Magazine Cinéma

[Critique] LA PLATEFORME

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] LA PLATEFORME

Partager la publication "[Critique] LA PLATEFORME"

Titre original : El hoyo

Note:
★
★
★
★
☆

Origine : Espagne

Réalisateur : Galder Gaztelu-Urrutia

Distribution : Ivan Massagué, Zorion Eguileor, Antonia San Juan…

Genre : Thriller/Horreur

Durée : 1h34

Date de sortie : 20 mars 2020

Le Pitch :

Un homme se réveille dans une étrange prison. Dans sa cellule, qu’il partage avec un mystérieux personnage, se trouve un grand trou par lequel transite tous les jours une table remplie de nourriture. Table plus ou moins achalandée suivant que l’on se trouve dans les étages supérieurs ou inférieurs de ce gigantesque pénitencier en forme de tour…

La Critique de La Plateforme :

Difficile de ne pas penser à Cube, le film culte de Vincenzo Natali, devant le premier essai du réalisateur espagnol Galder Gaztelu-Urrutia. Même ambiance, même prison étrange. Pour autant, loin de se livrer à une sorte d’exercice de faussaire, le cinéaste trouve rapidement sa voie et nous prouve que sa démarche, tout en étant extrêmement réfléchie, s’avère d’une remarquable pertinence qui n’a au final d’égal que son audace et son jusqu’au-boutisme.

La-Plateforme-film

Manger les restes

Les films concept qui n’arrivent pas à pleinement exploiter le dit-concept, sont nombreux. La Plateforme est fait d’un autre bois. Très adroit, Galder Gaztelu-Urrutia a déjà pour lui d’entrer dans le vif du sujet sans perdre de temps ni balader le spectateur en faisant son petit malin. Ainsi, les premiers enjeux sont rapidement expliqués au protagoniste principal, à travers le personnage du vieux taulard qui sait tout (ou presque). Le réalisateur nous donnant les bases pour totalement nous immerger dans cet univers intriguant. Quelques minutes suffisent pour être happé par le film qui sait, par la suite, nous proposer autre chose pour faire progresser sa réflexion sur le capitalisme. Un peu à la manière de Snowpiercer, avec cette idée de niveaux/wagons. Les plus hauts sont les premiers servis et ceux qui restent en bas sont condamnés à s’entre-tuer pour survivre. Le détail génial concernant La Plateforme étant que les pensionnaires de cet enfer de béton sont condamnés à changer de niveaux tous les mois, pouvant donc passer du 3ème ou du 4ème, là où la bouffe est abondante, au 180ème, où le quotidien peut vite se transformer en enfer.

L’enfer c’est les autres

Le cauchemar dans lequel se retrouve plongé Goreng, le personne central, calque sa dynamique sur celle de la société consumériste, en en amplifiant ses travers. Goreng qui en plus, est là de son propre grès, afin de se défaire d’une addiction. Ce qui aussi, quand on y pense 2 minutes, en dit long sur le sens du film. Autre détail excellent : sur la plateforme, tout le monde peut emporter un objet. De quoi offrir au scénariste Pedro Rivero l’opportunité de là encore faire rebondir sa narration au fil de trouvailles toujours parfaitement amenées et jamais vaines. Un scénariste qui, de concert avec le réalisateur, n’hésite pas non plus à regarder l’horreur en face, au fil de séquences très crues et parfois très dures. Voir chaque jour, cette table pleine de victuailles descendre, vide ou pleine, suivant l’étage sur lequel se trouvent les prisonniers, s’apparente ainsi à une brillante allégorie du monde tel qu’il est construit. La survie du plus fort ou du mieux lotis par le hasard, la chance ou d’autres facteurs… Le film mettant l’accent sur ces dysfonctionnements que seuls quelques-uns entendent dénoncer pour espérer faire changer les choses. Et là aussi, alors qu’il n’aurait pu s’imposer que comme un simple jeu de massacre sadique, La Plateforme surprend dans son déroulé, nous offrant une deuxième partie audacieuse, qui en plus de tenir l’ennui à distance, à l’instar de Snowpiercer, repousse encore un peu plus loin le concept, avec une intelligence renouvelée.

Au centre de cette brillante et cruelle allégorie, les comédiens, magnifiquement dirigés, donnent le meilleur, jamais dans l’excès, toujours dans la mesure, alors que le metteur en scène exploite pleinement une géographie anxiogène pour faire résonner son discours. Fable sociale brûlante, La Plateforme sait de plus conclure, quitte à en désarçonner plus d’un, là encore en prenant des risques, sans se départir d’une intelligence probante. Une fin plus abstraite et audacieuse qui offre aussi à Galder Gaztelu-Urrutia l’opportunité de nous gratifier d’un plan somptueux de simplicité et lourd de sens.

En Bref…

À mi-chemin de Cube et Snowpiercer, La Plateforme s’impose, grâce à son intelligence et à la pertinence de son propos, comme un puissant huis-clos en forme d’allégorie de la société de consommation. Un film qui sait de plus proposer un spectacle souvent barbare, sans sombrer dans l’excès de zèle ni dans la démonstration de force. À ce jour l’une des plus belles propositions de Netflix…

@ Gilles Rolland

La-Plateforme
Crédits photos : Netflix

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Onrembobine 57561 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines