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Journal d’un futur rentier (69)

Publié le 09 mai 2020 par Chroom

Quand je vois les files de gens qui s'agglutinent devant les stands de distribution de nourriture, j'ai honte de faire partie de ce monde. Pays riches ou pas, nous sommes incapables d'assurer aux individus des jobs suffisamment solides et rémunérateurs pour qu'ils puissent vivre de manière décente sans devoir faire la manche dès que l'économie est à l'arrêt.

Je me sens également coupable de m'apitoyer sur mon sort depuis des années juste parce que "j'ai trop de travail" et pas assez le temps de vivre. En ce moment beaucoup de gens préféreraient être stressés par leur job plutôt que son absence. Cela me fait penser à un caprice d'enfant gâté. J'ai l'impression de voir mes gosses pleurnicher parce qu'on leur a servi un yogourt de la Migros plutôt qu'un Emmi.

Pourtant, à bien y réfléchir, ce sont paradoxalement les mêmes mécanismes qui sont en jeu derrière le fait que certains n'arrivent plus à joindre les deux bouts tandis que d'autres sont submergés par le travail. Depuis près d'un quart de siècle que je suis actif, le niveau de stress de mon activité n'a cessé de croître, particulièrement durant les phases de déclin économique. Plus il y a de chômeurs, plus le job se reporte sur les autres et plus on peut leur en demander avec la menace implicite d'un licenciement. Quand la phase de croissance revient, les restructurations font que jamais on ne revient au même point qu'avant la crise. Le niveau de tension est devenu structurellement plus élevé. Il ne reste alors plus qu'à attendre le prochain choc pour serrer encore un peu plus la vis.

Les actionnaires en veulent toujours plus, les patrons aussi et les consommateurs également. Sans compter les workaholics qui se délectent de ce cycle infernal. La Rat Race explique donc ce monde paradoxal, dans lequel une partie de la population est pressée comme des citrons tandis que les autres n'arrivent plus à joindre les deux bouts, en dépendant de la générosité (philanthropique ou fiscale) des premiers. Le comble c'est qu'elle arrive encore à nous faire culpabiliser...


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