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Victor Brauner, peindre c’est la vie

Publié le 20 décembre 2019 par Jigece
1950s, Victor Brauner dans son atelier (photo Emile Savitry)

Victor Brauner, né le 15 juin 1903 en Roumanie et mort le 12 mars 1966 à Paris, est un peintre français d’origine roumaine. D’abord dadaïste, puis surréaliste, et par ailleurs communiste idéaliste, il est un des membres de l’importante communauté d’artistes et intellectuels roumains de Paris avec Brâncuși, Cioran, Ionesco, Isou, Tzara et d’autres.
Son enfance est marquée par trois faits importants : la grande révolte paysanne de 1907 en Moldavie qui le confronte directement et brutalement à la misère et au désespoir du peuple ; les séances de spiritisme de son père auxquelles il assiste en secret ; l’excitation provoquée par le passage de la comète de Halley en 1911, perçu selon les superstitions de l’époque comme un « présage funeste ».
La famille Brauner, après Hambourg et Vienne, se fixe à Bucarest en 1918. C’est là que Victor étudie à l’École des beaux-arts de 1919 à 1921.
En octobre 1924, il expose ses œuvres et édite, avec Ilarie Voronca, une revue Dada, 75 H.P. (un seul numéro), dans laquelle il écrit le manifeste de la « picto-poésie », ni tout à fait peinture, ni tout à fait poésie, qui juxtapose des formes géométriques différenciées selon la couleur et la touche du pinceau dans un esprit à la fois futuriste, dadaïste et constructiviste. Son jeune frère Théodore Brauner deviendra d’ailleurs une figure marquante de la photographie surréaliste.
Un premier voyage à Paris, en 1925, lui fait découvrir Giorgio De Chirico et les surréalistes. Mais ce n’est qu’en 1932, installé à Paris, qu’il prend contact avec ces derniers grâce à Yves Tanguy. Il commence une série de tableaux autour du symbole de l’œil énucléé (Salomé). Son autoportrait (1931) peut être interprété comme une prémonition de la perte de son œil sept ans plus tard. En octobre et novembre 1933, il participe au 6e Salon des surindépendants en compagnie de membres du groupe surréaliste.
En 1934 a lieu sa première exposition parisienne à la galerie Pierre. Après un retour à Bucarest, en 1935, il revient à Paris en 1938 et partage l’appartement d’Yves Tanguy. Il rencontre Jacqueline Abraham qu’il épousera en 1946 (L’Étrange K de Monsieur K).
Dans la nuit du 27 au 28 août 1938, lors d’une bagarre entre Óscar Domínguez et Esteban Francés, il est atteint en plein visage par un verre qui le prive définitivement de son œil gauche. Jusqu’à la déclaration de guerre de septembre 1939, le peintre traverse une période dite des Chimères. Il expose de nouveau au Salon des surindépendants.
Après la défaite de juin 1940 et l’occupation partielle de la France par l’armée allemande, Victor Brauner se réfugie dans la famille du poète Robert Rius (dont il vient d’illustrer le recueil Frappe de l’Echo) à Perpignan. Il loge à Canet-plage, puis est en résidence surveillée à Saint-Féliu-d’Amont. En novembre, il est à la villa Air-Bel à Marseille, avec d’autres artistes comme André Breton, Max Ernst ou Wifredo Lam. Il espère obtenir un visa pour quitter le pays et échapper à la répression du régime de Vichy. L’espoir d’exil se révélant vain, Victor Brauner est alors caché par René Char avant de se réfugier, dès mars 1942, chez des paysans des Hautes-Alpes jusqu’en 1945. La précarité de sa vie le contraint à s’adapter et utiliser le peu de matériau dont il dispose. Ainsi, il peint à la cire, matière à qui il donne une valeur alchimique, voire ésotérique.

Victor Brauner à la galerie Alexandre Iolas, affiches 1948 et 1965

De retour à Paris, il occupe à partir de 1945 un atelier au 2 bis, rue Perrel.
En 1947, il participe à l’Exposition internationale surréaliste, à la galerie Maeght et présente son être-objet Loup-Table. Après cette exposition, il quitte le groupe surréaliste, par solidarité avec Matta qui vient d’en être exclu. Dans les années suivantes, il tombe malade et s’inquiète du sort des Roumains illégaux en France, risquant d’être livrés à la nouvelle dictature stalinienne mise en place à Bucarest, qui réclame leur extradition.
Cependant, les galeries Alexandre Iolas (marchand attitré de Magritte qui a des galeries à New York, Paris, Genève et Milan – il sera aussi le premier à exposer Warhol, et un des premiers soutien de Niki de Saint-Phalle), puis la galerie Samy Kinge, assurent le rayonnement de son œuvre à travers de nombreuses expositions dans le monde entier. 
En 1965, Brauner conçoit son œuvre testament, un cycle de 13 tableaux « Mythologie et la Fête des Mères », dont les cadres en bois découpé et peint font partie intégrante, et dont les titres renouent avec l’esprit Dada : L’aéroplapla, L’automoma, Le poisson à roulettes.
Victor Brauner meurt l’année suivante, le 12 mars 1966 des suites d’une longue maladie. Il est inhumé à Paris au cimetière de Montmartre (3, allée Cordier) ; sur sa tombe est inscrite en épitaphe une phrase extraite de ses carnets : « Pour moi peindre c’est la vie, la vraie vie, MA VIE… ». L’été suivant, Brauner représente néanmoins la France à la 33e Biennale de Venise.

La galerie

Voici une sélection d’œuvres de Victor Brauner, de 1921 à 1965.

1921, Victor Brauner : Portrait de jeune fille
1923, Victor Brauner : Sans titre (Portrait d'homme)
1922-24, Victor Brauner : Peisaj din Balcic
1925, Victor Brauner : Chevalier, cheval blanc et serpent
1925, Victor Brauner : Portrait d'Ilarie Voronca
1927, Victor Brauner : Portrait de Claude Sernet
1929, Victor Brauner : Poetul Geo Bogza arată capului său peisajul cu sonde
1930, Victor Brauner : Sans titre
1931, Victor Brauner : Sans titre
1931, Victor Brauner : Adam et Ève
1931, Victor Brauner : Autoportrait
1931, Victor Brauner : Sans titre
1932, Victor Brauner : Fantomas
1932, Victor Brauner : Hypergenese de la réapparition
1932, Victor Brauner : Paysage méditerranéen
1930-34, Victor Brauner : Le tournant de la soif
1934, Victor Brauner : À René Char
1934, Victor Brauner : Conspiration 2
1934, Victor Brauner : Hitler
1934, Victor Brauner : Indicateur de l'espace
1934, Victor Brauner : La base et le sommet
1934, Victor Brauner : La récapitulation de l'amour
1934, Victor Brauner : Portrait d’André Breton
1934, Victor Brauner : Prestige de l'air
1934, Victor Brauner : Sans titre
1934, Victor Brauner : Sans titre
1930-35, Victor Brauner : Composition avec Portrait
1930-35, Victor Brauner : Composition
1937, Victor Brauner : La fiancée de la nuit
1937, Victor Brauner : La mode
1937, Victor Brauner : La ville qui rêve
1937, Victor Brauner : Le dernier voyage
1937, Victor Brauner : L'envoyeur
1937, Victor Brauner : Peint d'après nature
1937, Victor Brauner : Visages Métaphysiques
1938, Victor Brauner : Au crépuscule
1938, Victor Brauner : La Parole
1938, Victor Brauner : Le Chevalier de Glace
1938, Victor Brauner : Le départ
1938-39, Victor Brauner : Dénombrement 3
1939, Victor Brauner : Dancing Girl
1939, Victor Brauner : Espace psychologique
1939, Victor Brauner : Héron d'Alexandrie
1939, Victor Brauner : Nude and Spectral Still Life
1940, Victor Brauner : Femme en chatte
1940, Victor Brauner : Naissance de la Matiére 1
1940, Victor Brauner : Naissance de la Matiére 2
1941, Victor Brauner : Extrème conciliation
1941, Victor Brauner : Souffrance, souffrance
1942, Victor Brauner : Mythotonie
1942_Victor-Brauner_Repas-de-la-somnambule
1942_Victor-Brauner_Signe-ou-Le-vent
1943_Victor-Brauner_Nombre
1943_Victor-Brauner_Objet-de-contre-envoûtement
1945_Victor-Brauner_Conglomeros
1945_Victor-Brauner_La-pétrification-de-la-Papesse
1946_Victor-Brauner_Jacqueline-au-grand-voyage
1946_Victor-Brauner_Strigoï.-La-Somnambule
1947-39_Victor-Brauner_Loup-table-
1947_Victor-Brauner_Anagogie
1947_Victor-Brauner_Le-Surréaliste
1947_Victor-Brauner_Les-amoureux-Messagers-du-nombre
1948_Victor-Brauner_La-méthodieuse
1948_Victor-Brauner_Septième-Sens
1948_Victor-Brauner_Totem-de-la-subjectivité-blessée-II
1949_Victor-Brauner_Acolo
1949_Victor-Brauner_Sevrage-du-moi
1949_Victor-Brauner_Victor-Victorel-à-lhypercoït-barbarogéne-
1949_Victor-Brauner_Victor-Victorel-procureur-général-de-lorgasme-propulseur
1949_Victor-Brauner_Victor-Victorel-trouve-lincube
1950s_Victor-Brauner-dans-son-atelier
1950_Victor-Brauner_Être-rétracté-en-chien
Consciousness of Shock
1952_Victor-Brauner_Nature-morte
1952_Victor-Brauner_Tête-de-femme
1953_Victor-Brauner_Abstract-composition
1953_Victor-Brauner_Tapis-vert
1954_Victor-Brauner_Jeux-Hommes
1954_Victor-Brauner_Mémoire-des-réflexes
1954_Victor-Brauner_Prelude-to-a-Civilization
1955_Victor-Brauner_Le-baiser
1955_Victor-Brauner_Maternité
1956_Roberto-Matta-Victor-Brauner_Innervision
1956_Victor-Brauner_La-découverte-de-la-conscience
1956_Victor-Brauner_Lémotion-immobile
1956_Victor-Brauner_Prélude-à-une-civilisation
1956_Victor-Brauner_Spatial-Additivity
1957_Victor-Brauner_Origine-de-la-poésie
1957_Victor-Brauner_Provocation
1958_Victor-Brauner_Éclosion-érogène-III
1959_Victor-Brauner_Dialogue-de-lair
1959_Victor-Brauner_Le-spécialiste-du-vide
1959_Victor-Brauner_Portrait-of-Dimensional-Space
1959_Victor-Brauner_Reconstruction-de-lêtre-aimé
1960_Victor-Brauner_Expulsion-reintegration
1960_Victor-Brauner_Hypnotic-Rupture
1960_Victor-Brauner_Montée-du-regard
1960_Victor-Brauner_Two-Forces
1961_Victor-Brauner_Androgynat-II
1961_Victor-Brauner_Composition-16-III
1961, Victor Brauner : Hôtesse
1961, Victor Brauner : Arbre des délices
1962, Victor Brauner : Extrait du Radiant Symbolique
1962, Victor Brauner : La formatrice
1962, Victor Brauner : Les voies abandonnées
1962, Victor Brauner : Logos et les trois matières
1963, Victor Brauner : La question
1964, Victor Brauner : La base et le sommet
1964, Victor Brauner : Rêverie
1964, Victor Brauner : Sans titre
1965, Victor Brauner : Le poisson à roulettes
1965, Victor Brauner : L’aéroplapla
1965, Victor Brauner : Sans titre
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