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Confinement - Lectures - Prix Voix d'Afrique

Par Gangoueus @lareus
Ecrire des manuscrits
Disons-le. Le confinement m’oppresse. Je ne vais pas me lancer dans un cantique de la douleur et de la douce incarcération. Non, il y a beaucoup plus dur comme entrave que celle de se préserver d’un virus à couronnes qui peut vous envoyer six pieds sous terre. Non, il y a plus dur que la liberté de circuler en terre européenne. Il y a l’impossibilité de ramener la pitance journalière pour une majorité de personnes qui ne peuvent vivre autrement qu’au jour le jour à Brazzaville ou à Abidjan. Les contraintes sont différentes.
J’en discutais avec l’écrivain togolais Sami Tchak dans un talk-show. J’ai du mal à lire en ce moment. Alors que j’ai un peu plus de temps. Je lui ai demandé ce qu’il en pensait et il a expliqué qu’il vivait un peu la même situation. Difficulté à écrire et à lire. D'autres auteurs expriment également le même souci. Ce n’est pas forcément la panacée. Et je ne partage pas le point de vue d’un article publié dans le journal italien La Repubblica sur les raisons de ces errances de lecteurs et lectrices en les portant sur les angoisses acceptées ou refoulées liées à la crise sanitaire. L’exemple de la distance à des actions décrites qui ne peuvent plus être reproduites ne tient pas la route. Les univers du lecteur sont faits de situations improbables, souvent inaccessibles qui ne nous empêchent pas pour autant de prendre notre pied. La situation est plus simple à expliquer pour moi. Il y a des lieux et des temps où je prends plaisir à lire. En vacances ou dans les transports en commun. Une des meilleures missions de consultant que j’ai eue est celle pour laquelle j’allais bosser à Saint-Quentin-en-Yvelines, en partant des environs d'Evry et en passant par Massy. 1h30 de trajet à l'aller, mais assis confortablement dans un petit gris sans subir les correspondances dures de la gare de Lyon pour rentrer dans les rames bondées du RER A. J’aime lire dans les trains. 
Confinement - Lectures - Prix Voix d'Afrique
Je me suis prêté à l’exercice de la lecture dans le cadre du jury du Prix Voix d’Afrique organisé par RFI et les éditions JC Lattes en partenariat avec la Cité Internationale des arts. Nous avions reçu cinq textes en format pdf et sur lesquels nous avons planché pendant trois semaines. Et j'ai réussi à relever le challenge, malgré le contexte. La délibération a eu lieu jeudi 2 avril par vidéoconférence, covid-19 oblige. Les cinq finalistes sur plus de 450 manuscrits envoyés par des écrivains de moins de 30 ans. 
Les finalistes étaient :
  • Arthur-Ulrick Biloa (Le temps des tambours, Cameroun)
  • Amadou Cissé (L’agonie du destin, Mali)
  • Yaya Diomandé (Bengue, le rêve d’un petit abobolais, Côte d'Ivoire)
  • Hajar Chokaïri (L’envers de l’été, Maroc)
  • Thomas Toki (Les mirages de Philippe Kouamé, Côte d’Ivoire)

Ne comptez pas sur moi pour m’exprimer sur les détails de la délibération faite sous la direction d’Abdourahman A Waberi. Ici, je souhaite plutôt aborder avec vous les thèmes traités par les jeunes auteur(e)s finalistes de cette première édition. Le désir d’exil ou la question du retour de celles et ceux qui partent est un sujet retrouvé sur dans trois textes. La vie dans l'arrière pays et le classique conflit Traditions/Modernité. Les secrets de famille. De manière générale, la plupart des personnages n’ont pas une totale emprise sur leur destinée.
Cette expérience me donne de réaliser comment les éditeurs reçoivent les textes et plus ou moins de quelle manière les comités de lecture peuvent sélectionner les manuscrits. On identifie assez rapidement les textes qui sont prêts pour une publication, le roman qui a du potentiel mais qui doit être retravaillé. Et dans le fond, la question que je me suis posé est de savoir quel niveau d’investissement va demander l’affinement de l’oeuvre ? L’auteur va-t-il être disposé à poncer son oeuvre. Ce sont des questions personnelles que je me posais tout en avançant dans mes lectures. Lire des manuscrits, c’est lire des oeuvres en construction, des textes qui parfois n’ont pas de charpente, ou encore des histoires dont le liant entre les personnages n'est pas maîtrisé. Des anachronismes. Des personnages qui grandissent plus vite que le temps qui passe. Bref, du brut de décoffrage. Et le travail qui suit est celui d'un orfèvre.
Ce fut donc une expérience riche. Je souhaite bon vent au lauréat.  

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