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#2020RacontePasTaVie - jour 64, courage fuyons

Publié le 04 mars 2020 par Aymeric

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Je ne sais plus si je vous en ai déjà parlé mais je ne suis pas bien courageux.

Entre l’affrontement et la fuite, pour moi la question ne se pose même pas.

Probablement doté d’un radar à risques bien plus performant que la moyenne j’ai tendance à trouver que les bonnes occasions de fuir foisonnent.
Entendons-nous bien, je ne parle pas seulement de situations où les coups sont à craindre. Situations pour moi rarissimes.
Je pense surtout à toutes ces fois où il y a risque d’interactions sociales un peu compliquées : lorsqu’il s’agit de devoir s’expliquer, d’essayer d’obtenir quelque chose, de justifier sa présence ou même simplement de prendre la parole devant un parterre, même minuscule.

Bref, tous ces moments de l’existence où on doit mettre en jeu sa réputation, sa dignité, son moi social en somme.
A chaque fois que l’une d’elle semble s’esquisser, aussitôt la panique me saisit, rendant de fait très compliquée l’élaboration savante des plans de retraits que mon cerveau cherche de toutes ses forces, à la fois dopé et pollué par l’adrénaline le parcourant à gros flots.

Laissez-moi à ce sujet vous narrer une petite anecdote.
La scène se passe alors que j’explore le Parlement européen (si, si, je vous en ai déjà parlé).
Après avoir pu assister dans l’ombre à une réunion de groupe, je tente le lendemain un amphi indiquant que s’y déroulera un groupe de travail et réflexion avec entrée libre.
Très bien, me dis-je, voilà de quoi remplir encore mon carnet de notes avec de la bonne matière propre à écrire un article de première bourre que les rédactions s’arracheront à prix d’or, qui me vaudra toutes les éloges et m’ouvrira les portes de la haute notoriété journalistique.

Tout à mes songes de Perrette je m’installe en fond de salle.
Un peu petite la salle, à mesure que des gens arrivent les sièges se remplissent assez pour que l’on s’installe à mes côtés.
Je prends sur moi, respire profondément et concentre mon regard sur la tribune où les intervenants prennent place eux aussi.
L’un d’eux, le plus au centre, celui qui sera, je suppose, amené à diriger les débats, prend le micro et, après l’avoir tapoté et s’être raclé la gorge annonce :
« Bien, Écoutez, merci à tous d’être venus, je crois que le mieux pour commencer c’est que nous nous présentions. »
Ainsi font-ils. Je griffonne quelques notes.

Et puis, alors que les gens en face de moi avaient terminé d’énumérer leurs noms et titre, une personne au bout d’un rang de l’amphi fait de même sur l’air de :
« Bonjour, Jenesais Plusqui, représentant de Jene Saisplusquoi. »
Tiens, me dis-je, la tribune était trop petite pour tous les intervenants.
Puis un deuxième, un troisième, les uns après les autres ces messieurs-dames se présentent.

La sueur m’inonde brusquement.
Mon esprit est rempli de balles rebondissantes s’entrechoquant follement avec, sur toutes, marqué panique en lettres majuscules.
Il n’y a plus qu’une poignée de personnes qui me séparent de la prise de parole, il me faut agir vite. Très.
Sans trop savoir ce que je fais, je me trouve avec mon téléphone à la main, puis à l’oreille bafouillant des « allo, oui, allo » et sors de la salle avec un air gêné pas du tout de composition et des mimiques d’excuses.


C’était brouillon, frustre et peu élégant mais je m’en contente : j’ai réussi mon exfiltration.
Enfermé à clef dans des toilettes pour reprendre mon souffle et mes esprits je réalise subitement que j’ai laissé dans la salle toutes mes affaires (casquette, manteau, sac, ordinateur et carnet de notes).
Il va falloir y retourner.

Je repousse le moment tant que je peux, envisage même de planquer dans les toilettes et de guetter par l’entrebaillure le moment où l’amphi se vide de tous ses occupants.
Mais la crainte qu’une partie de mon matériel disparaisse me pousse à agir.
De profondes inspirations à nouveau ainsi qu’un vigoureuse séance d’auto-coaching devant le miroir (muette la séance, je n’avais pas envie de trop tenter le diable de l’humiliation non plus) et je me décide à revenir dans la salle.

Je me compose de démonstratives mines contrariées faites pour exprimer un « non, mais vraiment , on n’est jamais tranquille, vraiment, ces gens qui ont toujours besoin de vous... » y ajoute forces soupirs et fais mon retour.
Je parviens à boucler un aller et retour express avec un ramassage d’affaires record et le tout sans que me yeux ne se détournent du sol, jamais.

Sorti de l’enfer.
Il s’en est fallu de peu pour que ne soit délogé du podium de mes situations plus qu’embarrassantes le jour où j’ai détruit 18 pipettes en verre d’un coup, ou celui où j’ai, par maladresse, recouvert ma professeure d’EMT de blancs en neige, ou encore celui où je me suis promené toute la journée avec deux chaussures différentes (je veux dire de deux paires différentes).
Quoi ? Vous voudriez que je vous raconte cela aussi ? Oui, mais enfin le temps presse et votre patience s’use.


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