Platonique est devenu synonyme de chaste. Comme si d’un côté il y avait les choses de l’amour, paroles, poésies, serments, et de l’autre, à l’opposé, le territoire du désir, gestes, caresses, appels impérieux. Comme si l’amour n’était pur qu’en niant le corps. Pourtant, tout amour, même le plus charnel, n’est-il pas platonique ?
Nul n’aimerait une insensée, qui s’offre à n’importe qui. Désirable, désirée sans doute, mais non aimée. Car je veux qu’on me choisisse, moi seul. L’amour fuit donc l’abandon dû à la folie. Il rejette également toute violence réelle. Ce qui est extorqué par la force supprime l’amour. Mais quand la violence est simulée, chacun sait qu’elle peut cesser à tout instant.
Ces remarques montrent que l’amour vise l’âme, parce qu’il suppose la volonté — le choix, la reconnaissance, le consentement. C’est parce que l’offrande charnelle est librement consentie que je peux l’aimer. J’aime la reine, pleinement maîtresse d’elle-même, qui renonce volontairement à sa puissance pour me faire roi. Comme c’est le souverain dévoué et acquis qu’elle aime en moi.
Ces passations de pouvoir et ces consentements charnels sont l’âme de la relation amoureuse. Au fondement de l’érotisme se trouvent les signes de la liberté.