la cool, au milieu de notre équipe en terrasse. Puis les nerfs le chatouillent, surtout avec les filles, la discussion lui court sur le bide et le barjot monte dans les tours. Y s'met à brailler comme dans un marché à fromage et Fredo doit intervenir avant qu'il n'arrache les yeux d'une nénette. Il a le vin mauvais en plus d'être maboule et dans ces moment-là, Gérard arbore une tête de faits-divers qui fait peur. Vous vous dites sans doute qu'il est misogyne ou macho, mais c'est plus compliqué que ça. Gérard est plutôt du genre phallocentrique. Il aime les sucres d'orge... et en même temps, il en a la trouille, car il est dépourvu de couilles. Alors, quand un poilu lui dit fermement de redescendre, il se change en enfant de chœur et va recommander une mousse au bar. Ensuite, y revient doux comme un agneau et de r'bif en r'bif y recommence. Un soir au au 43, au milieu d'une attrapade avec Layla sur un sujet géopolitique à pisser dans un bénitier, Gérard se met à jurer comme une poissarde estonienne et traiter Layla de noms dégueulbifs à chier partout. Personne ne voit rien venir, en trois coups les gros le dératé dérouille le Tibia de Layla par une volée de chopine à bière. Ç'en est trop pour cette fois, et le dingo finit tricard. Layla passe l'éponge, même si elle doit boiter durant trois mois, sachant que le type est fou à lier. Ça n'empêche pas Karl de l'inviter à ses afters. Et la dernière fois, juste après avoir balancé presto subito, comme un poil de cul roumain sur le goguenot d'un Crown Plaza, qu'il se léchait les babines en se faisant bourrer le pot par des travelos bisontins, je le mirave allongé sous le piano à queue de Karl, en train de papoter avec l'instrument... et de refaire le monde avec de l'érable sycomore. Ah sacré Gégé ! Y a pas à tortiller, c'est bien le plus timbré du 43.

Le 43, épisode 18 : Ali

Être écrivain consiste aussi à relever des défis. En l'occurrence, il s'agit de vous parler d'un Saint Jean bon comme le bon pain sans être casse-burnes pour le lecteur. Et vu que je suis un enfoiré, ça va pas être de la tarte à foutre meringuée. Ce bon vieux Dédé m'a rappelé récemment une interview de Céline qui disait grosso merdo : « la littérature c'est le style. Si vous voulez des histoires, y en a plein les tribunaux. » ç'a toujours été mon parti, de beaucoup miser sur le style. Aujourd'hui plus que jamais, je dois m'appuyer sur lui... ce fameux style... mais un style bien particulier : celui de la grossièreté, pour équilibrer le portrait de ce Joseph Sainte Essence qui s'appelle Ali. Tout d'abord, Ali n'est pas l'une des trousses à bites habituées du 43. Y traîne un peu dans tous les trous du cul de troquets de la saucisse hongroise arrachée du Christ. Oui, ce n'est pas un suceur de truie ficelé à une cuve à foutre en particulier ; tel un ornithorynque atteint de courante, il est toujours de passage. En fait, Ali n'a pas le temps de chier dans les ventilateurs, il trime comme une hostie de mongol. Au moins dix heures par jour, sept jours sur sept, y fait mille fois le tour du string sans toucher l'élastique. Y tape et retape des baraques, puis réinvestit son pèze en Algérie pour bâtir un château qui s'élèvera comme un poil au milieu d'un champ de bites, mais vous vous en tapez les couilles sur des raquettes de jokari. C'est juste pour que vous compreniez que ce dégourdi n'est pas un con à se gratter les burnes sur du crépi. Quand il débarque au 43, y s'tamponne l'oreille avec une babouche d'avoir des traces de plâtre ou d'enduit sur les sapes, il est jamais crado pour autant. J'dirais même qu'il s'en claque les roubignoles sur le front, car ce mec est aussi clean qu'un fécalome de cristal, à l'extérieur comme à l'intérieur. Sa mère ne devait certainement pas boire l'eau des pâtes quand elle l'a éduqué, car Ali est pété de valeurs et de principes en or, sans pour autant nous casser les balloches avec la religion. Ali, c'est le gars qui te défonce le cul à coups de perceuse, en affichant constamment la sagesse du respect, de la patience et du contrôle des émotions. Sa force tranquille, il l'impose à toutes les têtes fripées du 43, juste en portant droit sur ses épaules, sa tête de mafieux russe. On sait d'emblée qu'il nous ferait bouffer des étrons sans fourchette, si on lui cherchait des crosses. Alors n'allez pas lui dire un truc du genre « ta mère a joué dans Jurassic Park » (oui, fallait que je la place quelque part, celle-là), car son Dieu veut des hommes forts et pas des moutons. Ça me taille le bambou de l'avouer, mais sa seule présence au 43 irradie le calme et baisse d'un cran les têtes de merde. Pour finir, Ali n'est pas le genre de fils à partouzes à vous laisser dans la panade. Un soir au 43, y a un mangeur de colombin qui tombe en panne à deux heures du mat', après une heure de rab en mode fracass offerte par Fredo (voir chronique 2). Dans ce type de situation, le gars que tu réveilles pour venir te dépanner t'envoie gentiment chier dans la putain qui t'a mis au monde. À part Ali. Layla lui bigophone et le voilà qu'arrive avec les câbles et qu'y se met à connecter sa bagnole à celle de l'autre pelle à tarte. Y a qu'un fils de Yak dépuceleur de nourrices qui ne reconnaîtrait pas qu'Ali est un mec équilibré, posé, sain, loyal et bon. Zéro défaut. Le Yang nécessaire au Yin fada du 43. Et le premier qui dit le contraire, je prends des rollers et roule sur ses morts.

Richard Palachak

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